Romell Quioto « se sent bien » à Montréal. Et ce, « malgré la température qui peut parfois être difficile ». On ne le contredira pas là-dessus.

L’entretien virtuel de La Presse avec l’attaquant hondurien du CF Montréal se déroule la veille du match retour de l’équipe en Ligue des champions, reporté d’une journée en raison des conditions météorologiques menaçant l’intégrité du toit du Stade olympique.

« Heureusement, [la météo] ne nous touche pas pendant très longtemps », nous dit-il par l’entremise d’un interprète qui traduit ses propos de l’espagnol au français. « Ça se passe très bien, j’adore la ville et je suis très à l’aise à tous les égards. »

Romell Quioto entame en 2022 sa troisième année à Montréal. Il en a été dans l’intervalle le meilleur buteur, avec huit filets et six passes décisives à chacune de ses saisons.

Et il a déjà fait débloquer son compteur, avec un but et une passe mercredi, dans une victoire de 3-0 face à Santos Laguna.

Le partisan Rosales Selvin-Noel, Hondurien vivant à Montréal depuis 2004, a été témoin de sa performance mercredi. Il a même refilé à Quioto son drapeau du Honduras à la fin du match. L’attaquant a republié sa story sur Instagram, et lui a écrit un petit mot en message privé.

« Il m’a promis son maillot original pour le prochain match », nous dit-il au bout du fil, au lendemain de la victoire du CF Montréal.

PHOTO FOURNIE PAR ROSALES SELVIN-NOEL

Rosales Selvin-Noel au centre, déployant le drapeau du Honduras. Son fils est à gauche. À droite, son ami et le garçon de celui-ci.

« Savoir qu’un Hondurien qui joue pour mon pays est ici, ça me touche. C’est un gros sentiment parce qu’en plus, j’aime comment il joue, j’aime sa manière d’être. En espagnol, on dit orgullo. C’est bon pour l’orgueil. Quand je suis dans le stade et qu’on crie son nom, ça me rend fier. »

« Une enfance heureuse »

Romell Quioto est une grande vedette au Honduras.

« Dieu merci, j’ai pu devenir ce qu’on pourrait qualifier de joueur important pour mon pays, souligne Quioto. J’ai eu la chance d’avoir une belle trajectoire, une belle carrière. C’est important pour moi d’avoir la reconnaissance des gens dans mon pays. »

Romell Quioto est né à Rio Esteban, petite ville côtière de la province de Colón, au Honduras. Tapez le nom de cette ville dans un moteur de recherche et vous ne trouverez pas même de page Wikipédia. En revanche, des deux photos disponibles sur Google Maps, l’une illustre une plage, l’autre un terrain de soccer.

« J’ai eu une enfance heureuse, j’étais un enfant joyeux, sympathique, raconte Quioto. J’allais à l’école et je me concentrais sur le foot. Ç’a toujours été ma passion. »

« Ce dont je rêvais quand j’étais enfant, c’était de pouvoir être professionnel. Dieu merci, j’ai pu réaliser ce rêve. »

En 2010, à 18 ans, le jeune Romell fait ses débuts professionnels avec le CD Vida, club établi dans la ville de La Ceiba. C’est à un peu moins de deux heures de route à l’ouest de Rio Esteban.

« C’est là que j’ai vraiment pu avoir mes premières minutes et montrer ce dont j’étais capable. »

Au vu de la proximité, est-ce qu’il s’agissait de l’équipe de ton enfance ?

« Je n’étais pas vraiment fan d’aucun club en particulier quand j’étais enfant, concède-t-il. Je me concentrais surtout sur le jeu. J’ai eu l’occasion d’aller faire un essai avec eux et c’est comme ça que les choses ont déboulé ensuite. »

Il y a eu un prêt peu fructueux en Pologne au Wisła Cracovie, en 2012-2013, puis un retour au Honduras plus convaincant.

Il s’entend avec le CD Olimpia en novembre 2013, et c’est là que sa carrière prend son envol. Il marque 38 buts en 96 matchs, et remporte plusieurs titres nationaux.

En 2016, il est vendu au Dynamo de Houston, en MLS. Il connaît des hauts et des bas au Texas. Son flair offensif est présent (15 buts en 75 matchs), mais son séjour dans le sud des États-Unis se termine en queue de poisson. Le 8 août 2019, il est expulsé d’une rencontre contre le New York City FC après une altercation avec un défenseur adverse. Son entraîneur Wilmer Cabrera se dissocie publiquement de son geste et Quioto doit s’excuser sur les réseaux sociaux. Après une suspension de deux matchs et deux mois sans jouer, il annonce qu’il ne rejouera plus à Houston.

C’est là que l’Impact, à l’époque, entre en jeu. En novembre 2019, on échange le défenseur Victor Cabrera et 100 000 $ d’argent d’allocation générale pour faire l’acquisition de l’international hondurien.

Et il fait sa marque rapidement : il trouve les cordages dès sa première joute à Montréal, un match nul de 2-2 contre le Deportivo Saprissa en Ligue des champions, le 19 février 2020. Juste avant le mois de mars fatidique de cette année-là.

« Au début de la pandémie, j’ai vécu seul toute cette expérience ici, raconte-t-il. C’est sûr que c’était difficile. Heureusement, j’ai su garder une certaine force mentale à travers toute cette épreuve. Le club m’a beaucoup appuyé là-dedans et je lui en suis très reconnaissant. »

« On s’est arrangé pour que je puisse m’entraîner à la maison, on m’a envoyé de l’équipement. Ça a aidé à traverser tout cela. Évidemment, il y a eu tous les épisodes d’exil qui n’ont pas été faciles. Mais le club a toujours fait en sorte que j’ai été mis dans les meilleures conditions pour traverser une situation compliquée. »

« Il a besoin d’être en santé »

Il reste que pour Quioto, l’enjeu sera de rester en santé cette année. Son absence à la fin de la saison 2021, jumelée à celle de l’attaquant Mason Toye, a grandement miné les chances du club de se qualifier pour les séries. Et le CF Montréal n’a pour l’instant pas de relève claire et nette à cette position.

« On connaît ses qualités, nous a dit Wilfried Nancy après la rencontre de mercredi. Il a besoin d’être en santé pour répéter ce genre de performance. On a eu une bonne discussion en début d’année pour essayer de faire en sorte qu’il s’améliore sur le fait de rester plus longtemps sur le terrain. Donc de faire plus de matchs en étant moins blessé. »

Au-delà de tout ça, Romell Quioto semble vivre sereinement dans la métropole québécoise, où il aime « faire du magasinage, de la lecture et écouter de la musique » dans ses temps libres, en plus de prendre le temps de parler à sa famille au Honduras.

On le voit sur les publications du club en train de danser à l’entraînement. Ou rire de son coéquipier Djordje Mihailovic, qui tente quelques pas de son cru.

« J’aime beaucoup danser, j’aime beaucoup la musique, dit-il, le sourire dans la voix. Depuis mon arrivée au club, j’essaie de transmettre cette bonne énergie au groupe, de toujours amener de la joie, du positivisme. C’est très important de pouvoir évoluer dans une ambiance positive comme ça. »