Les Canadiennes ont remporté la médaille d’or olympique l’été dernier à Tokyo, après leurs deux médailles de bronze consécutives en 2012 et 2016. « Dans les mots de Christine Sinclair, si ça, ça ne réussit pas à déclencher une ligue professionnelle au Canada, je ne sais pas ce que ça va prendre. »

Ces mots, ils nous viennent d’Amy Walsh, ancienne joueuse de la sélection canadienne.

C’est pourquoi elle était à l’écoute lorsque la Women’s Premier Soccer League (WPSL) a dit « répondre à l’appel » de cette demande, mardi soir, dans une publication signalant son arrivée dans le paysage sportif canadien. Le tweet, accompagné d’une vidéo, a depuis été supprimé.

Outre le fait que les villes de Montréal, Toronto, Calgary et Vancouver y étaient mentionnées, la ligue se faisait jusque-là avare de commentaires.

On en sait aujourd’hui un peu plus sur cette annonce.

La WPSL, qui existe depuis 23 ans aux États-Unis, veut « établir les fondations » du projet canadien en instaurant une division semi-pro avant tout. Elle promet d’offrir du soccer féminin professionnel « d’ici deux à cinq ans ».

On pourrait même voir le premier coup de ballon à « l’été 2022 », selon le président des opérations de la ligue, Santiago Almada.

« L’objectif est de bâtir l’infrastructure en premier », explique-t-il.

L’idée est un peu de « créer une deuxième division avant la première division », poursuit-il.

Interrogé à propos de l’aspect financier de cette « Division II », à savoir si les joueuses auront un salaire notamment, Almada souligne que « plus de détails seront bientôt dévoilés ».

On veut qu’il y ait un partenariat avec tous les clubs. L’objectif, c’est d’avoir un partage des commanditaires et des droits médiatiques.

Santiago Almada, président des opérations de la WPSL

Les clubs seront « partenaires de la ligue », selon le communiqué mis en ligne jeudi. Cette structure de gouvernance s’apparente à ce qu’on voit dans les autres ligues professionnelles en Amérique du Nord, mais diffère de son offre américaine, qui sert déjà 135 clubs actifs de l’autre côté de la frontière.

Si la WPSL américaine « appuie » la ligue canadienne, cette dernière en est une « entité séparée ».

Ce modèle financier leur permettra de « distribuer les actifs dans la ligue, les clubs et éventuellement les joueuses ».

« Notre plus grande contrainte, ce sont les voyages, ajoute Almada au téléphone. Le pays est tellement géographiquement massif que des équipes pourraient devoir voyager 2000 km. Pour nous aider à réduire ces coûts, on veut avoir une approche basée sur la communauté. »

« On veut avoir encore plus d’investissements pour attirer plus de commanditaires, etc. C’est ce qui va faire s’entamer la course pour cette première division que nous voulons créer plus tard. »

« Pas tout le monde ne sera content »

Selon Amy Walsh, ce délai d’attente avant une ligue professionnelle est trop long.

« C’est bien beau d’avoir ça dans deux à cinq ans, mais c’est trop loin pour moi », se désole-t-elle au bout du fil.

Parce que, outre les athlètes qui sont dans la ligne de mire de la sélectionneuse du Canada Bev Priestman, « il y a des joueuses élites qui sont une coche en bas de ce bassin de joueuses ».

Sans ligue professionnelle, « elles doivent faire un choix ». « Je ne suis pas capable de gagner ma vie en étant joueuse de soccer, alors je dois arrêter, illustre Walsh. [La WPSL] ne s’adresse pas à ces joueuses-là. »

Et Amy Walsh se pose une autre question : qu’en est-il des ligues semi-pro provinciales ?

Est-ce que ça va entrer en compétition avec la Première ligue de soccer du Québec (PLSQ) ou la League1 d’Ontario ?

Amy Walsh

Julie Casselman, coordonnatrice du soccer féminin chez Soccer Québec, la fédération qui régit la PLSQ notamment, nous a indiqué n’avoir « aucune information » à propos de la WPSL.

« Ça va être le même bassin de joueuses, croit Amy Walsh. Ça va simplement diluer le talent qui existe déjà dans la province. »

Santiago Almada concède que « ce n’est pas tout le monde qui sera content avec ce que cette ligue deviendra ».

« Mais une des choses qui nous distingueront, ce sera notre jeu interprovinces. C’est plus une ligue nationale qu’une ligue provinciale. »

Qui y participera ?

La WPSL canadienne aura deux conférences, la Canada East et la Canada West. Almada confirme qu’il n’y aura pas que les quatre clubs des villes déjà mentionnées. « Nous aurons une approche nationale », énonce-t-il.

Il pourrait donc y avoir des équipes issues des Prairies, selon lui.

Nous avions de l’intérêt de toutes les provinces, en gros. Le but est d’unifier ces régions qui n’avaient pas d’équipes semi-pros ou de ligue dans laquelle jouer.

Santiago Almada

Est-ce que des équipes de la CPL, ou même de la MLS, se sont montrées intéressées ?

« On a eu des conversations avec des clubs de ce calibre », révèle Almada. Mais il ne va pas plus loin, faisant plutôt référence au « processus d’application et d’autorisation » qui est en cours.

« La partie la plus importante, ce sont les autorisations que les clubs nationaux doivent avoir. C’est une exigence qui est instaurée pour l’organisation. C’est pourquoi nous allons annoncer les équipes graduellement. Ça a plus de sens de le faire lentement que rapidement. »