Malgré un revers de 4-0 essuyé face à une Argentine déjà en mode Coupe du monde, l'ex-académicien de l'Impact de Montréal Jimmy-Shammar Sanon s'est dit très fier d'avoir pu défendre le maillot haïtien face à l'idole d'une génération. L'actuel tacticien de l'Académie de l'Impact Patrice Bernier ne peut que se réjouir pour le jeune lavallois de 21 ans, d'autant plus qu'il est lui aussi originaire d'Haïti.

« À chaque match, j'ai la même routine. Avant d'entrer sur le terrain, je ferme mes yeux. Je remercie le Seigneur et je lui demande de me protéger et de me donner la force de connaître un bon match. C'est un moment où je suis très serein et très silencieux. Mais cette fois, alors que je faisais mon petit rituel, j'entends les quelque 60 000 personnes rassemblées au stade se mettre tout d'un coup à crier. J'ouvre mes yeux, je me retourne et je le vois... Lionel Messi. Il est juste là, à quelques centimètres à ma gauche. Sur le coup, il y a rien qui me vient en tête. Je suis décontenancé », a confié à La Presse un Jimmy Sanon qui, même si son avion venait tout juste d'atterrir à Ottawa où il évolue, semblait encore avoir la tête à Buenos Aires.

Accueilli le 29 mai dernier à La Bombanera, domicile du mythique club argentin Boca Juniors, le jeune québécois d'origine haïtienne n'en était qu'à son troisième match sous les couleurs d'Haïti. Si Sanon eut espéré un meilleur sort pour son équipe, il dit tout de même sortir de ce match avec le sentiment du devoir accompli. « Malgré la défaite, ça représente un accomplissement en soi. Lionel Messi, c'est le joueur de ma génération. Je l'ai vu faire ses débuts à 17 ans et grandir dans le foot mondial. L'affronter sur le terrain, c'est sûr que c'est quelque chose de gros dont je suis très fier », a-t-il déclaré. 

Questionné à savoir s'il avait marqué d'une croix l'affrontement entre Haïti et l'Argentine dans son calendrier et s'il avait mis les bouchées doubles en club pour espérer faire partie de la liste du sélectionneur pour ce duel amical, Sanon répond que « peu importe l'adversaire, tu veux toujours être convoqué en équipe nationale. Tu veux prouver que tu es capable et que tu as ta place sur l'équipe. Mais cette fois-ci, c'est certain qu'il y avait une motivation supplémentaire », a-t-il admis.

Les bons mots de Patrice Bernier

Même si Jimmy Sanon avait déjà quitté l'académie de l'Impact lorsque Patrice Bernier s'est joint à leurs rangs, l'ex-capitaine du club montréalais a tout même eu la chance de le voir évoluer lors du camp préparatoire de l'Impact en 2016.

« Jimmy est un jeune avec beaucoup de qualités et de vitesse. Il est très instinctif » a commenté Patrice Bernier. Je suis content qu'il ait la chance de jouer des matchs internationaux contre de grandes nations comme l'Argentine. J'espère qu'il le voit comme un apprentissage et une source de motivation. »

À la blague, Bernier a ajouté que Sanon et Haïti pouvaient bien s'enorgueillir d'avoir mieux fait que le Canada en 2010 lorsqu'il avait été convoqué par l'unifolié pour affronter les Argentins. Le Canada avait alors encaissé cinq buts en route vers une défaite cuisante de 5-0. Bernier n'avait toutefois pas disputé de minutes, blessé à l'ischiojambier.

Le nouveau tacticien de l'Académie de l'Impact a également profité de l'occasion pour dire que l'exploit de Jimmy Sanon est la preuve que les jeunes du Québec et du Canada sont en droit de rêver au soccer de haut niveau. « Tu peux bien être d'origine haïtienne et avoir grandi à Montréal, du jour au lendemain, tu peux te retrouver sur le même terrain que le meilleur joueur au monde. Le soccer relit le monde et ce que Jimmy a accompli montre que ce qui nous paraît inatteignable à la télé ne l'est pas réellement. »

« Ne lui faites pas de mal »

Lors de son séjour de huit jours en Argentine, l'attaquant du Fury d'Ottawa dit avoir été marqué par l'admiration sincère qu'ont les Argentins pour leur joueur prodige. « Tout au long de la semaine, nos entraînements étaient ouverts au public et chaque jour, il y avait au moins cinquante personnes qui venaient nous voir pour nous dire «Oh ! Vous allez jouer contre Messi ? Por favor, faites-y très attention. Ne lui faites pas de mal. Tous les jours. Même à l'hôtel ! » a-t-il raconté. 

L'attaquant du FC Barcelone n'était toutefois pas la seule super-vedette alignée par « l'Albiceleste » mardi dernier. Mascherano, Di Maria, Otamendi et Higuain, pour n'en nommer que quelques-uns, faisaient également partie du XI partant de l'Argentine. Si de tels canons du soccer mondial peuvent être intimidants sur un terrain, Sanon croit plutôt que « c'est en jouant contre les meilleurs que tu peux te comparer et voir où tu te situes. C'est en observant la qualité de ces joueurs que tu deviens meilleur », a-t-il ajouté. 

Même s'il est sorti à la mi-temps, Jimmy Sanon gardera évidemment de précieux souvenirs de son match contre l'Argentine, des souvenirs tout aussi précieux que le maillot flanqué du numéro 10 que l'Argentin lui a remis en main propre après le match et qu'il a pris le soin d'autographier. 

Enfin, l'ex-académicien de l'Impact de Montréal ne veut pas que cette rencontre au sommet demeure son plus grand fait d'armes. Il espère sincèrement poursuivre avec l'équipe nationale d'Haïti et envisage avec beaucoup d'enthousiasme les qualifications pour la Gold Cup 2019 à la fin de l'été.