Son nez ensanglanté avait symbolisé la frustration d'une équipe d'Espagne condamnée à l'échec dans les années 1990. Le nouvel entraîneur du FC Barcelone, Luis Enrique, revient au club qui lui est le plus cher, porteur de tous ses espoirs après une saison difficile.

C'est du sommet d'un échafaudage que cet Asturien de 44 ans, né le 8 mai 1970, adepte du triathlon, a suivi les entraînements de l'équipe qu'il vient de quitter, le Celta Vigo.

Après de premières semaines difficiles dans le club galicien, où il est arrivé l'été dernier, l'idée de l'entraîneur avait surpris et provoqué les moqueries.

Ferme, il était pourtant resté perché pour mieux observer ses joueurs. Et au terme d'une saison plutôt réussie avec le Celta, qui a terminé neuvième de la Liga, il a finalement convaincu.

«Exigeant», «interventionniste, perfectionniste, avec une pointe d'obsession qui peut se heurter à certains caractères difficiles, bien qu'au Celta, tout le monde ait apprécié sa personnalité directe et naturelle», écrivait le journal sportif catalan Mundo Deportivo début mai.

Dissipés, les doutes sur l'échafaudage: «l'important c'est que celui qui y monte ne le fasse pas par snobisme: il sait ce qu'il fait», tranchait le quotidien catalan.

Lors de sa saison à Vigo, le technicien a été associé «à des valeurs comme l'intensité et le caractère», écrivait le quotidien El Pais.

Malgré son départ anticipé, un an avant l'échéance du contrat signé avec le Celta en juin dernier, Luis Enrique s'est gagné les suffrages de la maison galicienne.

«Les portes de ce club te restent ouvertes et tu peux compter sur le soutien de tous les partisans», a déclaré son président, Carlos Mouriño, avant de le serrer dans ses bras le 16 mai, lorsque l'entraîneur a annoncé son départ.

Hué par les partisans du Real

Luis Enrique revient désormais à son grand amour: le FC Barcelone, dont il fut l'un des joueurs emblématiques avant de mener, en tant qu'entraîneur, l'équipe réserve du Barça jusqu'en deuxième division en 2010, une première en onze ans.

C'est sur le banc de cette équipe qu'il a commencé sa carrière d'entraîneur, en 2008, prenant la relève de Pep Guardiola, alors parti diriger l'équipe première.

Il avait quitté le club en 2011 puis entraîné l'AS Rome pendant la saison 2011-2012.

Preuve de son fort caractère, susceptible d'en hérisser certains, Luis Enrique avait eu en Italie des problèmes avec Francesco Totti, l'idole des tifosi.

«Totti n'est pas un joueur comme les autres, il est spécial, unique», avait admis l'Espagnol en septembre 2011, avant d'asséner: «Mais c'est moi qui décide qui va sur le terrain. C'est mon droit, et même si je me trompe.»

Avant de devenir entraîneur, Luis Enrique avait évolué à Gijon (1989-1992), mais surtout au Real Madrid (1992-1996) puis au FC Barcelone (1996-2004), où il s'est hissé au rang de joueur emblématique.

Le club rappelait lundi, en annonçant sa nomination pour deux ans en remplacement de l'Argentin Gerardo Martino, qu'il avait à cette époque «gagné le coeur des partisans, par son engagement et son goût pour la compétition», devenant «une pièce maîtresse de l'équipe grâce à sa polyvalence et ses qualités techniques».

Le passage entre les deux plus grands clubs rivaux de la Liga ne s'était pas fait en douceur.

Devenu un «culé» barcelonais convaincu, il a renié publiquement son époque madrilène, affirmant qu'elle ne lui «rappelle pas de bons souvenirs». Et s'est attiré ainsi les foudres des partisans du Real Madrid, qui le huaient copieusement lorsqu'il portait le maillot blaugrana.

Avec l'Espagne, Luis Enrique avait été champion olympique en 1992 à Barcelone. Il compte aussi 62 sélections (12 buts) en équipe nationale.

C'est lors de l'un de ces matchs, en quart de finale de la Coupe du monde 1994 aux États-Unis, que le joueur avait reçu un coup de coude de l'Italien Mauro Tassotti qui lui avait brisé le nez.

L'image de Luis Enrique, en larmes, le maillot maculé de sang alors que l'arbitre n'avait pas sifflé de penalty, était devenue l'emblème amer d'une équipe d'Espagne qui semblait alors condamnée à la défaite.

Il est désormais chargé de reconduire le FC Barcelone sur le chemin de la victoire.