Il y avait Luis Suarez l'Espagnol, Ballon d'Or 1960; il y a désormais Luis Suarez l'Uruguayen, en passe de se faire un nom dans l'histoire de son pays après son doublé mardi contre le Pérou (2-0) envoyant la Celeste en finale de la Copa America où elle visera un 15e titre.

«C'est un grand attaquant, il fait partie de l'élite des attaquants du football mondial», a relevé Oscar Tabarez. Le sélectionneur sait ce qu'il doit à «Luisito».

Depuis ses débuts en équipe nationale en février 2007, il a déjà marqué 20 buts (en 47 sélections), à sept longueurs de Diego Forlan et à neuf du recordman Hector Scarone, attaquant mythique des années 1920. Et Suarez n'a que 24 ans!

Et déjà un statut de sauveur, acquis en un tournemain lorsqu'il fait un arrêt de gardien sur sa ligne face au Ghana en quart de finale du Mondial 2010, à la dernière seconde. Carton rouge, mais le penalty de Gyan va en tribunes, le match jusqu'aux tirs au but et l'Uruguay en demi-finale.

«Je suis un "golerazo" (un grand gardien), ç'a été l'arrêt du Mondial, je n'avais pas le choix, et la "main de Dieu", c'est moi qui l'ai maintenant», avait ironisé l'attaquant.

Le Mondial 2010, c'était pour Forlan, élu Ballon d'Or; la Copa 2011 sera pour Suarez. Avec trois buts, il a rejoint l'Argentin Sergio Agüero en tête du classement des buteurs et posé sa candidature pour le titre de meilleur joueur du tournoi.

Énervant, énervé

Lui, c'est le Pérou: le numéro 9 avait répliqué à l'ouverture du score de Guerrero lors de la première rencontre contre l'Albirroja (1-1), au premier tour, sur une passe en profondeur de Lodeiro. Mardi soir, il lui a fallu cinq minutes pour miner les Péruviens, en reprenant depuis un angle fermé un ballon relâché par la gardien (53e), puis en le battant en face-à-face (58e).

«Le premier but, j'étais convaincu que le ballon allait avoir un mauvais rebond, et puis ç'a été plus facile, a-t-il raconté. Le deuxième but, en tête-à-tête avec le gardien, pour un attaquant lancé, c'est plus facile. Le terrain était très mauvais, et pour éviter de mal frapper dans le ballon ou dévisser, je n'ai pas voulu tirer trop fort pour assurer ma frappe.»

Buteur, et travailleur, qui harcèle sans cesse les défenses. Un joueur très énervant; les Argentins s'en souviennent, notamment leur capitaine Javier Mascherano, exclu pour une faute sur l'attaquant en quart de finale (1-1 a.p., 5-4 t.a.b.).

Un joueur très énervé, aussi: sur le terrain, Suarez n'arrête pas de vitupérer contre ses coéquipiers pour une passe mal ajustée ou un appel ignoré; il lève les bras au ciel, conteste sans cesse l'arbitrage, va au charbon.

Mardi soir, il était averti dès la 13e minute pour une faute. «On l'a remplacé, parce qu'il avait un carton jaune, et avec ou sans Suarez en finale, ce n'est pas la même chose», a expliqué Tabarez.

L'attaquant de Liverpool depuis six mois est entré dans la mythologie de l'Ajax Amsterdam en trois saisons et demie seulement (111 buts en 159 matches). À 24 ans, son horizon Celeste est dégagé.