Absentéisme massif dans les écoles, rues bloquées, survol du parlement par des avions de chasse: Montevideo a rendu un hommage grandiose à l'équipe d'Uruguay qui a terminé 4e du Mondial-2010, son meilleur résultat depuis 40 ans.

A pied, à moto ou en voiture, des dizaines, voire des centaines de milliers d'Uruguayens ont applaudi la Celeste. L'autocar transportant les joueurs a mis plus de quatre heures pour parcourir la trentaine de kilomètres séparant le centre d'entraînement de la sélection du palais législatif.

Même si les autorités n'ont pas donné de chiffre, l'affluence rappelait à beaucoup les plus grandes manifestations récentes de l'histoire de ce pays sud-américain de 3,4 millions d'habitants et notamment celle de «l'Obélisque» organisée fin 1983, pour réclamer la fin de la  dictature (1973-1985).

«Merci les garçons, au nom de tout le peuple uruguayen. Vous l'avez mérité (...), vous nous avez fait rêver», a déclaré le président José Mujica avant de remettre une médaille aux joueurs et aux membres de l'encadrement.

«Nous sommes allés en Afrique du Sud avec le rêve de ramener la Coupe du monde», a enchaîné le capitaine Diego Lugano.

«Nous avons tutoyé la gloire, sans réussir à l'obtenir. Mais en échange, nous avons remporté une coupe bien plus belle que ce que nous pouvions imaginer: voir tout l'Uruguay uni, bras dessus, bras dessous, criant sa fierté que nous ressentons tous, d'être nés dans ce pays», a-t-il ajouté.

Dès le petit matin, après une froide nuit d'hiver austral, au moins 200 personnes attendaient déjà leurs héros, arrivés la veille au soir, sur le parvis du parlement.

Fini la nostalgie

«Les filles ont raté le collège, nous avons les pieds gelés, mais peu importe», a déclaré à l'AFP Cinthia, 33 ans, venue avec sa fille de 14 ans, Catherina, et une de ses amies, Romina.

L'autocar de la sélection, flanqué du slogan «Orgullo Celeste» (fierté celeste) suivi de centaines de motos et voitures, a parfois eu du mal à fendre la foule brandissant drapeaux et banderoles.

«Merci de nous avoir donné tant de joie», «l'Uruguay, le pays avec le plus de gloire par habitant au monde», pouvait-on lire sur certaines pancartes.

Les joueurs, sourire aux lèvres, ont passé le trajet aux fenêtres de leur autocar pour saluer la foule et filmer l'événement.

Le parcours inespéré de la Celeste, dernière qualifiée pour le Mondial après un repêchage contre le Costa Rica, a transporté de joie les Uruguayens, qui ont longtemps vécu dans la nostalgie des deux titres mondiaux de 1930 et 1950.

«D'une certaine manière, ces triomphes nous ont porté préjudice, car ils ont généré un orgueil impressionnant et nous nous sommes crus les meilleurs sans prendre en compte que nous nous mesurions à l'époque à une Europe détruite par deux guerres», a expliqué à l'AFP le sociologue du sport Leonardo Mendiondo.

«Soixante ans après et plusieurs désastres plus tard, des générations libérées de ce poids veulent faire la fête et nous commençons à réécrire l'histoire du football (...) avec des attentes plus raisonnables, au vu de notre potentiel en tant que pays de 3,5 millions d'habitants», a-t-il ajouté.