La «toile» monumentale de Robert Green samedi contre les Etats-Unis dans le Mondial-2010 (1-1) s'inscrit dans une tradition des portiers anglais: tournoi après tournoi, ils suscitent l'hilarité du monde et ruinent les rêves de gloire de leur sélection.

Green, 30 ans, est l'héritier de Peter Bonetti et David Seaman, responsables des éliminations des Coupes du monde 1970 et 2002 contre l'Allemagne de l'Ouest et le Brésil; de David «Calamity» James, qui arrondit ses fins de mois en faisant la promotion d'un DVD sur les plus grosses bourdes de l'histoire; de Paul Robinson et Scott Carson, à l'origine de l'absence à l'Euro-2008.L'Espagnol Iker Casillas avait prévenu l'Angleterre qu'elle avait «un gros problème». Plutôt que de le taxer d'«irrespect», elle aurait dû l'écouter.

Le choix est limité pour le sélectionneur Fabio Capello, qui devrait arbitrer entre la jeunesse de Joe Hart et l'expérience de David James pour affronter l'Algérie vendredi: ses trois gardiens font partie du club fermé des cinq Anglais titulaires en Premier League... Aucun des huit premiers du championnat ne confie le rôle à un local.

Green joue à West Ham, 17e du championnat; James, bientôt 40 ans, a porté les couleurs de Portsmouth, dernier; le choix de l'avenir, Joe Hart, 20 ans, a brillé pour un club de milieu de tableau, Birmingham, après s'être vu barrer la route à Manchester City par l'Irlandais Shay Given.

Formation déficiente

L'un des symboles du sacre de 1966, Gordon Banks, explique pourquoi il ne trouve pas de successeur: «Les entraîneurs étrangers ne prennent pas le risque d'aligner un Anglais de 19 ou 20 ans, même si leur titulaire est blessé. Si on n'offre pas d'expérience aux jeunes, ils ne progresseront pas.»

Il y a un an, Ben Foster était le titulaire naturel. Doublure d'Edwin Van der Sar puis N.3 à Manchester United, il a été écarté faute de compétition.

Peter Shilton (pas irréprochable sur «la main de Dieu» de Diego Maradona en 1986), pointe du doigt la formation: «Ces dix dernières années, l'aspect technique de l'entraînement a disparu. On laisse les gardiens s'entraîner dans leur coin.»

Pour Shilton, Capello a sa part de responsabilité parce qu'il a attendu le dernier moment pour annoncer à Green qu'il serait aligné: «Un gardien veut savoir. Capello aurait dû dire: Mon titulaire, c'est toi.»

«Ce genre de truc psychologique peut affecter un gardien», renchérit l'entraîneur de Blackburn, Sam Allardyce, appuyé par l'ancien portier d'Arsenal, Bob Wilson: «Un gardien a besoin d'un minimum de 24 heures pour se préparer. Dans l'idéal, il faut plusieurs jours. La confiance se bâtit dans la connaissance de son statut de titulaire.»

Interrogé avant le match pour savoir s'il appréciait d'être laissé dans l'incertitude, Green avait répondu: «On verra si c'est une bonne ou une mauvaise chose.» On a vu.