La 12e place du Canada au relais 4x10 kilomètres des Championnats du monde de Val di Fiemme, hier, ne laisse pas grand-place à l'analyse. Devon Kershaw, deuxième relayeur, a connu une journée terrible, à l'image du reste de sa saison. Il n'en fallait pas plus pour que les fondeurs à la feuille d'érable se fassent éjecter.

«Il m'a dit que c'était l'une de ses pires courses depuis des années», a raconté Alex Harvey, joint au téléphone en Italie, au sujet de son ami Kershaw, qui a très mal encaissé cet échec.

«Je l'ai rarement vu aussi déçu, aussi à terre», a constaté le fondeur du mont Sainte-Anne quelques minutes avant de passer à table pour le souper. «Ça lui tient à coeur. Nous, on n'est pas déçus de lui. On est déçus de notre résultat en tant qu'équipe. Lui en fait une affaire personnelle, c'est sûr. En même temps, c'est juste une course de ski de fond. Ce n'est pas une question de vie ou de mort. Ça a mal été, that's it. C'est difficile pour lui. Je pense qu'il va falloir qu'il rebondisse.»

Reste à avoir comment. Numéro deux mondial l'hiver dernier, Kershaw n'a jamais réussi à trouver sa forme cette année. Quand son coéquipier Len Valjas, qui n'était pas dans sa meilleure journée non plus, lui a passé le relais pour la deuxième portion de classique, l'Ontarien de 30 ans accusait un retard d'une dizaine de secondes sur les meneurs. Il ne s'est jamais remis de l'effort initial qu'il a dû fournir pour combler l'écart. Il a fait le yoyo pendant quelques kilomètres avant que l'élastique ne cède pour de bon.

Harvey dans une «forme incroyable»

Esseulé, Ivan Babikov, troisième relayeur, s'est essayé sur cinq-six kilomètres avant de lever le pied. Quand est venu le tour d'Harvey, désigné pour la dernière portion en style libre, il avait reçu la directive de se réserver pour le 50 km classique de demain. Il a franchi les 10 km à un rythme confortable, en zone aérobie (165-170 de battements/minute), avec quelques pointes de vitesse à chaque tour pour préparer son corps aux efforts de demain.

Car Harvey, dans une «forme incroyable» dixit son entraîneur Louis Bouchard, sera beaucoup plus actif pour cette épreuve-reine qui clôturera les Mondiaux de Val di Fiemme.

«On va le voir beaucoup plus combatif qu'il ne l'a été depuis le début des championnats», a prévenu Bouchard, qui a ajusté les entraînements et le plan de course en conséquence. «Il se portera beaucoup plus vers l'avant du peloton, pour qu'éventuellement, s'il y a une échappée, il puisse la prendre.»

Harvey serait étonné que des attaques décisives soient tentées avant le 40e km. Sur ce parcours sélectif et dans des conditions de neige qui s'annoncent lentes - le mercure a atteint 12 °C hier - le Québécois prévoit une course d'usure et une sélection par l'arrière. «J'ai de la misère à voir encore un grand groupe après 40 km», a dit celui qui avait fini cinquième de cette épreuve à Oslo en 2011. «Il va falloir que je reste à l'avant pour ne pas avoir trop souvent à donner de gros coups pour revenir dans le groupe de tête, si jamais il y a des écarts.»

Petter Northug, qui a conduit la Norvège vers un triomphe attendu au relais, visera un troisième titre en Italie. Le Suisse Dario Cologna, vainqueur du skiathlon, ne voudra certainement pas attendre la dernière ligne droite pour lui disputer la victoire.