Alex Harvey est-il parti trop tôt? À la lumière des résultats, il semble que oui. Dans la salle de presse, cette opinion semblait la plus répandue après la poursuite de 30 kilomètres des Mondiaux d'Oslo, hier après-midi.

Devon Kershaw, meilleur Canadien avec une neuvième place, offrait une analyse plus nuancée quelques minutes après la fin de la course.

«Je sais qu'il se sentait bien, mais oui, il est parti vraiment tôt», a d'abord dit Kershaw au sujet du coup de force de son grand copain.

«Peut-être a-t-il voulu faire comme Johan Olsson a fait aux Jeux olympiques l'an dernier (ndlr: il a gagné le bronze en se sauvant de loin)?» a enchaîné l'Ontarien, qui estimait lui-même avoir commis une erreur tactique en attaquant trop tôt dans le dernier tour. «Mais il est peut-être juste un peu trop inexpérimenté pour maintenir une telle action. Je sais que ce gars-là va gagner des médailles mondiales et olympiques bien après que je me serai retiré. Et probablement avant moi! Il est le skieur le plus talentueux que nous ayons eu. Chapeau d'avoir essayé. À 22 ans, je ne vois pas ça comme une grande erreur. Je veux dire, s'il avait tenu le coup, il était champion du monde...»

Justin Wadsworth, entraîneur-chef de l'équipe canadienne, a admis qu'il avait peiné à contenir son excitation quand Harvey s'est envolé. «Je connais assez bien Alex, il est tellement intelligent, il connaît son corps, et il a cette expérience de coureur cycliste, a dit l'ancien olympien américain. Quand il est parti, ce n'était pas comme un quelconque amateur qui tentait quelque chose. Je me suis dit: O.K., c'est sérieux.»

Louis Bouchard, entraîneur personnel de Harvey, a cru à un moment que ça y était. À la réflexion, il estime que le risque en valait la chandelle. Oui, Alex a actuellement la vitesse qui aurait pu lui permettre de batailler pour le podium dans un sprint final de groupe.

Mais il y a des risques de chute, de bris, de ne pas être positionné au bon endroit au bon moment, etc.

«Quand on est dans une journée où on a d'aussi bonnes sensations, ça peut être une bonne stratégie de partir soi-même, a souligné l'entraîneur. Ça peut être beaucoup plus sécuritaire. Je respecte son choix, je ne le regrette pas. Il n'en manquait pas beaucoup. Si ça passait, il gagnait facilement.»

Bouchard rappelle que Harvey, alors âgé de seulement 20 ans, était monté sur le podium en employant la même stratégie lors du 50 km de la Coupe du monde de Trondheim, en mars 2009. À la différence que l'athlète de Saint-Ferréol-les-Neiges avait été rejoint par deux autres coureurs. Le trio de tête avait alors pu unir ses forces.

Crampes musculaires

À Oslo, un tel scénario de course ne s'est pas matérialisé. «Les opinions se valent, mais moi, je crois qu'un athlète comme ça, il faut lui faire confiance, a dit Bouchard. Ça ne marchera pas toujours, mais c'est un athlète qui va être capable de gagner comme ça dans l'avenir. Ce ne sont pas tous les athlètes qui peuvent le faire.»

Bouchard s'emploiera maintenant à minimiser les risques qu'un autre épisode de crampes musculaires ne vienne perturber Harvey d'ici la fin de la compétition à Oslo. Il en a déjà discuté avec Mireille Belzile, médecin du sport et mère d'Alex. À première vue, les crampes pourraient être attribuables à un manque d'hydratation ou à un déficit en magnésium. En attendant des examens plus poussés, Harvey maximisera l'ingestion de liquides et il pourrait consommer un supplément de magnésium.