En cette journée de repos, Alex Harvey revenait d'une sortie de reconnaissance entre Cortina et Toblach, en Italie, villes de départ et d'arrivée de la sixième étape du Tour de ski.

Une reconnaissance? Oui, comme en vélo. Ça ne s'appelle pas le Tour de ski pour rien. Huit étapes en dix jours, en Allemagne et en Italie, mélangeant sprints et longues distances sur 102km, pour couronner le fondeur le plus complet de la planète.

À sa cinquième année d'existence, la formule - qui a aussi son pendant féminin simultané - connaît une popularité grandissante et semble relancer le sport du ski de fond.

«À part les Championnats du monde et les Jeux olympiques, c'est le plus gros événement de l'hiver, c'est sûr, a dit Harvey, joint au téléphone hier. À la télé, les cotes d'écoute sont meilleures que n'importe quel autre événement. Le Tchèque qui a gagné l'an passé (Lukas Bauer) a dit que pour lui le Tour était plus important que de gagner une médaille aux Championnats du monde.»

À mi-parcours de l'épreuve, Harvey, 22 ans, étonne (encore). Cinquième à 1:23 de la tête, il est le seul athlète de sa génération parmi les meneurs. Son compatriote Devon Kershaw fait encore mieux, pointant au deuxième rang, à 45 secondes du leader, le Suisse Dario Cologna.

«Je ne suis pas arrivé ici avec un objectif au total, a souligné Harvey, 22e à sa première expérience au Tour de ski l'an dernier. Je voulais plutôt avoir de bonnes journées, finir quelques fois dans le top 10 ou le top 5. À date, ça va super bien. C'est un bonus de me retrouver cinquième à mi-chemin.»

Une bonne préparation

Il faut dire qu'il a mis le paquet dans sa préparation en vue du Tour, sa seconde cible cette saison après les Mondiaux d'Oslo, en février. Avant Noël, Harvey a manqué quelques étapes de Coupe du monde afin de revenir s'entraîner chez lui, à Saint-Ferréol-les-Neiges. Trois semaines qui lui ont fait le plus grand bien. «J'ai fait le plein d'énergie physique, mais mentale aussi. J'ai retrouvé ma blonde, ma famille, mes amis. J'ai pu dormir dans le confort de mon lit. Ça a payé, c'est sûr, déjà que j'avais un meilleur niveau de forme en début de saison.»

L'équipe canadienne a aussi beaucoup misé sur ce Tour de ski. Sous l'impulsion du nouvel entraîneur-chef Justin Wadsworth - et grâce à une subvention in extremis de l'organisme B2Dix - un autobus de tournée a été loué afin de maximiser le confort et la récupération des trois fondeurs canadiens en compétition (Ivan Babikov est le troisième).

Le grand luxe

À l'intérieur, c'est le grand luxe, avec lits, table de massage, télés, internet, frigo, machine expresso et tutti quanti. «C'est comme un bus de rock star!» s'enthousiasme Harvey, qui s'attend à ce que l'initiative canadienne soit reprise par les grandes nations scandinaves l'an prochain.

Ainsi, lors du transfert de sept heures après la deuxième étape, Harvey a pu dormir, s'étirer, se faire masser, manger: «On est au chaud, c'est confortable, ce n'est pas comme être à l'arrière d'une camionnette dans une boîte en tôle.»

Aujourd'hui, à Toblach, les fondeurs canadiens pourront se réfugier dans leur «bus magique» pour reprendre des forces entre la qualification et les rondes éliminatoires du sprint libre de 1,2 km.

Galvanisé par sa septième place lors du premier sprint classique, Harvey compte sur la fatigue de quelques spécialistes pour pouvoir grappiller quelques secondes de bonification supplémentaires. Il serait ainsi avantageusement positionné en vue de l'étape suivante, un 35 km avec départ handicap de Cortina à Toblach, épreuve en ligne inusitée en ski de fond. La première moitié du parcours, que Harvey venait de reconnaître, est une montée graduelle de 17 km qui sied bien à ses qualités.

Le Tour connaîtra son dénouement dimanche avec la brutale montée de 9 km jusqu'au sommet de la station de l'Alpe Cermis, où Babikov s'était imposé il y a deux ans. Plutôt costaud à 6 pieds et 165 livres, Harvey n'est pas particulièrement adapté à cet exercice particulier - il y a une rampe à 28%! -, mais il compte défendre chèrement son rang.