«C'est comme si l'univers me disait d'arrêter. Comme si je n'étais pas faite pour faire du ski. Mais le ski, c'est ma vie. Je ne veux pas arrêter, et j'essaie de trouver une manière de continuer.»

À bientôt 22 ans, Valérie Grenier parle déjà comme une sage. Au printemps, l'ancienne championne mondiale junior de descente a dû se soumettre à une deuxième intervention chirurgicale en deux ans pour soigner des douleurs chroniques au tibia. L'opération s'est bien déroulée, mais l'athlète doit modérer ses ardeurs depuis son retour sur neige, le mois dernier, au Chili.

Selon toute vraisemblance, la Franco-Ontarienne devra composer avec un volume d'entraînement tronqué pour un bon moment, sinon pour le reste de sa carrière. Elle se fait tranquillement à l'idée.

«C'est difficile et décourageant, mais tous les athlètes ont des problèmes », tempérait-elle en rentrant de ce stage dans les Andes chiliennes. « Je commence à réaliser que je dois simplement être intelligente avec la quantité de ski que je fais. C'est triste un peu, mais ça vaut la peine d'essayer. Faire un peu moins de volume, ce n'est pas nécessairement moins bon. Si tu te donnes à 100% à chaque descente et que tu te concentres sur ce que tu as à travailler, ça peut aussi fonctionner.»

Sept jours d'entraînement

Si tout se passe bien, Grenier lancera sa saison de Coupe du monde avec un slalom géant samedi à Sölden. Selon les calculs de son entraîneur, elle n'aura alors effectué que sept jours d'entraînement dans des parcours complets, principalement à Saas-Fee, en Suisse, dans les dernières semaines.

«Si elle court, elle sera la partante avec le moins de jours de ski de tout le peloton», a jaugé Manuel Gamper, joint hier au téléphone sur la route entre les Alpes italiennes et autrichiennes.

«Normalement, à ce temps-ci de l'année, les autres auront une cinquantaine de jours dans les jambes. Personne n'a vraiment le courage de skier à Sölden avec une semaine d'entraînement. Valérie est forte mentalement. Elle n'a pas peur de se lancer dans le mur à pic. Elle n'a pas de douleur en ce moment et on verra. Les attentes sont réalistes, mais elle peut toujours surprendre.»

Jointe en fin de soirée, la principale intéressée n'avait aucun doute quant à sa présence dans le portillon de départ. «Je vais toujours vraiment bien, je n'ai aucune douleur et je me donne de plus en plus à l'entraînement, s'est-elle réjouie. Je suis vraiment contente et j'espère que ça peut continuer comme ça.»

Préparation physique

Éprouvée par le syndrome des loges et des douleurs neurologiques - «il y a un endroit sur mon tibia que je ne pouvais même pas toucher» -, Grenier a connu une dernière saison très difficile. Sa sixième place au super combiné des Jeux olympiques de PyeongChang, meilleur résultat canadien en Corée en Sud, a représenté un rare rayon de soleil.

Durant l'été, elle a fait modifier ses bottes par un spécialiste autrichien, qui lui a conçu des langues englobant ses chevilles. Cette astuce permettra de répartir le poids plus également. Elle a aussi séjourné au condo familial de Mont-Tremblant pour travailler avec les préparateurs physiques d'Erik Guay, Scott et Jaime Livingston. Ces derniers ont donné un coup de pouce à Trevor Philp, membre de l'équipe canadienne qui souffre du même syndrome.

«Notre préparateur [attitré] n'a pas beaucoup de connaissances en ski alpin, note Grenier, 13e à son troisième départ en Coupe du monde à Saint-Moritz, en 2015. Quand tu y penses, c'est un peu bizarre. Scott et Jaime ont beaucoup de connaissances par rapport au ski. J'ai fait beaucoup d'exercices spécifiques par rapport à mon sport et à mon corps.»

Comme elle a vécu une rechute après sa dernière opération, Grenier tempère ses attentes pour cet hiver, où elle se concentrera sur le géant et le super-G. «Je veux vraiment être régulière, être dans le top 30 à chaque course et monter les rangs de plus en plus. L'an dernier, je visais le top 15, top 20, et je n'ai pas réussi à l'atteindre. Je préfère avoir un but réaliste. Ça peut aussi changer selon l'évolution de la saison.»

À Sölden, Grenier aura pour coéquipière Marie-Michèle Gagnon, qui revient elle aussi d'une opération à un genou et à une épaule. «Mitch a eu une bonne période de préparation, mais il lui manque quelques jours, a précisé Gamper. On ne peut pas encore confirmer son départ.»

La Torontoise Candace Crawford représente également un point d'interrogation en raison d'une blessure à une main subie plus tôt cette semaine. Un slalom géant masculin est prévu dimanche.

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Mikaela Tommy quitte l'équipe

Mikaela Tommy a quitté l'équipe canadienne. La skieuse de Wakefield, en Outaouais, n'a pas expliqué les motifs de son retrait. «Honnêtement, c'est pas mal compliqué... Je ne veux pas vraiment en parler», a-t-elle indiqué au confrère Martin Comtois, du Droit.

L'athlète de 23 ans s'alignera pour l'Université du Colorado, dans la NCAA, et prévoit prendre quelques départs de slalom géant en Coupe du monde. Son statut de championne de la discipline du circuit Nor-Am, titre qu'elle avait aussi remporté en 2013, lui confère cette place garantie.

«Elle n'était pas aux Jeux olympiques et elle n'en était pas très heureuse, a commenté l'entraîneur-chef de l'équipe féminine, Manuel Gamper, hier. Elle a décidé de prendre son propre chemin. Quelques athlètes font la même chose. Ils doivent s'organiser par eux-mêmes. On a établi des politiques claires pour tout le monde. Tu dois être à Calgary pour la période de préparation et ainsi de suite. Tu ne peux seulement venir quand tu penses que c'est un bon moment. Elle ne s'engageait pas pour ça.»

Tommy ne compte qu'un seul top 30 en 40 départs en Coupe du monde. La représentante de la station Edelweiss s'est surtout distinguée avec une quatrième place en géant aux Mondiaux juniors de 2015. Elle entend prendre part au géant de la Coupe du monde de Killington le mois prochain.

Photo Frank Gunn, archives La Presse canadienne

Mikaela Tommy