Il faisait encore noir au Château Lake Louise quand Erik Guay est parti pour la montagne, hier matin. Les flocons tombaient sur la station albertaine, qui croule sous la neige depuis une semaine. Accompagné de son père Conrad et de son frère cadet Stefan, le skieur de Mont-Tremblant avait une mission: effacer le mauvais souvenir de sa 44e place de la veille en descente, son pire résultat de Coupe du monde en près de 10 ans.

Après deux journées d'entraînement encourageantes, ce fut un retour brutal à la réalité. «Comme je l'ai dit à mon père, tout allait trop bien, soulignera Guay en fin de journée. Si j'avais fait un top 10, ça aurait été trop facile. C'est sûr que ça me prenait un petit coup de pied au derrière...»

Il avait beau prévoir un début de saison tranquille, conséquence d'une préparation sur neige escamotée, jamais il n'aurait pensé être relégué aussi loin. Un champion du monde a sa fierté. Le plus frustrant était de ne pas savoir ce qui s'était passé sur la piste. Même la vidéo ne lui avait pas offert d'explications probantes.

«Je n'aime pas perdre, surtout quand je n'ai pas la réponse, a raconté Guay. Ça me frustre encore plus. Quand c'est comme ça, je passe des nuits sans dormir. Tu penses à trop de choses: Est-ce que ce sont mes skis? Moi? Je me suis mal préparé physiquement? Tu peux te rendre fou. Je pense que j'ai fait une bonne job pour ne pas trop m'en mettre dans la tête.»

Stefan, skieur prometteur qui a vu sa carrière stoppée nette par une blessure à un genou, avait sa propre explication sur la déconfiture de son frère. «Je pense qu'il voulait trop, qu'il skiait de façon trop agressive», a noté celui qui a récemment intégré les rangs des entraîneurs de l'équipe canadienne.

«Parfois, quand il y a beaucoup de neige comme ça, ça ne fonctionne pas.»

Comme par magie

Après trois-quatre descentes de ski libre en famille, consacrées à quelques ajustements techniques, Guay a retrouvé ses repères comme par magie. Deux heures plus tard, il a réussi le sixième temps du super-G, terminant à moins de deux dixièmes du podium et à 82 centièmes du vainqueur, son ami norvégien Aksel Lund Svindal.

Plutôt que se féliciter, Guay s'estimait chanceux d'avoir été le sixième à s'élancer sur le parcours amputé de 11 portes en raison des fortes rafales au sommet. «Je ne comprends pas plus ce qui s'est passé en descente parce que je n'ai pas vraiment skié différemment aujourd'hui [hier]», a dit l'ancien gagnant du globe de cristal de la spécialité.

Au moins, le dos a tenu le coup. «Ce ne sont pas des conditions glacées et bosselées, a cependant prévenu Guay. Il va donc falloir attendre encore quelques semaines pour vraiment voir comment ça va.»

Douzième de la descente, Jan Hudec a sorti un autre lapin de son chapeau au super-G. Le skieur de Calgary a pris le quatrième rang en dépit de son dossard 44. Seule une erreur avant le dernier plat l'a privé d'un podium.

«J'ai tout de suite compris qu'il me fallait annuler ma danse de la victoire», a plaisanté l'homme aux sept opérations aux genoux, qui n'a pratiquement pas skié de l'été pour soigner son dos endolori.

Pour Hudec, athlète très populaire et accessible, il s'agissait de la façon parfaite de remercier les gens l'ayant aidé à amasser 15 000 $ pour financer sa saison lors d'une soirée-bénéfice lundi dernier.