Peur de Zika, mon oeil ! La décision des meilleurs golfeurs mondiaux de snober le retour de leur sport aux JO répond à d'autres raisons que le virus, pas très glorieuses, de la crainte du dopage au manque d'argent en jeu, selon des représentants du golf brésilien.

Le top 4 du classement mondial a renoncé au tournoi de Rio (11-14 août), dans l'ordre l'Australien Jason Day, les Américains Dustin Johnson et Jordan Spieth et le Nord-Irlandais Rory McIlroy.

D'autres joueurs de renom ont renoncé, comme l'Australien Adam Scott, les Sud-Africains Louis Oosthuizen et Charl Schwartel, le Fidjien Vijay Singh, et le Japonais Hideki Matsuyama, ainsi que le N.1 français, Victor Dubuisson, qui se dit en méforme.

La plupart ont invoqué la crainte du virus Zika, transmis par un moustique, qui peut être responsable de fièvre, de douleurs articulaires et dans certains cas beaucoup plus rares de problèmes neurologiques et, pour les femmes enceintes, de malformation grave du foetus.

Mais l'Organisation mondiale de la santé (OMS) et les autorités brésiliennes assurent que le risque d'être infecté par le moustique Aedes aegypti pendant l'hiver austral de Rio, marqué par la sécheresse, est depuis des mois en chute libre et sera proche de zéro à la mi-août.

Christophe Dubi, responsable des JO au sein du Comité international olympique (CIO), a d'ailleurs plusieurs fois taquiné la petite balle blanche ces derniers mois à Japeri, dans le nord de Rio.

Adilson da Silva, unique Brésilien qualifié pour le tournoi masculin, 278e joueur mondial, « comprend » les inquiétudes de ses confrères. Mais « représenter son pays est quelque chose de très spécial, et c'est dommage que certains ne le pensent pas », explique-t-il à l'AFP.

« Je ne peux pas mentir et dire que je ne suis pas du tout préoccupé, mais je n'ai pas peur, je vais prendre mes précautions et rester concentré sur mon jeu, pas sur le moustique », ajoute-t-il.

« Peur des tests antidopage »

L'excuse Zika, « franchement, c'est une connerie ! », lâche Helcio Figueiredo, un amateur rencontré au club carioca de Gavea, en des termes moins diplomatiques. « On emmène des enfants ici, les autorités ont pris des mesures. Zika, c'est un truc du passé ».

« Zika est un petit pourcentage dans leur décision, et a servi un peu d'excuse : les facteurs financiers et le calendrier, les bénéfices en cas de victoire, voilà ce qui a motivé leur décision », assure le directeur sportif de ce club, Abilio Junior.

« Ils gagnent énormément d'argent, alors qu'aux JO, c'est zéro, c'est pour une médaille », renchérit Eudes d'Orléans-Bragance, ancien président de la Confédération brésilienne de golf (CBG), de 1995 à 1998.

Motif financier, mais aussi paramédical, la longue liste des produits interdits par le CIO contenant de nombreux médicaments, selon ce descendant du dernier empereur du Brésil, Pierre II (XIXe siècle).

Sa fille Maria Francisca enfonce le clou. « Je pense qu'en réalité la peur d'être pris aux tests antidopage est bien plus grande que celle de Zika », estime la capitaine de l'équipe féminine du golf de Gavea.

Réintégré après 112 ans d'absence, le golf aurait-il déjà raté son rendez-vous olympique, sur le parcours de Barra da Tijuca contruit pour l'occasion, en bord de mer?

Rory McIlroy, le N.4 mondial, l'avait à mi-mots reconnu, en évoquant le manque de prestige des JO dans sa discipline : « La plupart des autres sportifs rêvent toute leur vie de gagner un titre olympique, on rêve, nous, du «Claret Jug» ou du blazer vert », en référence au trophée du British Open et à la veste récompensant le vainqueur du Masters d'Augusta.

« Tournoi au rabais »

L'absence des principales figures est un coup porté au tournoi, mais pas mortel. « Naturellement, ce sera un tournoi au rabais, mais pour Rio et l'avenir du golf au Brésil, c'est fantastique », juge Eudes d'Orléans-Bragance.

« Ce sera un grand tournoi », assure Abilio Junior. « Il aurait été bien meilleur si tout le monde était là, mais on va voir de nouveaux joueurs, de nouveaux pays qu'on ne considère pas comme traditionnels ».

Adilson da Silva, lui, croit « tout à fait » en ses chances, en s'attendant à une compétition « un peu moins intense », mais au niveau « tout de même très élevé ».

Et le moustique pourrait en fait se faire voler la vedette par... le caïman, présent sur le parcours olympique de Rio.

Ce dont s'amuse Adilson : « Je joue en Afrique et de temps en temps je vois des lions, des léopards, des hippopotames, j'imagine qu'un caïman ne doit pas être bien différent ! »