La Ligue nationale de hockey n'a toujours pas confirmé l'annulation de matchs de son calendrier régulier, mais les diffuseurs, eux, commencent peu à peu à se préparer au pire.

Le pire, évidemment, serait l'annulation complète du calendrier régulier, un scénario qui était devenu réalité lors du lock-out précédent, celui de 2004-2005. Pour le moment, les diffuseurs préparent des plans B dans le cas d'un mois d'octobre qui pourrait être chamboulé par ce conflit de travail, qui a éclaté le 15 septembre.

«La bonne nouvelle, c'est que nous sommes déjà passés par là, affirme Gerry Frappier, président et directeur général de RDS. Le lock-out, on y a déjà survécu en 2004-2005, et on s'en est sorti. On se trouve relativement chanceux, parce qu'on mise sur beaucoup d'autres bonnes propriétés. Mais il est clair qu'on ne peut pas remplacer le Canadien, c'est impossible. Le Canadien, c'est au minimum trois matchs par semaine. La NBA, avec tout le respect que j'ai pour cette ligue, ses cotes d'écoute ici ne sont pas celles des matchs du Canadien.»

Chez RDS, tout est en place pour un début de saison un brin différent si jamais les bonzes de la LNH et leurs joueurs se chicanent trop longtemps. En substance: couverture plus importante des matchs du baseball majeur, plus de football («il y a maintenant de la NFL le jeudi soir», rappelle Gerry Frappier), et peut-être aussi des rencontres de hockey junior ou de la Ligue américaine.

«On pense à d'autres ligues de hockey, mais on va voir, c'est aussi une question de droits, précise le patron de RDS. On peut également fouiller dans nos archives et présenter des matchs d'autrefois. C'est sûr qu'il va falloir se servir de notre imagination; on ne sait pas si le lock-out va durer une semaine, un mois ou un an. Il faut réagir vite. La perte du hockey, c'est un immense vide à combler. Mais avec le NASCAR, la F1, le golf et le Super Bowl, on a une grille riche et diversifiée.»

Un lock-out qui a rapporté!

Ça peut paraître étonnant, mais les diffuseurs canadiens n'ont pas trop souffert du lock-out de 2004-2005. Dans certains cas, ils ont même profité de la fermeture des arénas de la LNH pour doubler leurs profits!

Ce n'est pas une blague. Selon les données du CRTC, les profits avant intérêts et impôts du côté de RDS sont passés de 11,7 millions en 2003-2004 à 21,9 millions la saison du lock-out. Détail important: les profits de la station québécoise ont chuté la saison suivante, celle du retour des joueurs sur la glace, tombant à 18,4 millions. Les revenus de publicité de RDS ont diminué de 14,8 millions en 2004-2005, mais les coûts de production ont chuté de 18,5 millions.

Le réseau TSN, lui, a enregistré des profits avant impôts et intérêts de 72,1 millions en 2004-2005. La saison précédente, avec du hockey, TSN avait dû se «contenter» de 35,4 millions...

Gerry Frappier sait fort bien que les réseaux encaissent des pertes lorsqu'ils diffusent des matchs de hockey. «Pendant un lock-out, on n'a pas à payer des droits à la LNH, et on n'a pas non plus les frais de production qui vont avec, rappelle-t-il. Alors, pourquoi on choisit quand même de diffuser des matchs de hockey? On le fait pour les revenus d'abonnements.»

À CBC, le hockey prend beaucoup d'importance, surtout que la LNH permet à la station d'aller récolter des revenus publicitaires très importants. Que faire, donc, en cas de lock-out? «Il y a un plan d'urgence en place, et nous allons en dévoiler les détails si la ligue annule des matchs de saison régulière», répond Chuck Thompson, porte-parole de la CBC, qui rappelle que le premier match que doit offrir le réseau n'est prévu que pour dans trois semaines.

En cas de conflit long et douloureux, TSN prévoit bonifier son offre avec du basket des Raptors de Toronto, du football canadien et américain, et des courses de NASCAR, entre autres.

«On a essayé de mettre à l'horaire des matchs de hockey des ligues d'Europe la dernière fois, raconte Paul Graham, vice-président et producteur exécutif des événements retransmis en direct. Mais à voir les cotes d'écoute, je ne suis pas certain de l'intérêt des Canadiens pour ces matchs. Les gens veulent voir Rick Nash dans un chandail des Rangers de New York et Joe Thornton dans un chandail des Sharks de San Jose. Ils ne veulent pas nécessairement les voir dans un chandail du club de Davos.»

Avec Vincent Brousseau-Pouliot