Le Canadien est en crise, disons-le. En bon gestionnaire cartésien, Marc Bergevin doit agir plus froidement que certains partisans indignés ne le souhaiteraient.

L’équipe vient de perdre cinq matchs de suite. Les deux derniers revers ne sont pas jolis, évidemment. 

Mais l’équipe a déjà vécu de telles léthargies, il y a presque un an jour pour jour, d’ailleurs, et le CH occupe toujours le troisième rang de sa division avec une fiche de 11-8-5. 

Évidemment, Tampa Bay et Toronto ont recommencé à gagner et menacent la fragile avance du Canadien. Le club doit se replacer rapidement. 

PHOTO RYAN REMIORZ, LA PRESSE CANADIENNE

Le Canadien a subi une raclée de 8-1 contre les Bruins de Boston, mardi soir.

Avant de congédier ses entraîneurs ou d’échanger les vedettes de son équipe, le thème à la mode depuis quelques jours, un directeur général procède généralement par étapes. 

Si les meetings de groupe entre les entraîneurs ne donnent pas de résultats concrets sur la glace, le DG commence d’abord par procéder à des rappels des mineures. L’arrivée de quelques nouvelles têtes peut contribuer à changer un peu la dynamique. 

Or, l’attaque du Canadien ne pose pas problème et le Rocket de Laval marque au compte-gouttes. Ryan Poehling pourrait être un candidat, mais ses performances, autant lors de son rappel à Montréal que dans ses matchs à Laval, suggèrent un plus long stage dans la Ligue américaine. En défense, on ne trouvera sans doute pas un arrière gaucher supérieur à Brett Kulak ou Mike Reilly à l’heure actuelle. 

Le meilleur joueur du Rocket cet automne porte des jambières et il a 20 ans. Cayden Primeau montre une fiche de 7-2-1, une moyenne de 2,08 et un taux d’arrêts de ,926. 

Primeau vient au quatrième rang de la Ligue américaine pour la moyenne de buts alloués et au huitième rang pour le taux d’arrêts, à des poussières du troisième rang. 

Il éclipse évidemment son partenaire de 25 ans Charlie Lindgren, 4-5-2, moyenne de 2,77 et taux d’arrêts de ,890. 

Le Canadien a des problèmes devant le filet à l’heure actuelle. Carey Price a été surutilisé depuis le début de la saison en raison des contre-performances de son auxiliaire Keith Kinkaid et il montre des signes d’essoufflement. Une pause de quelques matchs, ou un horaire moins chargé, est toujours bénéfique en pareilles circonstances. 

Parlez-en à Tuukka Rask l’automne dernier. Mais Rask a le luxe de compter sur Jaroslav Halak. Tenter de chasser une léthargie en envoyant Kinkaid et sa ronflante moyenne de 4,29 dans deux des trois prochains matchs d’ici dimanche relève presque du suicide. 

PHOTO OLIVIER JEAN, LA PRESSE

Keith Kinkaid affiche une ronflante moyenne de 4,29 cette saison.

Pourquoi alors ne pas utiliser le rappel du jeune Primeau comme un électrochoc et lui donner quelques matchs? Je vois déjà certains lecteurs incrédules. 

Le plan idéal pour un jeune gardien comme Primeau consisterait à le laisser mûrir tranquillement dans la Ligue américaine pendant un an ou deux, loin de la pression de Montréal. 

Mais la LNH nous a offert ces dernières années des exemples positifs de gardiens de 20 ans rappelés après une courte expérience dans la Ligue américaine. 

Andrei Vasilevskiy avait cet âge lors de son rappel à Tampa, le 16 décembre 2014, après seulement 25 matchs avec le Crunch de Syracuse. Il a disputé à peine 16 matchs avec le Lightning cet hiver-là, et seulement 24 l’année suivante, derrière le numéro un Ben Bishop. 

PHOTO CHRIS O'MEARA, ASSOCIATED PRESS

Andrei Vasilevskiy

Son fardeau de travail est passé à 50 matchs à sa troisième saison dans la Ligue nationale seulement. Le Lightning était prêt à larguer Bishop. Vasilevskiy est devenu depuis l’un, sinon le meilleur gardien de la ligue. Son utilisation limitée à ses deux premières années ne l’a pas empêché de grandir. 

À Philadelphie, l’an dernier, Carter Hart a obtenu sa chance un peu par défaut, en raison du nombre de gardiens blessés chez les Flyers. Il présentait de mauvaises statistiques dans la Ligue américaine à ses 18 premiers matchs chez les pros avec une moyenne de 3,05 et un taux d’arrêts de ,902, mais il avait été fumant dans les semaines précédant son rappel. 

PHOTO ERIC HARTLINE, USA TODAY SPORTS

Carter Hart

Hart est devenu depuis le numéro un de l’équipe. Il a disputé 31 matchs l’an dernier et a joué dans 16 des 24 matchs des Flyers cette saison. 

On ne demanderait pas à Primeau de sauver le Canadien. Seulement de tenir le fort momentanément, le temps de voir Price se replacer, et donner des chances à l’équipe de gagner lorsqu’on fait appel à lui. À l’heure actuelle, Keith Kinkaid est incapable de le faire. 

La décision serait audacieuse. Mais coûteuse? Pas vraiment. Pas de cran, pas de gloire, dit l’adage…

À lire

J'ai toujours admiré Jacques Dussault, non seulement pour ses talents d'entraîneur, mais aussi pour son extraordinaire humilité. Cet homme m'a toujours fasciné. Miguel Bujold l'a interviewé à l'occasion du lancement d'une biographie sur sa vie écrite par Steve Vallières. Bien hâte de lire ça!