Marc Bergevin a dit une chose importante hier lors de son bilan de mi-saison, avant le match contre le Wild au Centre Bell: malgré les succès inattendus de l'équipe, pas question de déroger à son plan de rajeunissement pour améliorer l'équipe à court terme.

«Je garde une oreille attentive, mais le but reste de bâtir l'équipe pour l'avenir. Je ne crois pas que nous serons du camp des acheteurs. Je sais ce qui s'en vient, avec le Championnat mondial junior, ce qu'ils nous demanderont, mais je n'échangerai pas ces jeunes. La conversation sera courte.»

Le DG du Canadien n'entend pas non plus céder de choix de première ronde pour du renfort à court terme. «Ça n'arrivera pas. Si jamais l'échange est favorable à court et long terme, je le ferai, mais je ne céderai pas d'actifs pour des solutions à court terme. J'entends des noms (de joueurs disponibles). Ils coûteraient un choix de première ronde et ils ne feraient pas de différence entre se tailler une place en séries de peu et gagner la Coupe.»

Les paroles de Bergevin sont pleines de sagesse. Et sont fidèles à sa philosophie mise en place dès son arrivée en 2012. Le DG du Canadien a toujours su garder ses choix de première ronde.

En 2014, il a su patienter au bon moment pour obtenir Thomas Vanek, le joueur le plus convoité sur le marché. Il a finalement cédé aux Islanders un choix de deuxième ronde (57e au total), et Sebastian Collberg, un espoir qui n'a jamais percé. Vanek a rendu de bons services au CH en fin de saison et en séries.

Un an plus tard, il obtenait Jeff Petry des Oilers pour des choix de deuxième (57e au total) et quatrième rondes. Petry a ensuite renoncé à l'autonomie et signé un contrat à long terme à Montréal. Malgré ses gaffes occasionnelles, comme celle d'hier, il demeure un précieux atout pour le Canadien.

Au 57e rang, les chances de repêcher un attaquant top 6 ou un défenseur du top 4 sont de l'ordre de 6,7%. Les choix de fin de deuxième ronde ont beaucoup moins de valeur que ceux de début de deuxième, dont le taux de succès varie entre 11% et 13%, selon l'étude de Scott Cullen, de TSN.

Il faut aussi le reconnaître, Bergevin ne s'est jamais débarrassé d'espoirs qui ont émergé ailleurs. Danny Kristo, Louis Leblanc, Gabriel Dumont, Jarred Tinordi, Greg Pateryn, Jiri Sekac, Nathan Beaulieu, Collberg, Nikita Scherbak et même Sven Andrighetto, malgré des débuts prometteurs avec l'Avalanche, ont tous quitté l'organisation sans jamais revenir le hanter.

Avec le recul, peut-être aurait-il souhaité être un peu plus patient avec le défenseur Darren Dietz, 25 ans, qui n'avait pas mal fait lors de son court essai à Montréal, et qui est devenu une sensation dans la KHL cette saison avec 43 points en 44 matchs. Mais Dietz a changé deux fois d'organisation après son départ de Montréal et, en outre, on ne sait pas comment il produira à son retour dans la LNH, s'il y revient.

Céder deux choix de deuxième ronde aux Blackhawks pour Andrew Shaw, un joueur utile, mais usé, n'était peut-être pas l'idée du siècle non plus, même si Shaw connaissait de bons moments récemment et que Bergevin venait de récupérer deux choix de deuxième pour Lars Eller

La sagesse de Bergevin a été mise à l'épreuve l'été dernier, mais il a résisté. Les Sabres exigeaient Ryan Poehling ou le troisième choix au total pour Ryan O'Reilly, selon The Athletic. O'Reilly aurait comblé un besoin immédiat au centre. Mais même si son travail était alors sévèrement critiqué, Bergevin a refusé l'offre. Il peut s'en féliciter aujourd'hui.

Quand Bergevin évoque un échange pour des solutions à court et moyen terme, on songe à Mikhail Sergachev, huitième choix au total en 2016, cédé au Lightning pour obtenir Jonathan Drouin, 23 ans, ou Max Domi, 23 ans lui aussi, obtenu pour Alex Galchenyuk.

Bergevin semble mieux branché que son prédécesseur Bob Gainey sur le directeur du recrutement de l'équipe, Trevor Timmins.

Quand Ryan McDonagh, le premier choix de l'équipe en 2007, a été cédé aux Rangers dans l'immense transaction pour acquérir Scott Gomez, Timmins dit n'avoir jamais été consulté. S'il l'avait été, il y a fort à parier qu'il aurait tout fait pour dissuader Gainey de sacrifier McDonagh. D'autant plus que les Rangers, à l'époque, cherchaient d'abord à se débarrasser du lourd contrat de Gomez, dont il restait 33,5 millions à payer et qui obstruait 7,3 millions sur la masse salariale pour encore cinq ans.

Un an plus tard, Gainey cédait un choix de première ronde en 2008 et un choix de deuxième ronde en 2009 pour obtenir Alex Tanguay (et un choix de cinquième ronde en 2008), dont il s'est débarrassé après une seule saison.

Timmins l'a trouvée moins drôle en constatant par la suite qu'au moment où il aurait choisi, au 25e rang, le dixième joueur sur sa liste, le défenseur John Carlson, était encore disponible, selon ses dires.

Marc Bergevin a beau jeu en ce moment. Son équipe est en avance sur le plan de réinitialisation, séries éliminatoires ou pas ce printemps. La banque d'espoirs est bien garnie.

En outre, le Canadien a des choix dans les sept rondes en 2019, avec des choix supplémentaires en deuxième, quatrième et cinquième rondes.

Il pourrait être tenté de céder un espoir un peu moins en vue, ou un choix de fin de deuxième ronde (par exemple celui obtenu des Golden Knights, qui appartenait originellement aux Blue Jackets de Columbus) s'il déniche un joueur capable d'aider l'équipe à court et moyen terme.

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