À un certain moment, même les sceptiques les plus indécrottables finissent par décrocher.

Jonathan Marchessault ne craquera pas. Après avoir marqué 30 buts avec les Panthers de la Floride et amassé 75 points en 77 matchs en saison régulière avec les Golden Knights de Las Vegas, ses deux buts contre les Jets de Winnipeg, lundi, ont porté son total de points en séries à 15 en seulement 12 matchs.

Ce Québécois de 27 ans ne joue pas avec Connor McDavid ou Sidney Crosby, mais avec William Karlsson et Reilly Smith, deux joueurs rejetés par leurs équipes respectives eux aussi.

Marchessault prouve que la ligne est ténue entre une carrière dans la Ligue américaine et le statut de superstar, assorti d'un contrat de 30 millions pour six ans. Parlez-en à Martin St-Louis, par exemple.

On dédaigne de moins en moins les joueurs de 5 pieds 9 et moins, mais il leur faut néanmoins une part de chance et un homme pour croire en eux. Les équipes de la LNH ne repêchent pas les choix de 12e ronde dans la Ligue de hockey junior majeur du Québec. Marchessault a été ignoré au repêchage, même après une saison de 53 points en 62 matchs avec les Remparts de Québec. Et aussi l'année suivante malgré une année de 71 points et 30 buts avec ces mêmes Remparts.

On daigne les inviter au camp d'entraînement, comme les Rangers l'ont fait, et lui offrir un contrat qui le payera à un salaire des ligues mineures, mais les jeux sont faits dès le camp des recrues. Il n'est pas placé dans une position favorable et on mise sur ses propres choix au repêchage, comme Ryan Bourque, par exemple, son coéquipier avec les Remparts repêché en troisième ronde par les Rangers en 2009.

On le rejette rapidement après une première année professionnelle pourtant remplie de succès, 64 points en 74 matchs. Les Blue Jackets le recueillent mais le même manège se répète. On ne lui offre pas de véritable chance, il est encore étiqueté «joueur des mineures». Il produit encore à un rythme intéressant au sein du club-école des Jackets mais il est échangé au Lightning pour d'autres joueurs de calibre mineur, dans une transaction qui ne fait évidemment pas les manchettes.

Même à Tampa, où Julien Brisebois est sensible à la fibre québécoise, on ne le retient pas après deux ans. Il aura fallu un homme, Tom Rowe, dont la carrière de gestionnaire sera de courte durée, pour finalement lui offrir un contrat garanti chez les Panthers de Floride. Et ensuite une blessure à Jonathan Huberdeau pour que s'ouvre un poste au sein d'un trio offensif sous l'autorité de Gerard Gallant.

Une saison de 30 buts dans la LNH ne suffisait pas. Quand Rowe a été congédié, Dale Tallon, de retour après avoir été dégommé par ce même Rowe un an plus tôt, n'a rien fait pour retenir Marchessault. Il n'y «croyait pas». Marchessault avait encore à ses yeux la marque d'un petit attaquant des mineures et sa magnifique saison relevait de l'anomalie. On l'a rendu disponible au repêchage de l'élargissement des cadres.

Heureusement pour Marchessault, Gallant était désormais coach chez les Golden Knights et l'a accuelli à bras ouverts.

J'espère qu'aucun gestionnaire ne pleurera le fait de l'avoir «échappé». Il faut de la vision. Et les Golden Knights en ont, justement. Leur conte de fée ne se poursuit pas par hasard.