J'ai eu le bonheur, il y a quelques années, de passer des moments privilégiés en tête à tête avec Richard Garneau à l'occasion d'interviews réalisées pour mon ouvrage "Paroles d'hommes" avec Denys Arcand, Pierre Foglia, Guy A. Lepage, Emmett John Pops et Richard.

Sa passion, son côté positif, sa curiosité, mais aussi un brin de candeur et beaucoup de sensibilité me rejoignaient beaucoup.

J'ai encore peine à croire ce matin qu'il n'est plus de ce monde. Le type d'homme qu'on croit presque immortel.

Voici quelques extraits du livres que j'aimerais partager avec vous.

-Qu'a-t-on de plus important à réaliser ici, sur terre?

-Je crois que ce qu'il y a de plus important à réaliser ici, c'est l'amour. C'est vraiment le plus important et ce n'est pas facile du tout. Il faut dire que je fais un métier... Je suis dans le domaine des communications depuis 48 ans. Tu es tellement occupé, tellement pris par ta carrière, par tes ambitions et tout le reste, que tu négliges beaucoup. Je crois que j'ai beaucoup de remords de ce côté-là. J'ai raté bien des rendez-vous dans ma vie. Des rendez-vous importants (...) Je me rends compte aujourd'hui qu'il devrait y avoir un équilibre entre tout ça. Et c'est un équilibre que je n'ai malheureusement pas réussi à tenir. Je consacrais tout à ma carrière, au détriment de ma famille.

-La mort te fait-elle peur?

-Je n'y pense pas. Je pense qu'on ne songe pas à la mort tant qu'on se sent bien (...) Et s'il m'arrive d'y penser, j'élimine ça tout de suite; je dresse un mur devant ça. C'est une des faculté que j'ai: ériger des murs...

-Est-ce que tu te sens immortel?

-Ah! Non, pas du tout! C'est vrai que j'ai la santé en ce moment, mais je me rends compte que plus on avance en âge, plus on devient fragile. Je n'y pense pas trop souvent parce que, quand on y pense, ça devient déprimant. Je me suis toujours lancé des défis, j'ai toujours des buts, des projets, je continue à travailler (...) C'est sûr qu'il y a une échéance. Je pense à des gens qui étaient dans une forme remarquable, comme René Lecavalier qui a été mon collègue et mon modèle pendant des années, un gars qui n'avait jamais fait d'abus de sa vie et qu'on croyait immortel; pourtant, à 81 ans... Je continuais à le voir et il devenait de plus en plus fragile. Alors je me dis que j'ai 71 ans et qu'il m'en reste peut-être dix... On y pense, on se le dit, mais moi, je l'oublie vite.

Ce qui me console, c'est que Richard Garneau aura continuer à assouvir ses passions et à courir jusqu'à la toute fin, ou presque. Mes sympathies à la famille.