Ainsi donc, les recruteurs ne voient pas dans tous les choix de première ronde d'éventuels joueurs d'impact.

Je l'ai constaté avec stupéfaction hier en discutant avec deux dépisteurs d'équipes de la LNH à propos des deux récentes acquisitions du Canadien, Stefan Matteau et Phillip Danault.

Danault avait été classé en première ronde par les deux recruteurs même si on savait que son potentiel lui permettrait au mieux de devenir un joueur de troisième trio. L'un des deux recruteurs voyait en Matteau un ailier de quatrième, peut-être de troisième trio...

Pourquoi repêcher de tels joueurs en première ronde en sachant pertinemment qu'ils n'auront pas le talent pour jouer au sein d'un trio offensif ?

« Après les quinze premiers joueurs repêchés, ça devient une longue deuxième ronde, explique le premier recruteur. Certains gars, comme Matteau ou Danault, tombent dans la catégorie de joueurs « sûrs », qui atteindront la LNH et donneront de la profondeur à un club. »

Le second recruteur interrogé abonde dans le même sens.

« Sur 30 jeunes choisis en première ronde, environ 21 atteindront la LNH, mais seulement huit ou neuf deviendront des joueurs pour tes deux premiers trios ou ton top quatre en défense. Les gars peuvent dire ce qu'ils veulent, mais on a beaucoup de joueurs de troisième trio dans la première ronde. Une fois que tu as passé les cinq, six, sept ou huit premiers, c'est très difficile à prédire... »

Cette stratégie m'étonne. Pourquoi ne pas choisir ce type de joueurs dans les rondes plus tardives et tenter des coups de circuit en première ronde?

La stratégie a payé pour les Capitals de Washington avec Evgeni Kuznetsov, choisi au 26e rang en 2010. De nombreux clubs craignaient qu'il ne reste en Russie et l'ont boudé. Le Canadien avait opté pour un joueur qu'il qualifiait de plus "sûr" au 22e rang, Jarred Tinordi.

Trois ans plus tôt, en 2007, le risque avait joué en faveur du CH avec P.K. Subban, classé en première ronde par le Canadien, mais boudé les autres clubs en première ronde parce qu'il était un défenseur à risque.

On le trouvait petit, Johnny Gaudreau, même s'il dominait dans la USHL. On a choisi 103 joueurs avant lui. En première ronde, des colosses comme Ducan Siemens, Tyler Biggs, Zack Phillips. C'est aussi l'année où Chicago a repêché Danault en première ronde.

Vous en voulez d'autres? En 2005, des géants comme Joe Finley, Matt Pelech et Vladimir Mihalik en fin de première, mais Kris Letang en troisième ronde seulement parce qu'il n'était pas un défenseur très costaud.

Le meilleur exemple d'entre tous? En 2003, Anaheim a "risqué" avec Ryan Getzlaf au 19e rang. On le disait paresseux. Les Ducks ont récidivé avec Corey Perry au 28e rang. On le disait trop lent. Eric Fehr, Mark Stuart et Brian Boyle étaient des choix... plus "sûrs".