Cette histoire est incroyable.

Boudé au repêchage, autant dans la LHJMQ que dans la LNH, Frédérick Gaudreau a marqué hier un troisième but en finale de la Coupe Stanley.

Il m'apparait à propos ce matin de rappeler son histoire et l'interview qu'il m'avait accordée il y a quelques mois:

MATHIAS BRUNET

Frédérick Gaudreau ignore si l'orthopédiste Bernard LaRue, à Sherbrooke, a suivi son improbable parcours, s'il sait pour ses huit matchs disputés récemment avec les Predators de Nashville.

Leurs destins se sont croisés par hasard il y a sept ans. Gaudreau avait été transporté d'urgence à l'hôpital en ambulance, son uniforme des Cantonniers de Magog encore sur le dos, avec une fracture ouverte à un poignet.

Les deux os de l'avant-bras du jeune homme de 16 ans étaient complètement sectionnés et le membre ne tenait plus que par la chair. Le docteur LaRue a été appelé d'urgence pour l'opérer sur-le-champ.

« Il ne m'a pas dit que ma carrière était terminée, mais je voyais son scepticisme en raison de la gravité de la blessure, a raconté hier ce jeune homme de 23 ans. Il ne voulait pas me décourager, mais j'ai compris que ça n'était pas une blessure évidente et qu'il y avait des probabilités que ça ne fonctionne pas. »

Sept mois plus tard, à force d'un travail acharné en gymnase, le garçon originaire de Bromont était prêt à revenir au jeu pour sa deuxième saison avec les Cantonniers, au niveau midget AAA.

« Quand il m'a revu six mois plus tard, j'arrivais à faire autant de push-ups qu'il me demandait d'en faire, relate le sympathique jeune homme. Je pense qu'il avait de la difficulté à en croire ses yeux, mais il était heureux pour moi. Il a fait une bonne job avec le poignet. Il a été bon pour moi. »

La blessure a fait dégringoler sa valeur. Il a été ignoré au repêchage de la Ligue de hockey junior majeur du Québec. Mais après sa deuxième saison dans le midget AAA, il a reçu quatre invitations pour des camps, dont celle des Cataractes de Shawinigan. Il obtient un poste, mais n'amasse que 20 modestes points, dont 5 buts, en 65 matchs.

Gaudreau sera évidemment ignoré au repêchage de la LNH cette année-là et les suivantes. À 19 ans, d'ailleurs, il obtient seulement 43 points en 68 matchs à Shawinigan, avec une fiche de - 33 au sein d'un club en profonde reconstruction.

Mais sa polyvalence a été reconnue et en juin 2014, son agent Christian Daigle lui obtient un contrat de la Ligue américaine à Milwaukee, avec le club-école des Predators. Il passe par la Ligue de la Côte Est, mais réussit à s'accrocher et, dès l'année suivante, soit l'hiver dernier, joue avec un aplomb qui lui vaut une invitation au match des Étoiles de la Ligue américaine.

Son début de saison dans la Ligue américaine cette année lui a permis d'être rappelé dans la Ligue nationale pour deux semaines. Il a obtenu un point en huit matchs, avant d'être renvoyé dans la Ligue américaine dimanche.

« Mon renvoi ne m'a pas démoralisé. Je suis juste heureux d'avoir joué ces huit matchs, d'avoir vécu une telle expérience. »

« Je ne suis pas un gars de nature négative. Je suis encore plus motivé pour la suite. L'objectif est de devenir le meilleur joueur de hockey possible. Et au cours de ces deux semaines-là, j'ai beaucoup appris, que ça soit hors glace ou sur la glace. C'est du bon matériel dans mon bagage. Je crois avoir bien joué. Les points ne sont peut-être pas là, mais c'étaient mes derniers matchs et au-delà des points, il faut regarder les performances dans l'ensemble. »

Gaudreau dit n'avoir jamais sombré dans le découragement. « J'ai vécu une période difficile avec cette blessure dure à subir, et aussi à voir pour les gens qui étaient sur place, mais j'ai toujours cru en mon rêve. Je l'ai toujours eu au fond de moi. J'ai continué à écouter ma voix.

« Je n'étais peut-être pas aussi outillé dans le temps pour savoir que ça se remonte, une telle épreuve, j'avais la crainte de ne plus jamais jouer, mais je ne voulais pas abandonner. Ma petite voix me disait que je réussirais. C'est ce que je voulais plus que tout. Si tu abandonnes, tu donnes raison à tout le monde. Il faut continuer à y croire, peu importe les épreuves sur notre chemin. »

Gaudreau aimerait revoir le Dr LaRue et, qui sait, l'inviter à un match. « Je suis curieux de savoir s'il ferait le lien avec le garçon de 16 ans qu'il a opéré. J'aimerais le retrouver pour lui dire ce que je suis devenu. Il serait vraiment content, ça, c'est certain. »

NOTES: Pauvre Peter Laviolette. Il n'a toujours pas compris que P.K. Subban était un défenseur numéro trois ou quatre. Subban a été le joueur le plus utilisé des deux équipes lors des deux derniers matchs. Quelqu'un peut-il rappeler à Laviolette qu'à Montréal, où l'on connait vraiment son hockey, certains spécialistes ne feraient pas jouer autant un défenseur de soutien? (pour les quelques lecteurs qui me liraient au premier degré, j'ironise, bien évidemment...)