Mary Spencer avait obtenu sa qualification olympique aux dépens de la boxeuse Ariane Fortin. Mais après la déconfiture qu'a connue l'Ontarienne hier à Londres, le jugement s'est fait sévère au Québec.

Trois fois championne du monde, Spencer était favorite contre la Chinoise Li Jinzi. Mais après quatre rounds de deux minutes, les juges ont donné la victoire à Li sur la marque de 17-14. La boxeuse de Windsor a été éliminée des Jeux, qui présentaient pour la première fois l'épreuve de boxe féminine.

«Je n'ai pas d'excuse, ç'a été un combat juste, a-t-elle indiqué à l'issue d'un duel où elle a paru sans lustre. La Chinoise a fait un combat phénoménal et elle mérite toutes mes félicitations.»

Tout de suite après le combat, l'entraîneur Stéphan Larouche, qui est proche de l'entourage de Fortin, a envoyé un message lourd de sens sur Twitter: «Le Québec s'ennuie d'Ariane Fortin.»

«Personne ne se réjouit de cette défaite. Mais c'est une performance décevante, a commenté Larouche. Elle a semblé manquer de jus. Et je ne comprends pas pourquoi elle s'est collée sur la Chinoise au lieu d'utiliser sa portée. Sa stratégie n'était pas bonne.»

«Au fil des années, Ariane a toujours été une compétitrice fiable, et aux Jeux olympiques, t'as besoin de fiabilité», estime Larouche.

Fortin, elle-même deux fois championne du monde, a regardé le combat d'hier et n'a pas été impressionnée. «Je ressens un mélange de plein de choses. Mais je ne veux pas dire de mal de Mary, on se respecte, elle et moi», a-t-elle affirmé lorsque jointe par La Presse.

«Maintenant, c'est clair que sa performance est décevante. On peut aussi se poser des questions sur sa préparation. Elle n'avait pas l'air extra en forme. Est-ce qu'elle était bien préparée? demande Fortin. Parce qu'en forme, elle peut battre la Chinoise.»

Elle pense aussi que l'immense pression que Spencer avait sur les épaules a fini par lui nuire. «On l'a tellement encensée au Canada! Le Comité olympique la voyait déjà médaillée. Elle fait des pubs pour Cover Girl, ajoute-t-elle. C'est une grosse pression et ça peut influencer la performance.»

Fortin et Spencer ont été au coeur d'une rivalité intense dans les mois précédant les Jeux. Les deux se sont battues pour représenter le Canada dans la catégorie des poids moyens (75 kg). Spencer a assuré sa place en l'emportant contre Fortin sur décision des juges en janvier dernier au championnat canadien. «On s'est fait voler», avait alors dit sans détour l'entraîneur de la Québécoise, Mike Moffa.

Pas question de s'arrêter

Mary Spencer a d'ailleurs mentionné cette victoire sur Fortin dans les minutes qui ont suivi sa défaite. Selon elle, le fait d'avoir dû être à son sommet pour affronter la Québécoise l'a hypothéquée en vue de Londres.

«J'ai eu la victoire de ma vie en janvier. Et de revenir de ça et de me préparer pour les Jeux... Je savais que ça serait difficile, mais pas autant que ça», a commenté l'Ontarienne.

La pression n'a pas été un enjeu, assure Spencer. «Je n'avais pas l'intention de venir ici pour simplement essayer. Je suis venue ici pour gagner l'or, a-t-elle dit. Alors que des gens répètent que je suis capable d'aller chercher l'or, ce n'est pas de la pression. Ce n'est pas comme si je n'y croyais pas moi-même.»

En réponse à une question sur son avenir, Spencer, 27 ans, a fait allusion aux Jeux de Rio. «J'adore la boxe et je veux encore ma médaille d'or. Alors je vais continuer. La boxe est une partie importante de ma vie, je ne vais jamais l'abandonner.»

Si elle se qualifiait pour 2016, elle pourrait croiser Fortin sur son passage. La Québécoise a été encouragée par ce qu'elle a vu du tournoi olympique. Elle veut maintenant boxer sous les couleurs du Liban et «ne veut plus rien savoir» de Boxe Canada.

«Sérieux, je trouve que les filles ne boxent pas si bien que ça, a confié Fortin. Ça me motive pour la suite!»