On est loin de la Jamaïque ou des États-Unis, mais les dirigeants d'Athlétisme Canada ont poussé un soupir de soulagement collectif à l'issue de la finale du 100 mètres masculin, hier soir, à Calgary. Après tous les efforts consentis à la discipline, les résultats semblent enfin être au rendez-vous.

Un an après sa disqualification pour faux départ, l'Ontarien Justyn Warner a rétabli sa réputation comme meilleur sprinter au pays, s'imposant en 10,15 lors des essais olympiques. Ce temps lui a permis d'égaler son record personnel, mais surtout d'atteindre le standard A qui lui vaudra une place dans l'épreuve individuelle aux Jeux de Londres.

«Ça ne pouvait arriver à un meilleur moment!» a réagi le sprinter de 25 ans, vice-champion du monde junior en 2006.

Warner s'est fait souffler dans le cou par son frère cadet Ian, deuxième en 10,20 (vent légal de " 1,0 m/s), ce qui lance l'ère des «Warner Brothers» dans le sprint canadien. «Il s'en vient, a constaté Justyn au sujet de son frère de 20 ans. Il ne m'a encore jamais battu, mais ce jour n'est pas si loin.»

Oluseyi Smith a complété le podium en 10,22. Ont suivi, dans le même dixième, Akeem Haynes (10,25), Aaron Brown (10,26) et le vétéran Anson Henry (10,31), ce qui offre des options intéressantes à l'entraîneur du relais 4x100 m, Glenroy Gilbert. Il fera connaître ses choix pour Londres demain. «Cette course est très significative, a assuré Justyn Warner. On a été dans la cave trop longtemps.»

Deux Québécoises ont atteint la finale du 800 m, présentée aujourd'hui. Lemlem Bereket et Karine Belleau-Béliveau ont chacune pris le deuxième rang de leur vague demi-finale respective.

Plus tôt en après-midi, la lanceuse québécoise Julie Labonté a amorcé ses championnats avec un deuxième titre consécutif au disque, avec un record personnel de 54 m 02. Loin du standard A de 62 m, mais elle apprivoise encore cette discipline, avec un oeil sur les Jeux de Rio en 2016.

Labonté est à Calgary surtout pour le poids, où elle devrait se qualifier sans problème. Triple championne canadienne, la lanceuse de Sainte-Justine n'a qu'à finir parmi les trois premières pour assurer sa participation aux Jeux de Londres. Elle vise surtout l'amélioration de son propre record national de 18 m 31, réalisé l'an dernier. Elle s'en est approchée à deux reprises le mois dernier avec des jets de 18 m 19.

«Je me sens vraiment en forme et je sais que je suis capable de l'atteindre», a affirmé la jeune femme de 22 ans, 18e à ses premiers Mondiaux l'an dernier, à Daegu.

Afin de maximiser sa préparation pour Londres, la représentante de l'Université de l'Arizona a choisi de faire l'impasse sur la saison extérieure de la NCAA. «Je commençais à voir mon énergie dégringoler un peu», a-t-elle souligné. Son régime d'entraînement a aussi été complètement modifié. Dans le but d'améliorer son explosivité, elle pratique maintenant l'haltérophilie et a réduit les charges en salle de musculation. «C'est très effectif, je le vois dans mes performances.»

»Une montagne russe»

Déformation professionnelle oblige, Laurent Godbout s'est installé dans la salle de presse pour la durée des essais de Calgary. L'ancien réalisateur au contenu de Radio-Canada est directeur général de la Fédération québécoise d'athlétisme depuis septembre. La tâche est monumentale. «C'est une montagne russe et j'ai l'impression d'être sauté dans un train qui est en train de descendre», dit Godbout sans ambages.

Labonté et le spécialiste de steeple Alex Genest risquent d'être les deux seuls représentants québécois à Londres. Sur une équipe qui devrait frôler les 40 membres, c'est très peu. La situation était similaire quatre ans plus tôt à Pékin.

En plus de diffuser scrupuleusement les résultats de tous les athlètes - à suivre sur Twitter: @Athl_FQA - Godbout applique une «politique des petits pas», qui inclut prendre le pouls du milieu et assainir les finances de l'organisme, aux prises avec un déficit important.

Godbout est encouragé par les promesses de la prochaine génération. Il pense entre autres aux quatre athlètes sélectionnés pour le championnat NACAC de la semaine prochaine, au Mexique, qui réunira les meilleurs U23 de l'Amérique du Nord, d'Amérique centrale et des Caraïbes. Il s'agit de Charles Philibert-Thiboutot, septième du 1500 m hier, Gabriel El Hanbli, qualifié pour la finale du 400 m haies, Annie Leblanc, éliminée de justesse au 800 m, et la perchiste Mélanie Blouin. «Je me dis que le train peut juste remonter pour les Jeux olympiques de 2016», espère le directeur général.