Les Britanniques ont monté une machine infernale en vue du triathlon olympique de demain. Les frères Brownlee, champion et vice-champion du monde de la discipline, sont largement favoris pour l'emporter.

Tellement que la fédération internationale s'est chargée de leur rappeler qu'il était interdit de croiser le fil d'arrivée à deux, comme ils aiment le faire. Pour les médias anglais, l'affaire est dans le sac. Alistair et Jonathan Brownlee vont triompher. La question est de savoir comment...

«Les Britanniques ont fait de cette course un quasi échec et mat. Ils ont les deux meilleurs triathloniens du monde. Ils ont un soutien et des infrastructures incroyables, explique Simon Whitfield. Et là, je ne cherche pas d'excuses, je décris simplement la réalité.»

Whitfield a rencontré les médias hier devant une piscine publique du centre de Londres. Avant d'aller faire quelques longueurs pour se préparer à la course de demain, le porte-drapeau canadien a soupesé ses chances de succès. Des baskets aux pieds, vêtu d'un short, l'air décontracté comme toujours, toute sa personne tranchait avec le portrait quasi apocalyptique qu'il dresse de la situation.

«Bon, ils nous ont quasiment mis échec et mat, mais quasiment. Alors il faut se sortir de l'échec et mat et tous les gars dans cette course sont en train de chercher une façon de ne pas perdre la partie», a continué l'athlète, d'une voix calme et posée.

Médaillé d'or en 2000 et d'argent il y a quatre ans, Simon Whitfield a l'habitude des grands rendez-vous. Le triathlonien de 37 ans sera d'ailleurs le doyen de l'épreuve, demain.

Mais si un athlète peut réussir à causer la surprise, c'est bien lui. Sa victoire à Sydney, après une chute à vélo, est un exemple de maîtrise et de calme. Quand il a commencé à tomber derrière le peloton de tête à Pékin, la partie semblait perdue. Puis Whitfield a attaqué à la toute fin. D'où venait cette énergie? «Je me suis dit dans ma tête, en pensant aux gars devant, "si vous voulez me battre, vous allez souffrir".»

Et Whitfield semble imperméable au stress. À un journaliste qui lui demande si le rôle de porte-drapeau vient avec une pression supplémentaire, il répond en souriant: «Rien ne peut me mettre de pression. Je sais que je jouerai avec mes enfants le lendemain.»

Stratégie

Le triathlonien de Victoria sera entouré des Canadiens Kyle Jones et Brent McMahon. «Je ne pourrais pas être mieux préparé. Je ne cherche pas d'excuse, je vais tout donner, prévient Whitfield. À vaincre sans péril, on triomphe sans gloire. Je vais essayer d'asséner le coup de grâce. Je vais tout donner.»

Il sait qu'il doit sortir fort de la nage de 1,5 km, avant d'entamer les 43 km de vélo et de courir 10 km vers le fil d'arrivée. Les frères Brownlee vont selon lui tenter de verrouiller la course dès le départ.

«Il faudra une grosse nage. Les gars qui vont partir en échappée à vélo, il faut les suivre. J'ai une stratégie toute prête pour ça. La chasse sera ouverte. Les Brownlee vont essayer, avec les Russes, de prendre cette course dès le début. Et nous, on va essayer d'empêcher ça.»

On sent que Whitfield pourrait discuter de triathlon et de course pendant des heures. Mais en définitive, une vérité inéluctable ressort de cet entretien: le «vieux» ne peut garantir de podium. On sait seulement que ceux qui veulent le battre devront souffrir. Parole de Simon Whitfield.