(Tokyo) L’ancien président d’une société japonaise commanditaire des Jeux olympiques de Tokyo-2020 et deux collaborateurs ont écopé vendredi de peines de prison avec sursis, de premières condamnations par la justice nipponne dans le cadre d’une bourgeonnante affaire de corruption autour de l’évènement.

Le scandale a commencé à éclater l’été dernier au Japon, un an après les JO-2020 qui s’étaient finalement tenus en 2021 et presque entièrement à huis clos à cause de la pandémie.  

Plusieurs entreprises du pays ont été éclaboussées depuis et l’affaire a même compromis la candidature de Sapporo (nord du Japon) pour les JO d’hiver de 2030.

L’ancien président d’Aoki Holdings, Hironori Aoki, 84 ans, a été condamné vendredi à 30 mois de prison avec sursis, a déclaré à l’AFP un porte-parole du tribunal de première instance de Tokyo.

Il a été jugé coupable d’avoir versé des pots-de-vin pour assurer à son entreprise, une chaîne japonaise de magasins de costumes d’affaires, de devenir partenaire officiel des JO-2020. Il avait plaidé coupable en décembre, selon les médias nippons.

Le parquet avait requis 30 mois de prison ferme à son encontre, selon les médias locaux. Deux de ses anciens collaborateurs chez Aoki Holdings ont aussi écopé de peines de prison avec sursis, mais plus courtes.

Les trois hommes avaient été arrêtés en août dernier en même temps que Haruyuki Takahashi, un ancien membre du comité d’organisation des Jeux de Tokyo.

M. Takahashi est soupçonné d’avoir reçu en 2017 l’équivalent de plus de 320 000 euros de pots-de-vin de la part d’Aoki Holdings, devenu l’année suivante partenaire officiel des JO-2020. Son procès n’a pas encore commencé et il clame son innocence, selon la presse.

Confiance « abîmée »

« Ces actes criminels ont abîmé la confiance de la société dans le bon déroulement des Jeux, qui ont attiré l’attention du monde entier et ont été importants pour le pays », a déclaré vendredi le juge Kenji Yasunaga selon des propos rapportés par l’agence Jiji.

« Nous prenons ce jugement au sérieux et nous ferons tout notre possible » pour éviter qu’une telle affaire ne se reproduise et pour « regagner la confiance de nos clients », a réagi vendredi une porte-parole d’Aoki Holdings interrogée par l’AFP.

Sollicité vendredi par l’AFP, le Comité olympique japonais n’avait pas réagi pour le moment à ce premier jugement.

D’autres arrestations pour des griefs similaires ont eu lieu ces derniers mois, comme celles du président à l’époque de la grande société d’édition japonaise Kadokawa et de l’ancien patron de l’agence de publicité ADK, lequel a plaidé coupable en février.

Dentsu, la plus grande agence publicitaire japonaise, est également dans le collimateur des enquêteurs, qui la soupçonnent avec d’autres entreprises d’avoir truqué des appels d’offres pour des contrats de préparatifs liés aux JO-2020 qui se chiffraient à 40 milliards de yens (quelque 270 millions d’euros au taux de change actuel).

Haruyuki Takahashi avait par ailleurs travaillé auparavant chez Dentsu. Un autre ancien responsable de l’organisation des JO, Yasuo Mori, a aussi été arrêté en février dans le cadre de cette affaire distincte d’appels d’offres truqués.

Des soupçons de corruption flottent par ailleurs depuis longtemps sur les conditions d’attribution des JO-2020 à la capitale japonaise par le Comité international olympique (CIO) en 2013.

En mars 2019, le président du Comité olympique japonais Tsunekazu Takeda avait démissionné quelques mois après avoir été mis en examen par la justice française, qui enquête sur ce dossier.

M. Takeda est soupçonné d’avoir rémunéré Black Tidings, une société établie à Singapour, avant et après la désignation de la capitale japonaise par le CIO comme ville-hôte des JO-2020.

Selon les enquêteurs français, Black Tidings n’était qu’une « coquille vide » qui menait à Papa Massata Diack, fils de l’ancien patron sénégalais de l’athlétisme mondial et ex-membre influent du CIO Lamine Diack, décédé fin 2021.

Les scandales judiciaires touchant les JO de Tokyo ont aussi rejailli sur la candidature de Sapporo pour les JO d’hiver 2030.

La capitale de la grande île septentrionale japonaise de Hokkaido a suspendu depuis décembre dernier ses activités promotionnelles autour de cette candidature, et n’exclut pas désormais de viser les JO d’hiver de 2034 à la place.