(Zhangjiakou) Skwinch, skwinch, skwinch… Entendez-vous le bruit ? C’est celui des bâtons des fondeurs qui pilonnent la neige froide et sèche de Zhangjiakou.

Après la retraite d’Alex Harvey, j’ai cru que je mettrais du temps avant de m’emballer autant pour le ski de fond. Je ne connaissais pas ou très peu Cendrine Browne, Antoine Cyr, Olivier Léveillé, Dahria Beatty ou Rémi Drolet. Ils sont venus me chercher. Pas en gagnant des médailles, mais en allant au bout d’eux-mêmes, excusez le cliché.

Beatty, la grande de Whitehorse, qui répond aux questions en français après sa 18e place au 10 km.

Cyr, le fringant de Gatineau, qui se révèle au sprint par équipes, après une quinzaine où il remettait tout en cause.

Léveillé, le jeune prometteur, qui sanglote après sa 27e position d’un 50 km tronqué à cause du vent et du froid. Le bâton d’un rival avait cassé son ski.

Drolet, le crack en physique de Harvard, le vague à l’âme, se flagellant, car il n’arrivait pas à embrayer la sixième vitesse quand le taureau Bolshunov accélérait

« Je ne veux pas appeler ça de la paresse, mais ça ressemble à ça pendant la course. J’ai un peu de misère dans ce département ces jours-ci. »

Je l’ai fait pleurer en lui demandant ce que son père lui avait dit dans une conversation virtuelle organisée pour les athlètes aux JO. « Je suis vraiment chanceux d’avoir un père comme lui. »

« Je suis vraiment chanceux d’avoir un père comme lui. » De la simple reconnaissance. Ça m’a rappelé que j’avais deux fois son âge. Le givre dans mes cils frisés est devenu un peu plus épais. Juste un peu.

Après une moisson foisonnante à Tokyo, je n’ai donc pratiquement pas couvert de médailles à Pékin. Je ne m’en porte pas plus mal. Je suis ici pour le sport.

Curieusement, je pense même avoir vibré davantage en Chine qu’au Japon. Ça doit être l’air pur des montagnes, où je me sens mieux qu’en ville. Surtout depuis qu’une jolie tempête a laissé un couvert de neige partout à Zhangjiakou. Avec le ciel bleu et le soleil, c’était magnifique.

À la fin, les athlètes vous remercient. Merci de parler de nous, de donner de la visibilité à notre sport, de tout raconter à nos familles.

Mikaël Kingsbury s’est frappé le cœur après s’être longuement livré au bas de la pente. La planchiste Elizabeth Hosking m’a fait découvrir la demi-lune. Laurent Dubreuil s’est montré aussi digne après une quatrième place qu’après une médaille d’argent.

Mon enregistreur est plein. Les piles sont gelées. Quel métier !