Les déboires de la skieuse américaine Mikaela Shiffrin se sont poursuivis aux JO de Pékin.

(Zhangiakou) Pour la troisième fois en cinq départs aux Jeux olympiques de Pékin, Mikaela Shiffrin est sortie de parcours après quelques portes.

« En ce moment, c’est comme une joke », a lancé la skieuse vedette américaine après cette autre déconvenue dans la manche de slalom du combiné alpin, ultime épreuve individuelle sur laquelle elle comptait pour « sauver » ses JO, jeudi après-midi.

Athlète active la plus victorieuse sur le circuit de la Coupe du monde avec 73 succès, la skieuse de 26 ans se rend pratiquement toujours jusqu’en bas des deux manches. Comme elle l’a elle-même calculé, 60 % de ses sorties de parcours durant toute sa carrière se sont maintenant produites aux JO.

Toutes proportions gardées, les déconvenues de Shiffrin à Yanqing, c’est un peu comme si Mikaël Kingsbury avait chuté sur la troisième bosse en qualifications.

Le hasard a voulu qu’elle faillisse entre les piquets sur un tracé élaboré par son entraîneur Mike Day.

Pression ?

Je n’ai pas senti la pression [en haut de parcours]. Il y a toujours de la pression, mais je me sentais bien et j’étais détendue. Je connaissais mon plan. J’étais concentrée, je skiais bien, et ça n’a pas encore marché.

Mikaela Shiffrin

Manuel Gamper, entraîneur-chef de l’équipe féminine canadienne, ne croit pas non plus que l’ampleur des attentes a étouffé la double championne olympique (slalom en 2014 et géant en 2018).

« Elle est aussi humaine »

« Ce n’est qu’un point de vue de l’extérieur, a indiqué le coach italien. Mais c’est intéressant de voir qu’une telle athlète, qui était si stable, ne termine pas ses courses. Ça ne fait que montrer qu’elle est aussi humaine. »

Sur le plan technique, Gamper estime que Shiffrin a elle aussi peiné à s’adapter à la neige artificielle si particulière de Yanqing. Le réchauffement des températures pour les épreuves techniques a complexifié la situation.

« Plus tu essaies de comprendre cette neige, moins tu trouves de réponses. Tu sens que tu as tellement d’accroches, mais quand tu fais la transition entre les virages, tu ne la sens plus du tout. L’hésitation survient, et tu en arraches encore plus. »

PHOTO DENIS BALIBOUSE, REUTERS

Chute de Mikaela Shiffrin

Au fil des skieuses et des skieurs qui défilaient devant lui, Gamper a également constaté que certains équipements répondaient mieux sur cette surface. Les skis, mais aussi les fixations, les plaques et les bottes. Les manufacturiers ont dû s’adapter sur-le-champ. Il relève l’exemple du géantiste slovène Žan Kranjec, qui a carrément changé de bottes pour la deuxième manche, en route vers une médaille d’argent.

Shiffrin n’a pas soulevé la question de l’équipement pour expliquer ses déboires, mais elle a néanmoins emprunté les planches de l’Italienne Sofia Goggia pour la manche de descente du combiné, où elle a enregistré le cinquième temps.

De retour samedi

Encore en deuil de son père, mort accidentellement en février 2020, éprouvée par des maux de dos et un test positif à la COVID-19 en décembre, Shiffrin abordait ses troisièmes JO avec une certaine forme de détachement. Jamais elle n’aurait cru qu’ils se transformeraient en une telle séquence noire.

Ses dénigreurs s’en sont donné à coeur joie sur ses réseaux sociaux, dont elle a publié les pires extraits.

« Il y aura tout un gâchis chaotique de conneries de gens qui diront à quel point j’ai échoué de manière grandiose dans les moments qui comptaient réellement cette semaine. C’est vraiment étrange, mais je n’ai même pas peur de ça en ce moment. Et c’est peut-être parce que je n’ai plus d’énergie émotionnelle à donner. »

La chose logique serait de plier bagage et de rentrer chez elle, au Colorado, a-t-elle fait remarquer. Mais elle s’alignera néanmoins à l’épreuve mixte par équipes, samedi.

« Je vais retourner sur la montagne demain et skier du slalom géant parallèle parce que je suis tellement idiote. Je ne sais pas pourquoi on continue à le faire, mais réussir de bons virages est tellement grisant. C’est ce que j’ai fait durant ces deux semaines entières ici. J’aimerais avoir quelque chose pour le démontrer. »