(Pékin) On veut bien respecter la distanciation physique, mais à l’heure sportive de pointe, quand le bus passe toutes les 20 minutes piles (les Chinois sont rigoureusement ponctuels) et qu’on est 45, on s’entasse tous, masqués, vaccinés, testés.

Un banc sur deux dans les bus des médias est marqué d’un X rouge. Pour qu’un seul sur deux soit occupé. Par une sorte de superstition ou de respect absurde de la lettre du règlement, généralement personne ne s’assoit sur ces sièges, ce qui fait encore plus de gens debout, collés.

J’étire le cou et je vois un collègue français jouer aux échecs sur son téléphone.

En face, un journaliste chinois regarde ce qui me semble une série policière, difficile à dire sans les sous-titres.

Qu’est-ce qui se passe dans District 31, au fait ? Non, ne dites rien.

Deux autres se montrent des mèmes de Poutine et Macron sur Twitter en rigolant. Au fond, un gars sur l’heure de tombée écrit frénétiquement. La suspension est bonne, il n’y aura pas trop de coquilles.

J’analyse le parc automobile de Pékin, qui roule dans un trafic dense mais fluide. On se croirait en Europe : voitures japonaises, allemandes, suédoises, françaises, parfois américaines. Ce qui frappe le plus le visiteur québécois ? L’absence totale de pick-ups.

Dans cette ville entourée de montagnes sans la moindre trace de neige, on aperçoit au loin une tache blanche. C’est un parc, qui borde l’autoroute. Un canon à neige y est planté, et des artistes sont en train de sculpter deux mascottes géantes des Jeux dans la neige. La scène dégage une sorte d’étrangeté et résume l’installation de ces Jeux « verts » où chaque site est impeccable mais où l’on ne glisse que sur de la neige fabriquée.

Mon voisin se retourne vers moi et, c’est peut-être la fatigue, c’est peut-être juste le concept de mascottes géantes en neige au bord de l’autoroute, va savoir, on éclate de rire.

Jan, journaliste de Francfort, fait un appel vidéo à la maison. Il a calculé le décalage horaire : c’est maintenant.

Il commence à chanter « Happy birthday » – il la chante au complet à son fils de 6 ans. Il lui montre le bus, le décor. Tout le monde se tait.

On devine des sourires sur les visages qui se tournent vers l’Allemand.