(Zhangjiakou) 13 h 32. La victoire de Maxence Parrot est confirmée sur l’écran géant, à la montagne de Zhangjiakou. Les patrons à La Presse étirent l’heure de tombée à 14 h 30 (1 h 30, heure de Montréal). Il reste 58 stressantes minutes pour raconter l’exploit du Canadien qui a vaincu le cancer il y a 3 ans.

Mais avant que Parrot ne se présente devant les médias, il prend part à la cérémonie des médailles au bas de la pente de descente acrobatique, avec le Chinois Su Yiming et le Canadien Mark McMorris. Dix-huit précieuses minutes viennent de se volatiliser.

À 13 h 50, j’achemine un premier message de détresse à l’équipe à Montréal. « Parrot n’a pas encore commencé ses entrevues. Est-ce que 14 h 30 est toujours le deadline final ? »

« On va t’attendre, répond la cheffe de pupitre. Peux-tu viser 15 h max ? » Ça, ça veut dire 2 h du matin pour Montréal. Normalement, l’édition de La Presse+ est complétée à 1 h du matin. On ne touche plus au journal à partir de cette heure-là.

Enfin ! Le champion fait son entrée dans la zone mixte, un long couloir zigzaguant où l’attendent les médias. Mais il y a un ordre à respecter.

Tous les athlètes, gagnants et perdants, se présentent devant les caméras du Comité international olympique, puis tour à tour devant celles des diffuseurs officiels comme Radio-Canada.

À la toute fin du parcours arrivent les médias qui sont accrédités pour couvrir les Jeux olympiques, mais qui n’ont pas de droit de diffusion. C’est le cas de La Presse.

L’attente dans la zone mixte peut parfois être longue, surtout quand l’athlète qui vient de remporter une médaille d’or vit un conte de fées. Parrot a fait 12 traitements de chimiothérapie pendant 6 mois, en 2019, et il a vaincu un lymphome de Hodgkin, une forme rare de cancer.

Tous les médias veulent lui parler pour qu’il raconte son histoire extraordinaire. TOUS. Le planchiste s’arrête devant les télés norvégiennes, japonaises, américaines… NBC prend un temps fou avec l’athlète québécois.

À 14 h 07 (1 h 07 à Montréal), j’écris à l’équipe du pupitre : « Maxence fait tooouuutes les télés. Je ne l’aurai pas avant 30 minutes, certain. »

Mon estimation s’avère extrêmement précise. McMorris arrive devant la presse écrite à 14 h 37. Je joue du coude avec le Washington Post et le USA Today.

Puis, la grande vedette du jour se pose devant nous. Et répond d’abord aux questions en français.

Il est 14 h 48 et il reste 12 minutes avant l’heure de tombée. Je cours vers le centre de presse en envoyant un message plein de fautes à cause de mes doigts gelés, du temps qui presse et de l’horrible clavier du téléphone qui nous a été prêté pour la Chine. Nos téléphones personnels sont restés à la maison pour éviter les attaques informatiques.

« Je viens de faire lentrevue avec Parrot. J’ai besoin de 35 minutes pour pr faure ine version courte que jallongerai poyr le web ».

Arrivée devant mon ordinateur, je réécoute quelques passages sur mon enregistreuse, j’écris 500 mots en 25 minutes et j’envoie le texte au pupitre. Mon rythme cardiaque est sûrement trop élevé.

Le soir de la victoire de Parrot, l’édition de La Presse+ s’est bouclée à 3 h 06 au lieu de 1 h.

Le médaillé d’or n’a peut-être pas de record olympique, mais il en détient un à La Presse. Jamais – peut-être hormis un soir d’élections – les pupitreurs de La Presse n’ont veillé aussi tard.

Merci à l’équipe à Montréal !