(Tokyo) « On l’a fait, continue à nager ! », a crié Katie Vincent à Laurence Vincent-Lapointe. Dans le bateau de sauvetage les ramenant au ponton, elles riaient comme des bonnes.

Leur canoë avait renversé dans les eaux chaudes et salées du canal de la Forêt de la mer, mais après la ligne d’arrivée.

La médaille de bronze était déjà dans la poche, une 23e pour le Canada à Tokyo, un sommet pour des Jeux olympiques non boycottés.

Deux jours après sa médaille d’argent en canoë monoplace, Laurence Vincent-Lapointe en a ajouté une de bronze en C2 500 m avec sa partenaire ontarienne Katie Vincent, samedi matin.

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Laurence Vincent-Lapointe et Katie Vincent

« On arrivait ici en espérant deux médailles. Je suis juste contente qu’on ait réussi à l’accomplir », a réagi Vincent-Lapointe, qui peinait à se rendre compte qu’elle était montée sur le podium à une deuxième reprise, cette fois sous la pluie battante.

Cinquième à la mi-parcours, le duo canadien, sacré aux Mondiaux de 2017 et de 2018, a dû réaliser une remontée spectaculaire pour devancer les Allemandes (4es) et les Hongroises (5es). Championnes du monde en titre, les Chinoises ont mené l’épreuve de bout en bout. Les Ukrainiennes, championnes d’Europe, ont gagné l’argent.

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Le duo chinois formé de Mengya Sun et de Shixiao Xu

On avait notre plan de course et on s’y est tenu du début à la fin. On savait qu’on était vraiment capables de pousser dans les 200 derniers mètres. C’est ce qu’on s’était dit : peu importe ce qui se passe, on pousse jusqu’à la fin.

Laurence Vincent-Lapointe

Après avoir traversé la ligne, Katie Vincent s’est levée pour tenter de féliciter sa partenaire, penchée devant elle. La manœuvre a déséquilibré le bateau. Vincent-Lapointe est tombée, suivie de sa coéquipière. L’eau était à 30 °C…

« J’étais tellement excitée, j’ai presque sauté, c’était un surplus d’adrénaline ! a dit Katie Vincent en riant. Notre carrière ne serait pas complète sans avoir fait une baignade ensemble ! On a eu tellement de plaisir, c’est tellement un beau moment. Je ne vais jamais l’oublier. »

La canoéiste de 25 ans a été une victime collatérale de la mésaventure de Vincent-Lapointe avec un test antidopage positif. Elle avait réussi à qualifier l’embarcation aux Championnats du monde de 2019, mais elle a baigné dans l’inconnu pendant des mois avant de s’assurer sa place à Tokyo, le printemps dernier.

C’est tellement beau de voir ce parcours finir comme ça. Les deux dernières années ont été vraiment folles. Il y a eu beaucoup de turbulence. De finir une histoire comme ça, avec une médaille de bronze, je suis simplement heureuse et fière de Laurence et de moi. On a persévéré à travers tout ça et réussi quand même à performer ici, à Tokyo.

Katie Vincent, qui avait fini huitième à l’épreuve individuelle

Seule double médaillée québécoise au Japon – la cycliste Lauriane Genest tentera de la rejoindre à la vitesse individuelle –, Vincent-Lapointe ne savait pas comment réagir à la moisson record du Canada. Ce 23e podium permet de surpasser le total d’Atlanta, en 1996, et celui de Rio, en 2016. Aux JO de Los Angeles, boycottés par l’Union soviétique et les pays de l’Est en 1984, les athlètes canadiens avaient enlevé 44 médailles.

« Je ne pense pas que je l’ai encore compris, qu’on avait une deuxième médaille, a dit la canoéiste de 29 ans. Ça va venir. Je suis juste fière de notre délégation. Je trouve que tout le monde est arrivé en force, a travaillé fort du début à la fin, tous les sports confondus. Avec la COVID-19, on a dû faire preuve de résilience. À ces Jeux-ci, tout le monde a utilisé cette résilience. On a été capables d’être bons et forts, et de représenter notre pays au mieux. »

Et de piquer une tête pour fêter ça dans la joie.

« Notre histoire s’arrête là, mais j’en suis très fier »

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Le quatuor canadien n’a pas été en mesure de se qualifier pour la finale du K4 500 m.

Le K4 500 m masculin a connu une triste fin de parcours. Alors qu’un nuage de pluie balayait le bassin en matinée, Nicholas Matveev, Mark de Jonge, Pierre-Luc Poulin et Simon McTavish ont pris le cinquième et dernier rang de leur vague demi-finale, ce qui a mis fin à leur parcours olympique. Ils devaient terminer parmi les quatre premiers pour passer à la finale. « Honnêtement, je pense qu’on a eu une très bonne course, a soutenu Poulin. On a eu de la misère à finir fort en éliminatoires et en quart de finale. Je pense qu’on a réussi ça, ce matin. Malheureusement, ce n’est pas assez. Ça va vraiment vite. On a tout donné. On a fini fort, c’était ça l’important pour nous. » En plus de la pandémie, l’équipage a été frappé par quelques durs coups. La sœur aînée du vétéran De Jonge, médaillé olympique et double champion mondial, a subi un grave accident de vélo qui l’a paralysée en bas des bras. Poulin, lui, s’est blessé à une main à quelques semaines des sélections canadiennes. Il a dû se faire opérer, et la qualification a été reportée. « Heureusement, aujourd’hui, je suis vraiment plus fort que je ne l’aurais été si ça ne m’était pas arrivé parce que j’ai dû me battre extrêmement fort, a confié l’athlète de 25 ans. En même temps, on n’est pas en finale aujourd’hui. Notre histoire s’arrête là, mais j’en suis quand même très fier. » Si De Jonge se dirige vers la retraite, Poulin et ses deux autres partenaires comptent poursuivre jusqu’aux JO de Paris, en 2024. « Je me suis vraiment amélioré en tant que kayakiste et en tant qu’athlète ces 15 derniers mois. J’ai l’intention d’utiliser tout ce que j’ai appris ici, cette semaine, pour construire quelque chose de vraiment bien pour 2024. » Le K2 200 m fera un retour dans la capitale française, ce qui sourit à Poulin, qui a connu du succès en biplace en 2018.