(Tokyo) De Chuck Norris à la série Cobra Kai, le karaté est connu dans le monde entier, mais les Jeux olympiques de Tokyo représentent une première et unique chance de s’illustrer pour cet art martial, qui sera absent des prochains, à Paris 2024.

Au Japon, berceau du karaté, ses adeptes espèrent que son éphémère présence olympique marquera toutefois les esprits, alors que ce sport avait vainement frappé à la porte des JO depuis les années 1970, avant d’être inclus en 2015 au programme des JO 2020.

« Je regarde (les karatékas, NDLR) qui vont aux Jeux olympiques et je les trouve trop cool », a déclaré à l’AFP Yusei Iwa, 9 ans, en train de s’échauffer avec ses petits camarades dans un dojo de la capitale japonaise.

« Comme le karaté va devenir un sport olympique, beaucoup de gens différents vont apprendre des choses sur sa culture et son histoire, et découvrir ce qu’il a de génial », ajoute ce « karaté kid ».

Cet art martial est né dans l’archipel d’Okinawa, un ancien royaume indépendant annexé par Tokyo à la fin du 19e siècle. Ses techniques d’autodéfense se sont répandues au Japon dans les années 1920, puis dans le monde entier après la Seconde Guerre mondiale.

Pour ses adeptes, l’essence du karaté va bien au-delà de ses techniques de combat, au point de devenir un art de vivre.

Kata et kumite

« Pas besoin d’avoir une tenue de karaté pour le pratiquer », explique à l’AFP Yukimitsu Ono, 72 ans.

« Quand je suis au téléphone, je me tiens sur une jambe. Quand je coupe quelque chose dans la cuisine, mes jambes sont écartées et fermes. Cela devient naturel pour moi », raconte-t-il.

Le karaté se dispute aux JO selon deux formats de compétition : le kata et le kumite. La première consiste en des mouvements chorégraphiés visant un adversaire virtuel, tandis que dans la seconde, deux karatékas s’affrontent en duel durant trois minutes intenses.

« Je pense qu’il est important pour nous de transmettre l’attrait du karaté quand nous ferons notre apparition aux Jeux », avait déclaré avant l’évènement Mayumi Someya, qui représente le Japon dans l’épreuve féminine du kumite.

Mais l’image harmonieuse que veut dégager le karaté a pris un coup plus tôt cette année quand un responsable japonais a dû démissionner, après avoir été accusé de mauvais traitements sur l’ancienne championne du monde Ayumi Uekusa.

Une image à dérider

Son entraîneur, Masao Kagawa, l’avait notamment frappée au visage et blessé ses yeux avec son sabre de bambou quelques années auparavant, avait dénoncé cette karatéka.

Mais les passionnés de ce sport soulignent qu’il est devenu beaucoup plus sûr, et espèrent que les JO de Tokyo dérideront son image parfois sévère.

« Avant que le karaté ne soit inclus aux JO, des parents avaient l’habitude d’inscrire leurs enfants parce qu’ils voulaient les endurcir-des enfants qui étaient timides ou qui pleuraient beaucoup », raconte Tomokatsu Okano, propriétaire d’une chaîne de dojos de karaté au Japon et aux États-Unis.

Mais maintenant, « beaucoup d’enfants s’inscrivent parce qu’ils veulent eux-mêmes » faire du karaté, se réjouit-il, tout en reconnaissant que ce sport permet toujours d’inculquer aux jeunes une certaine discipline.

La fédération japonaise de karaté comptait en 2020 quelque 86 700 licenciés, un nombre en petite progression par rapport à 2015 mais inférieur à celui des licenciés de judo, le principal art martial de l’archipel, mais dont le nombre d’adhérents (121 000 en 2020) a chuté de 40 % depuis le début des années 2000 dans ce pays connaissant un fort vieillissement démographique.

La Fédération internationale de karaté a simplifié les règles de compétition en prévision des JO de Tokyo, mais M. Okano craint qu’elles restent obscures pour un public novice.  

« Tout spectateur devrait être capable de voir lui-même qui a gagné et qui a perdu », mais cela n’aura rien d’évident à Tokyo, prévient-il.