(Tokyo) « Partir, c’est dur. Quand tu les regardes jouer comme ça, tu as envie de rester avec eux. De continuer. »

Glenn Hoag était émotif. Quinze ans après avoir construit le programme national, c’était son dernier match à la tête de l’équipe masculine de volleyball du Canada. Il a d’ailleurs essuyé quelques larmes. « [Les gars] ont joué à un niveau que jamais je n’aurais imaginé. »

Ses joueurs ont atteint les quarts de finale, mais leur parcours est maintenant terminé, après une défaite de 25-21, 30-28 et 25-22 contre les Russes.

Pardon.

Contre les athlètes du Comité international russe. C’est leur appellation officielle à ces Jeux. Une punition pour avoir « caché le cover-up » (!) du plus important système de dopage de l’histoire organisé par un État.

Petite parenthèse, avant de revenir à Glenn Hoag.

Des pichenottes comme celle-là, les Russes en ont reçu quelques-unes pour les Jeux de Tokyo. Des exemples ? Ils ne peuvent pas coudre leur drapeau bleu-blanc-rouge sur leurs maillots. Ni entendre leur hymne national après une victoire. Sauf qu’ils ont le droit de porter un uniforme bleu-blanc-rouge, frappé d’un logo bleu-blanc-rouge. Et lorsqu’ils gagnent une épreuve, les haut-parleurs crachent un concerto pour piano du plus célèbre compositeur russe, Piotr Ilitch Tchaïkovski.

Croyez-vous que Vladimir Poutine pleure en petite boule dans un recoin du Kremlin, actuellement ?

Moi non plus.

Tu as beau maquiller un chat en lapin, ça reste un chat.

La seule punition vraiment significative infligée aux Russes dans ces Jeux, c’est la limite de 10 participants en athlétisme. Une peine nettement insuffisante, compte tenu de la tricherie éhontée à laquelle ils se sont livrés. Cette mascarade discrédite non seulement les efforts des experts de l’Agence mondiale antidopage, mais aussi l’image de tout le mouvement olympique.

Fin de la parenthèse.

De retour au programme principal. La fin du cycle de l’équipe canadienne, avec Glenn Hoag à sa tête. Bien sûr, l’entraîneur québécois aurait préféré vaincre ceux-dont-on-ne-peut-prononcer-le-nom. Son objectif avoué était de revenir au pays avec une médaille autour du cou.

« On va rejouer le match plusieurs fois dans notre tête. Il y a eu des imprécisions. On a mal commencé la deuxième manche avec six fautes directes sur les sept points qu’on a donnés à la Russie. Il y a eu des approximations. On savait que ça allait être un match difficile. Ils nous ont mis de la pression au service. Quand ça se joue à deux ou trois points, ce sont de petites choses qui peuvent faire mal. »

Avant d’ajouter, un peu dur envers lui-même : « Je cherche ce que j’aurais pu faire de plus pour l’équipe. »

Réglons ça tout de suite. Glenn Hoag a tout fait pour l’équipe nationale.

PHOTO BERNARD BRAULT, LA PRESSE


Nicolas Hoag est enlacé par son père et entraîneur Glenn Hoag après la défaite du Canada en quarts de finale.

« Il a construit le programme en 2006 », a rappelé son fils Nicholas, le meilleur joueur de la formation. « Il a arrêté en 2016, pensant qu’il n’allait pas revenir. On vient de faire deux Jeux olympiques de suite. Deux quarts de finale de suite. C’est sûr qu’on voulait une médaille avec lui. Lui aussi. Mais il a tellement bien coaché tout au long de sa carrière qu’il n’a pas de regrets. C’est le meilleur niveau qu’on a atteint avec l’équipe nationale. Je suis fier de lui. Il devrait être fier de lui-même. Et tout le monde au Canada est fier de lui aussi. »

Sous la direction de Glenn Hoag, le programme de volleyball est devenu l’un des meilleurs au monde. Rien n’est parfait, évidemment. « Le problème du programme canadien, analyse Hoag, c’est que, contrairement aux pays européens, on n’a pas le système de club, où le développement commence en bas âge. Beaucoup de joueurs [là-bas] ne vont même plus à l’école. Ils arrêtent au secondaire et deviennent des joueurs. » Ce qui n’est pas le cas des joueurs canadiens qui, au début de la vie adulte, doivent concilier le sport et des études universitaires.

« Ce qui est intéressant, c’est que nos joueurs vont à l’école. Ils vont à l’université. Ils sont habitués à la discipline. Quand vient le temps de finir les choses, ils sont capables. [Cette attitude] se transmet ensuite d’un joueur à l’autre. C’est une force de notre système. »

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Maintenant, ajoute-t-il, « dans les milieux compétitifs, que ce soit en affaires ou ailleurs, il y a toujours quelqu’un qui essaiera de faire mieux. Il faut rester dans cet esprit. Il faut toujours penser à long terme au Canada. […] On ne peut pas dormir au gaz. Il faut toujours avoir le sentiment d’urgence, ne jamais se dire : OK, on a abouti. On n’a pas le système de développement pour se permettre ça. »

Avant de partir, il a eu une dernière pensée pour les joueurs qu’il a vus grandir au sein du programme.

« Je me rends compte que c’est la dernière compétition. Je regardais [récemment] des photos de Nicholas, de Lucas [Van Berkel] et de Tyler [Sanders], il y a 10 ans. Ils avaient des faces de bébé. Ça va faire bizarre de les [quitter]. On va continuer d’aider le programme. On ne veut pas que ça meure. »