L’haltérophile Kristel Ngarlem a dû patienter un an de plus que prévu pour participer à ses premiers Jeux olympiques, mais ses objectifs n’ont pas changé. Et même si elle n’a pu s’y préparer dans des conditions optimales, elle n’entend pas bouder son plaisir.

« Je vais à Tokyo avec deux objectifs en tête, a laissé entendre la Montréalaise qui célèbre ses 26 ans, mardi. Le premier, c’est d’avoir du fun. Je trouve que beaucoup se mettent la pression de la performance. Moi, ce sont mes premiers Jeux et je veux que cette expérience soit positive.

« Le deuxième, c’est de réussir le plus de levées possible. Si je pouvais faire un quatre sur six qui s’approche de mes meilleures barres, soit près de 100 kg à l’arraché et autour de 130 kg à l’épaulé-jeté, je vais être vraiment contente. »

Ngarlem a signé sa meilleure performance dans la catégorie des 76 kg, totalisant 233 kg, dont un record personnel de 134 kg à l’épaulé-jeté, à la Coupe du monde de Rome en janvier 2020.

La pandémie de COVID-19, le report des Jeux et l’arrêt des compétitions ont toutefois brisé son élan et les 16 derniers mois lui ont paru une éternité.

Ce cycle olympique a duré cinq ans. Des fois, on dit que ça passe vite. Mais cinq ans, c’est très, très long, surtout quand tu n’as aucune certitude.

Kristel Ngarlem

Malgré des hauts et des bas, elle a réussi à passer à travers les moments les plus incertains. Et elle concrétise enfin un rêve qu’elle caresse depuis qu’elle a 10 ans.

« Ce n’est pas de continuer à m’entraîner qui a été le dilemme pour moi, malgré les contraintes, mais de voir le bout du tunnel. Mais je n’ai jamais douté que je voulais plutôt faire autre chose ou arrêter. »

Limitée à une seule compétition en 2020 et une autre en 2021 – les Championnats panaméricains en avril où elle s’est contentée de la huitième place avec un total de 212 kg –, elle reconnaît qu’il lui a fallu relever plusieurs défis.

« Par exemple, ces championnats ont été déplacés, puis reportés. Ce n’est pas simple quand tu as une compétition sans date précise, surtout dans mon sport avec des catégories de poids. »

C’est d’ailleurs devenu un enjeu avant cette compétition, alors qu’elle a dû perdre 6 kg.

C’est sans compter qu’à l’automne 2020, elle a reçu un diagnostic de colite ulcéreuse, une maladie inflammatoire de l’intestin. Après avoir d’abord perdu du poids en raison de la maladie, la prise de médicaments lui en a fait ensuite prendre. Pas simple quand on cherche à assurer sa qualification pour les Jeux olympiques.

Le modèle de sa mère

La dernière année et demie a donc testé la résilience de Ngarlem, une qualité qu’elle avait déjà cultivée.

« Je suis quelqu’un qui a beaucoup d’objectifs, très motivée, résiliente, travaillante. Pour moi, c’est la clé d’une carrière réussie. »

Ces qualités, elle les a apprises de sa mère, qui l’a élevée seule et qui est aux prises avec la sclérose en plaques.

« Ma mère m’a tout appris dans la vie. Elle m’a toujours dit : “Si tu travailles fort, tout va arriver”, et je la remercie beaucoup. »

Pour ma mère, ce n’était pas une option de manquer l’entraînement, de rater l’école. C’est grâce à cette éthique de travail que j’en suis là aujourd’hui.

Kristel Ngarlem

Son ancienne coéquipière Marie-Ève Beauchemin-Nadeau, qui a participé aux Jeux de Londres et de Rio de Janeiro, a également eu son mot à dire dans son développement comme haltérophile.

« J’ai eu la chance d’avoir Marie-Ève comme partenaire d’entraînement pendant des années. Elle m’a donné beaucoup de conseils. Je lui en suis très reconnaissante, parce que ça m’a aidée dans mon parcours pour 2020. »

Bête noire

Se décrivant avant tout comme une haltérophile qui mise sur sa force, Ngarlem avoue qu’il lui faut travailler sa technique.

« L’arraché est un mouvement un peu plus technique, un mouvement avec lequel j’ai un petit retard à rattraper. Ç’a toujours été un peu ma bête noire. Ces dernières années, j’ai beaucoup travaillé cet aspect, j’ai changé d’entraîneur et nous avons trouvé de nouvelles techniques de travail.

« À l’épaulé-jeté, qui fait appel davantage aux qualités athlétiques, je suis plus à l’aise. Mais l’haltérophilie, c’est un combiné des deux et je dois m’améliorer à l’arraché pour augmenter mes charges. »

L’équipe canadienne d’haltérophilie sera formée de cinq athlètes, dont quatre femmes, toutes du Québec. Outre Ngarlem, les autres sont Maude Charron, Rachel Leblanc-Bazinet et Tali Darsigny.

« Nous avions peut-être même le potentiel d’avoir une cinquième fille. Nous avons de très bons entraîneurs au Québec, la fédération aussi pousse le sport. J’espère que nous aurons de la relève après Tokyo qui se joindra à nous à Paris. »

Car même si elle termine son baccalauréat en criminologie cet été, Ngarlem compte bien être là en 2024 pour vivre cette fois une « vraie » expérience olympique.

Kristel Ngarlem disputera la compétition dans la catégorie des 76 kg le 1er août, au Forum international de Tokyo.