À un an des Jeux d’hiver de Pékin, le Comité olympique canadien se prépare comme si le contexte sanitaire sera le même que celui de Tokyo l’été prochain.

À l’aube de la pandémie mondiale, en février 2020, la première décision du Comité olympique canadien (COC) a été d’annuler un important voyage de préparation pour les Jeux de… Pékin. Au moment où s’amorce le décompte d’un an de la prochaine grand-messe olympique hivernale, jeudi, comment le COC conjugue-t-il ce défi de mettre la table pour deux Jeux en l’espace de sept mois ? Questions et réponses avec son chef du sport, Eric Myles.

Comment le report des Jeux de Tokyo affecte-t-il la préparation pour Pékin 2022 ?

On a justement tout mis en place pour trouver les meilleurs moyens pour que ça ne nous affecte pas. À la minute où on a pris cette décision-là, ç’a été : comment organise-t-on nos équipes et s’assure-t-on de livrer autant les Jeux d’été que les Jeux d’hiver, de façon consécutive, sans diminuer la qualité de nos services et tout le soutien aux athlètes. Comme organisation, on a revu toutes nos priorités. On a même réorganisé nos équipes et rapatrié certains employés pour ça. On a des gens uniquement dédiés à Pékin qui ne viendront pas à Tokyo. On est donc capables de chevaucher les deux évènements.

À l’heure actuelle, êtes-vous en mesure de mettre autant d’énergie et de ressources que vous souhaitez pour Pékin ?

C’est sûr qu’il y a une pression. Je ne ferai pas de cachettes : on est occupés, ça roule. Ces deux derniers jours, j’ai assisté tôt le matin au séminaire des chefs de mission pour Pékin. La semaine prochaine, j’ai une rencontre de nuit pour Tokyo. Sur une base personnelle, je navigue entre les deux Jeux. Même chose pour Marie-Andrée Lessard, notre directrice des opérations, et David Mirota, directeur de la performance. Dans leurs équipes respectives, il y a du monde qui touche soit à l’un, soit à l’autre. On est donc capables d’y arriver. Ça vient par blitz. La semaine passée, j’ai été à 100 % sur Tokyo et cette semaine, à près de 100 % sur la Chine. Ça dépend des enjeux. Il ne faut pas perdre de vue que la préparation des Jeux se fait de cinq à sept ans à l’avance. Sans oublier les autres Jeux, comme les Jeux panaméricains de Santiago en 2023.

Vous préparez-vous pour des Jeux « normaux » ou en fonction de Jeux particuliers qui comprendront des mesures sanitaires semblables à celles de Tokyo ?

On s’aligne sur des Jeux très similaires. D’une part, ils sont très proches dans le temps. D’autre part, on ne détient pas toute l’information sur ce qui s’en vient. On aime mieux être plus conservateurs et protectionnistes que de ne pas être prêts. On a pris cette approche pour Tokyo. On conserve la même attitude et la même stratégie pour les Jeux de Pékin. Ça nous permet d’avoir une réelle continuité et une constance dans la préparation et la formation des gens. C’est important dans le contexte actuel.

PHOTO FOURNIE PAR LE COMITÉ OLYMPIQUE CANADIEN

Eric Myles, chef du sport au Comité olympique canadien

Vous avez été forcé d’annuler un important voyage de préparation à Pékin en début d’année. En quoi cela affecte-t-il la préparation des équipes canadiennes ?

On s’ajuste. Non, on n’y a pas été. Sera-t-on capables d’y retourner ? C’est une grande question. Par contre, on va trouver des solutions. On a des alliés ou des partenaires canadiens qui sont sur place. On a pu avancer et on n’accumule pas de retard. L’un des enjeux-clés, c’est la localisation d’endroits satellites comme le centre de performance, où résideront les techniciens. À Pékin, il y a trois zones différentes. C’est donc hyper important d’être bien situé. On a déjà tout sécurisé ces endroits-là, même si on n’est pas capables d’y aller. On l’a fait de façon virtuelle avec des collaborateurs. On n’est pas inquiets. L’accès aux sites de compétition sera aussi important. Cela a fait l’objet de discussions avec la Chine ces derniers jours. Par exemple, ce sera très important de tester la glace et la neige. Avec les restrictions actuelles, ce n’est pas envisageable pour l’instant. Mais on garde un œil sur cette priorité.

Ressentez-vous de l’inquiétude chez les fédérations ?

Il y a plutôt une grande collaboration qui s’est établie, tant au niveau international que canadien. Ce n’est pas une compétition. C’est plutôt : trouvons les meilleures solutions ensemble. Il y a des préoccupations évidentes, comme la complexité de chaque étape. On a beaucoup de monde à l’extérieur du pays actuellement pour des compétitions et des qualifications. Chaque jour, la situation change, le calendrier évolue, les conditions de retour au Canada ne sont plus les mêmes. Ça devient dur pour les athlètes, qui doivent être extrêmement résilients. Ceux qui s’en sortent le mieux sont ceux qui réussissent à rester concentrés sur ce qu’ils contrôlent. Ce n’est pas simple pour les entraîneurs non plus : la périodisation, les pics de performance, dans un contexte où les dates bougent. Ça amène une tout autre façon de coacher et de préparer les athlètes.

Les traditionnelles compétitions-tests sont remises ou présentées dans un autre format, avec des athlètes locaux ou de la région asiatique. Quel est l’impact pour les équipes canadiennes ?

La possibilité d’envoyer des observateurs pour en apprendre davantage sur les lieux et la tenue de la compétition a été soulevée par nous et d’autres pays.

Avez-vous été impressionné par les résultats des athlètes canadiens jusqu’ici cette saison ?

Les deux ou trois derniers week-ends ont été fous ! [Les patineurs] Laurent Dubreuil, Ivanie Blondin, Valérie Maltais… [La skieuse] Marie-Michèle Gagnon, c’est une méchante belle histoire de persévérance. Éliot Grondin [médaillé d’argent en snowboard cross en Italie]. Alex Beaulieu-Marchand [deux fois 4e] et Laurie Blouin [bronze et 4e] ont très bien fait dans des conditions difficiles aux X Games. On a aussi eu des résultats historiques en bobsleigh, où les Canadiens se battent avec les Allemands. Pour ceux qui peuvent faire des compétitions, ça va très bien. C’est encourageant, mais notre priorité est qu’ils soient capables de s’entraîner et de faire des compétitions de façon sécuritaire. On met énormément d’efforts là-dedans présentement. On a acheté beaucoup d’équipements et formé des gens pour le dépistage. On se félicite de nos décisions prises il y a plusieurs mois. Notre attention est mise là-dessus.

Les propos d’Eric Myles ont été légèrement édités et raccourcis pour faciliter la lecture.