(Montréal) L’annonce par l’Agence antidopage russe, la RUSADA, de l’arrêt de ses tests antidopage, vendredi, en a fait sourciller plus d’un, compte tenu de la réputation du pays dans ce dossier. Mais pour le Centre canadien de l’éthique dans le sport (CCES), ce n’est pas surprenant.

« Nous vivons des moments très difficiles, qui ont des conséquences sur le monde de l’antidopage. Il y a plusieurs entités nationales qui ont dû mettre fin ou réduire considérablement leur programme antidopage en raison de la COVID-19, a indiqué Jeremy Luke, directeur principal intégrité du sport du CCES. Pour la Russie, selon ce que j’ai pu lire, la décision qu’elle a prise vendredi n’est pas différente de celles de nombreux autres pays. Tous ces pays l’ont fait pour suivre les directives de leur gouvernement sur la distanciation sociale et la fermeture des commerces et industries non essentielles. »

Comme le Canada, qui a mis fin à son programme de tests antidopage la semaine dernière.

Plus de tests depuis le 27 mars

« Au Canada, il n’y a plus de test depuis vendredi dernier, a précisé Luke. Nous avons envoyé un avis à toutes les fédérations sportives pour les en informer. Nous avons pris cette décision pour deux raisons : pour suivre les recommandations des gouvernements et autorités sanitaires du Canada, en particulier en Ontario. Leur décision de fermer toute entreprise non essentielle a fortement influencé la nôtre. L’autre a été le report pour un an des Jeux olympiques et paralympiques. Nous croyons que l’urgence d’effectuer des tests antidopage est moindre avec ce report. »

D’ailleurs, le laboratoire de l’Institut national de la recherche scientifique à Laval a été l’un des premiers dans le monde à fermer ses portes, mais il est loin d’être le seul. L’Agence mondiale antidopage (AMA) a d’ailleurs invité les laboratoires du monde à suivre les recommandations de leurs gouvernements respectifs.

« Tel que souligné dans nos directives pour les organisations antidopage concernant la COVID-19 publiées le 20 mars 2020, nous appelons les organisations antidopage du monde entier à suivre les exigences et recommandations de leur gouvernement et de leurs autorités sanitaires durant cette période particulière d’urgence mondiale, au cours de laquelle la priorité est à la santé publique, à la sécurité des sportifs et des personnes impliquées dans la lutte contre le dopage, et à la responsabilité sociale », a réagi l’AMA en toute fin d’après-midi vendredi.

Mais attention : absence de tests ne signifie pas absences de règles.

« Bien que notre programme de tests soit mis sur la glace, les règles antidopage ne le sont pas, a souligné Luke. Les athlètes au Canada doivent toujours s’y soumettre. Ils doivent remplir les documents pertinents s’ils doivent prendre des médicaments proscrits en raison d’une situation médicale ; nos athlètes d’élite doivent toujours nous informer de l’endroit où ils se trouvent et si leur lieu d’entraînement a changé, ils doivent nous le faire savoir ; et notre ligne téléphonique de dénonciation antidopage est toujours en fonction.

« De mener des tests est fondamental à la lutte antidopage, mais ces règles sont aussi très importantes et elles sont maintenues. »

L’AMA surveille d’ailleurs de près toutes les agences nationales antidopage qui ont suspendu leur programme de tests.

Par ailleurs, les athlètes qui seraient tentés de passer du côté obscur doivent savoir qu’ils n’ont pas la bride sur le cou.

Les tests que nous effectuons sont très sophistiqués et nous aurons la possibilité de détecter l’utilisation antérieure de produits dopants. Il y aura une fenêtre au cours de laquelle les tests auront été suspendus, mais nos tests nous permettront de voir si des produits interdits ont été utilisés au cours de cette période.

Jeremy Luke, du Centre canadien de l’éthique dans le sport

«En toute franchise, ce sera limité et ça ne sera pas aussi efficace que si nous menions nos tests de façon habituelle, a admis Luke. Mais de penser que les athlètes qui voudraient tricher auraient le champ libre pendant les prochaines semaines ou prochains mois, c’est faux. Les règles demeurent en place et il y aura des façons de trouver s’ils se sont dopés ou non. »