Comment analyser le travail du gardien? Pour le profane comme pour le spécialiste, la tâche est plus compliquée que jamais.

Les victoires? Un gardien moyen dans un club puissant est avantagé par rapport au gardien de talent dans un club médiocre.

La moyenne de buts alloués? Le style de jeu des clubs peut faire pencher la balance.

Le taux d'arrêts? Des équipes adaptent des systèmes qui permettent à leurs gardiens de ne pas recevoir de tirs trop dangereux, même si la rondelle les frappe souvent. Ce fut le cas avec Jaroslav Halak en séries éliminatoires avec le Canadien, il y a quelques années.

L'entraîneur des gardiens des Blackhawks de Chicago, Stéphane Waite, affirme depuis plusieurs années que les méthodes d'évaluation actuelles sont désuètes. Waite calcule à sa manière la provenance des tirs de façon à se donner un portrait plus juste des performances de ses gardiens.

«On donne trop de valeur aux statistiques, ça découle un peu de la mode Moneyball. On essaie de tout décortiquer. À un moment donné, on perd l'instinct, le sentiment de l'entraîneur. Les chiffres ne disent pas tout. La moyenne de buts alloués, par exemple, est probablement la statistique la plus désuète. C'est davantage une statistique d'équipe. Le gardien de but peut avoir disputé un match incroyable, mais avoir accordé trois buts. Le taux d'arrêts aussi peut être faussé par le nombre de tirs qui proviennent de zones peu dangereuses. Je me fie à mes propres statistiques. Ici, avec les Blackhawks, nous sommes abonnés à une foule de bases de données, mais il n'y a rien de valable pour les gardiens. Je regarde en moyenne 2 matchs par soir, donc environ 500 par année, et les statistiques actuelles ne sont pas représentatives de ce que je vois des gardiens.»

Vers une nouvelle méthode

Michael Schuckers, professeur de statistiques à l'Université St. Lawrence, dans l'État de New York, pourrait bien révolutionner la façon d'évaluer le travail des gardiens de but. Schuckers a mis au point une technique permettant de calculer le taux d'arrêts des gardiens en fonction de l'endroit d'où le tir a été fait et non seulement par rapport au nombre de tirs qu'il reçoit. Dans un échange de courriels, Schuckers affirme qu'il ne travaille pas directement avec les équipes de la LNH, mais il a eu vent qu'on avait consulté ses écrits.

C'est le cas entre autres de Waite. Plusieurs emploient d'ailleurs une méthodologie semblable à celle de Waite et Schuckers, dont Sébastien Farrese, entraîneur des gardiens des Bulls de Belleville et de l'équipe canadienne junior. «La zone défensive est décortiquée en neuf carrés et je calcule le nombre d'arrêts en fonction de la provenance du tir. Si un gardien a une moyenne de 5 buts alloués par match, mais que l'équipe donne 25 occasions de marquer par match, c'est bon. Si le gars a un taux d'arrêt de ,930 mais qu'il y a trois chances de compter contre lui, c'est plus ordinaire.»

Pour Sébastien Farrese, le taux d'arrêts traditionnel n'est pas une statistique révélatrice, notamment parce qu'un gardien peut recevoir un nombre élevé de tirs en raison des retours qu'il accorde. «Or, c'est une lacune importante pour un gardien. Le meilleur exemple est probablement Halak lors des séries avec le Canadien. Il a été sensationnel, tout le monde trippait sur lui. Mais le nombre de retours qu'il pouvait donner sur des tirs décochés entre la ligne bleue et la limite des cercles de mises en jeu, c'était épouvantable.»