Celle-là vient de me jeter par terre. Le Canadien, comme la plupart des clubs de la LNH, a plongé dans les rencontres préparatoires après seulement quelques entraînements. L'horaire débile concocté par la LNH a lancé les Montréalais dans un tourbillon de six matchs en sept soirs.

Pas étonnant que des joueurs de partout dans la ligue soient tombés au combat rapidement, victimes de blessures à l'aine. Guy Carbonneau a eu l'intelligence de reconnaître que ce calendrier irréaliste n'a pas aidé. Idem pour Jacques Lemaire.

 

Mais tous n'ont pas la même opinion là-dessus. Voilà que le respecté DG des Hurricanes de la Caroline, Jim Rutherford, prétend que les joueurs de la LNH sont peut-être surentraînés lorsqu'ils se présentent à leur camp.

«J'ai exprimé mes opinions avec précaution, ces dernières années, parce que je n'avais pas en main tous les éléments pour avoir une solide expertise; mais avec le nombre de blessés que nous avons eus depuis quelques saisons, il faut faire les choses différemment, a-t-il confié hier au quotidien Raleigh News and Observer. Il y a une raison pour laquelle nous avons eu autant de blessés et ce n'est pas une coïncidence. Je ne suggère pas aux joueurs de ne pas s'entraîner. Mais à mon avis, les athlètes d'aujourd'hui sont peut-être surentraînés. Il y a eu beaucoup plus de blessures depuis 10 ans, en particulier au hockey. Nous avons peut-être été victimes de malchance, mais il me semble que les joueurs de hockey n'ont pas besoin d'être des triathloniens. Être en grande forme ne vaut rien si vous êtes en grande forme blessé, assis sur la tribune de la presse.»

Rutherford aurait peut-être intérêt à regarder du côté de son personnel pour expliquer toutes les blessures qui ont affligé son club ces dernières années. Le Canadien avait le même problème il y a huit ou neuf ans jusqu'à ce qu'il fasse appel à un nouveau responsable du conditionnement physique, Scott Livingston, qui a modifié les programmes d'entraînement de A à Z. Les blessures ont diminué chez le Tricolore même si les joueurs ont continué à s'entraîner rigoureusement l'été.

Personne ne peut nier que les blessures à l'aine semblent plus nombreuses chez le Canadien cet automne. Mais c'est aussi la première fois que les joueurs ont à disputer des matchs préparatoires après seulement deux entraînements de trois heures chacun.

En outre, les rares qui ont assisté au camp des recrues peuvent aussi témoigner de la qualité médiocre de la glace au Centre Bell il y a deux semaines, une glace qui s'effritait rapidement à cause du gabarit des joueurs, qui ne cesse d'augmenter, mais aussi parce qu'elle avait été faite quelques jours auparavant. Cette même glace utilisée à l'heure du midi par les joueurs réguliers du club après l'entraînement des espoirs du CH.

Rutherford devrait plutôt s'inspirer des propos de Lemaire et de Carbonneau et trouver des solutions pour réduire le fardeau de travail des joueurs en ouverture de camp.

«C'est aussi mon avis, a confié l'agent Robert Sauvé, joint au téléphone. Les joueurs ont beau être en forme, ils ne sont pas en game shape, comme on dit dans le milieu, et ils se retrouvent en situation de match beaucoup trop rapidement. Ils sont bien entraînés mais les batailles lors d'un match et le fait de jouer sous pression sont beaucoup plus exigeants et aucun entraînement estival ne peut les préparer à ça. Nous sommes quand même chanceux car un seul de nos joueurs, Alex (Tanguay), souffre d'une blessure à l'aine; c'est préoccupant quand même et si ça continue, il va falloir étudier la question avec l'Association des joueurs. Il y a aussi la rigidité des patins qui pourrait être en cause, de même que les lames qui coupent davantage dans la glace.»

Le spécialiste du patinage de puissance, Gaston Gingras, abonde dans le même sens. « Ça commence beaucoup trop vite. Avant, c'était l'autre extrême, il y avait deux ou trois semaines avant les premiers matchs. Il faudrait trouver un équilibre. Jouer un match compétitif, c'est une autre paire de manches par rapport aux matchs amicaux entre les joueurs. Mais Jim Rutherford était un gardien, n'est-ce pas?» a conclu Gingras sur un ton amusé.