(Sherbrooke) Après la cure de jeunesse qui a transformé la défense du Canadien de Montréal au cours de la dernière année, le prochain grand chantier qui attend l’organisation se trouve sans conteste en attaque.

Dans ce département, Joshua Roy fait partie des candidats attendus avec fébrilité. Et sa production du moment ne fait rien pour calmer l’enthousiasme des partisans.

Après une saison de 99 points en seulement 55 rencontres, il carbure à presque trois points par match depuis le début des séries éliminatoires de la LHJMQ. En balayant successivement l’Armada de Blainville-Boisbriand et les Voltigeurs de Drummondville, le Phœnix de Sherbrooke n’a jusqu’ici disputé que huit duels. Le Beauceron a pourtant trouvé le moyen d’amasser 21 points.

Sa domination est totale – il devance de 10 points son plus proche coéquipier. Mais il ne se limite pas aux statistiques. Son degré d’engagement est à l’avenant.

Le capitaine du Phœnix, Kaylen Gauthier, est particulièrement épaté par la « capacité à se lever dans les grands moments » de l’attaquant de 19 ans.

« On l’a vu avec Team Canada : quand ça compte, c’est lui qui est là », résume le défenseur, croisé mercredi midi après l’entraînement de son club. Le Phœnix se prépare à une aride série de demi-finales contre les Mooseheads d’Halifax, qui s’amorcera samedi dans la capitale de la Nouvelle-Écosse.

Dans sa remarque, Gauthier faisait référence au rôle qu’avait joué Roy dans la conquête de la médaille d’or de l’équipe canadienne au Championnat mondial junior, en janvier dernier. Avec 11 points, dont une mention d’aide sur le but gagnant du tournoi, il a été un élément clé de la sélection nationale.

Cette erre d’aller, il l’a conservée à Sherbrooke, tout particulièrement en séries. « Il s’implique physiquement, il fait un peu de tout, souligne Gauthier. Il veut faire la différence. Je pense que c’est ce qui va l’aider à passer au prochain niveau. »

Engagement

Le « prochain niveau », pour Joshua Roy, c’est au pire la Ligue américaine, avec le Rocket de Laval ; au mieux la LNH, avec le Canadien. Théoriquement, il pourrait encore disputer une saison dans la LHJMQ, mais il n’a plus grand-chose à y apprendre.

Or, jamais son entourage n’a senti, depuis le début de la saison, qu’il souhaitait brûler les étapes.

« Ça se voit dans son langage corporel, dans son quotidien, que sa tête est à Sherbrooke, pas à Montréal ou à Laval », confirme Stéphane Julien, entraîneur-chef du Phœnix.

Le cas de Roy, à Sherbrooke, n’est pas unique. Sept joueurs de l’édition 2022-2023 ont déjà été repêchés par une équipe de la LNH. Six d’entre eux ont un contrat en poche.

Gérer la fin de parcours de premiers de classe pressés de sauter chez les professionnels, « c’est vraiment une job pour tous les coachs », reconnaît Stéphane Julien. Il assure toutefois n’avoir pas de problèmes à cet égard cette saison. Encore que quand l’exemple vient « de ton meilleur joueur », ça ne nuit pas.

Une chance réelle de remporter un championnat ne nuit pas davantage, notera-t-on. Mais il n’y a pas que cela.

Ce qui m’impressionne [chez Joshua Roy] depuis le début des séries, c’est à quel point il a le feu dans les yeux. Même à l’entraînement, c’est un de nos meilleurs. Il n’a pas autant de points par hasard. Il les travaille. Il a les idées à la bonne place, le leadership à la bonne place aussi.

Stéphane Julien, entraîneur-chef du Phœnix de Sherbrooke

Ses coéquipiers voient la même chose. « Il est très compétitif. Des fois, tu le regardes et il peut avoir l’air nonchalant, mais en réalité, il ralentit la game, observe Ethan Gauthier. Je n’ai jamais vu une telle vision du jeu, un tel QI… Ce qu’il peut accomplir sur la glace est exceptionnel. »

Justin Gill, compagnon de trio de Roy, parle de son côté d’une énergie contagieuse. En attaque, certes, mais aussi en missions défensives, notamment en infériorité numérique. « Il nous montre que ce n’est pas juste les joueurs physiques qui sont capables de frapper, que tout le monde peut jouer ce rôle en séries. Ça nous pousse à en donner plus. »

Sans regret

Joshua Roy, sans surprise, ne se lance pas dans des discours enflammés sur ses propres exploits. Plus sérieux pendant sa propre entrevue avec La Presse que pendant celles de ses coéquipiers – qu’il faisait mine d’épier et à qui il suggérait des réponses à la blague –, il insiste sur le fait qu’il « ne voulait pas se fier aux points » cette saison, sa quatrième dans la LHJMQ. « Je voulais amener une approche professionnelle et m’améliorer sur 200 pieds », affirme-t-il.

Il dit avoir réalisé, au camp d’entraînement du Canadien l’automne dernier, combien son jeu défensif méritait de l’amour. Désormais, son seul talent naturel ne lui suffirait plus. « Ça ne pardonne plus. J’ai besoin de travailler », rappelle-t-il, lucide.

Il a résolument pris goût au jeu à court d’un homme, où, croit-il, il peut mettre à profit sa vision et son instinct. « Ça permet aussi de rester dans la game. Tu ne t’arrêtes jamais. C’est vraiment le fun. »

Grâce à la « carapace » qu’il s’est construite, il fait abstraction du « bruit » extérieur, celui qui émane de Montréal, comprend-on. Est-ce là une tâche complexe ? « Vraiment pas, on a tellement une belle gang ici. »

Il fait, sans le savoir, écho aux propos de son entraîneur en insistant sur l’importance pour lui de « finir [sa] carrière junior en beauté ». « Et on a l’équipe pour y arriver », ajoute-t-il rapidement.

Ses yeux sont donc vissés sur l’objectif actuel. « Je ne veux pas avoir de regrets », conclut-il.

La série entre le Phœnix de Sherbrooke et les Mooseheads d’Halifax s’amorcera le samedi 29 avril.

Joshua Roy en bref

  • Né le 6 août 2003 à Saint-Georges-de-Beauce
  • 1er choix (1er au total) des Sea Dogs de Saint-Jean, dans la LHJMQ, en 2019
  • Échangé au Phoenix de Sherbrooke en janvier 2021
  • Choix de 5e tour (150e au total) du Canadien de Montréal en 2021
  • Double médaillé d’or au Championnat mondial junior (2022, 2023)