(Buffalo) Drôle de journée au pays des valeurs et la diversité.

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En matinée, les joueurs des Sabres de Buffalo défendaient de toutes les manières possibles la décision d’Ilya Lyubushkin de faire l’impasse sur la Soirée de la fierté, organisée en soutien à la communauté LGBTQ+. Et en soirée, une célébration exubérante de Michael Pezzetta créait un malaise évident chez ses coéquipiers du Canadien. Allez comprendre.

S’il n’y a pas grand-chose à raconter sur les 60 premières minutes du duel opposant le Canadien aux Sabres, la prolongation et, encore davantage, la séance de tirs de barrage ont sorti les spectateurs de leur sommeil. Exactement comme tout le monde l’avait prédit, c’est Pezzetta qui a mis fin aux hostilités en donnant la victoire à son équipe au compte de 4-3. Il a surtout retenu l’attention en s’offrant une célébration à la Tiger Williams, utilisant son bâton comme s’il s’agissait d’un cheval.

Si le numéro 55 était euphorique après coup, on n’en dira pas autant de ses coéquipiers.

« C’est beaucoup à digérer ! », a dit Nick Suzuki, sourire en coin, qualifiant la célébration d’« inattendue » – personne ne le contredira sur ce point.

« C’était drôle, je n’avais jamais vu ça avant… On ne voit plus ça souvent, je suis sûr que nos partisans ont adoré ça. Ceux des Sabres, sans doute moins », a-t-il ajouté poliment.

Brendan Gallagher, qui, comme on le sait, n’a que des amis à travers la LNH, était autrement moins enthousiaste.

« Je ne suis pas sûr qu’on va revoir ça, a-t-il avancé. Je sais qu’ils [les joueurs des Sabres] seront probablement frustrés, on le serait nous aussi dans la situation inverse. Je comprends les deux côtés. »

Alex Belzile a sans doute offert la réponse la plus éloquente.

« Aimes-tu ça ? », lui a demandé un reporter. « C’est différent ! », a-t-il rétorqué, de la même manière qu’on qualifierait les choix vestimentaires douteux d’un ami qu’on ne veut pas froisser.

« Il y a 30 ans, on serait peut-être encore là ! », a renchéri Martin St-Louis, une bonne demi-heure après le sifflet final. Aussi bien dire que les bancs se seraient vidés et qu’on se serait collectivement signifié que ça ne se fait pas en s’échangeant de généreux coups de poing dans le râtelier – car ça, oui, ça se fait. L’entraîneur-chef, toutefois, ne semblait pas scandalisé par ce qui venait de se passer.

Visiblement, Michael Pezzetta n’avait pas un grand appétit à débattre de la chose. C’était bel et bien un hommage à Tiger Williams qu’il a offert, sans pour autant l’avoir vraiment planifié.

Je me suis dit : je n’aurai peut-être plus jamais la chance de le faire.

Michael Pezzetta

Un constat réaliste : au cours de la rencontre, il a eu droit à neuf présences totalisant 6 min 25 s. C’est très peu, même pour lui, mais c’est néanmoins représentatif de sa place dans l’organigramme du Tricolore. Même s’il se démarque en tirs de barrage à l’entraînement, il ne sera jamais appelé, sinon que rarement, parmi les trois premiers tireurs de son équipe. Il était d’ailleurs le sixième à s’exécuter, lundi. Il ne voulait pas rater sa chance.

Sa célébration, c’était « peut-être beaucoup ». « Mais c’est drôle, et je vais m’en souvenir, a-t-il ajouté, rayonnant. C’était de la pure adrénaline. Je me suis dit : allez, je le fais. »

« Gros but »

Ce « gros but », dixit Alex Belzile, est arrivé au terme d’un match « couci-couça » – ses mots, pas les nôtres. C’est dire combien il tombait à point.

Il couronnait une remontée rendue possible par le but égalisateur de Brendan Gallagher en milieu de troisième période.

PHOTO ADRIAN KRAUS, ASSOCIATED PRESS

Brendan Gallagher, à gauche, célèbre son but avec Jordan Harris.

Le choix de Pezzetta n’était pas dur à défendre, selon Martin St-Louis. « Pezz, il est capable ! Plusieurs joueurs savent qu’il a ce move. Je suis content qu’il soit allé chercher le point. »

Depuis qu’il joue au hockey, Michael Pezzetta n’a jamais rien tenu pour acquis. Ni chez les juniors, ni dans la Ligue américaine, encore moins dans la LNH. Son talent a beau être limité, il est membre à part entière de cette équipe. D’une équipe faible et éclopée, certes. Mais c’est lui qui est dans sa chaise, pas un autre.

« Je sens que j’ai montré que je suis un joueur régulier de la LNH, que je peux compétitionner, a-t-il encore dit en fin de soirée. Je ne suis pas un sideshow. Je suis fier de moi et je veux continuer à construire là-dessus. »

Au moment où on parle jusqu’à plus soif de culture d’organisation et d’identité d’équipe, cela nous semble franchement plus constructif qu’un malaise inventé de toutes pièces.

En hausse

Johnathan Kovacevic

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Johnathan Kovacevic

Jordan Harris et lui ont vu beaucoup d’action, et les deux s’en sont bien tirés contre les meilleurs attaquants des Sabres. Kovacevic a en outre eu son tour en tirs de barrage.

En baisse

Jake Allen

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Jake Allen et JJ Peterka

Il s’en tire avec la victoire, sa première au mois de mars – le 27, tout de même –, mais il aimerait probablement revoir au moins deux des buts qu’il a accordés.

Le chiffre du match

1

Le Tchèque Lukas Rousek a marqué le premier but de sa carrière à son tout premier tir et à sa toute première présence dans la LNH. Il a aussi obtenu une mention d’aide. Pas un vilain baptême !

Dans le détail

Primeau et Farrell avec le grand club

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Cayden Primeau

Le Canadien a rappelé Cayden Primeau du Rocket de Laval. Le gardien a atterri à Philadelphie lundi et affrontera les Flyers mardi soir. Alors que le Tricolore est officiellement exclu de la course aux séries éliminatoires de la LNH, l’organisation veut manifestement voir à l’œuvre le jeune homme dans la grande ligue. À ses 9 derniers matchs à Laval, il affiche une moyenne de buts alloués de 2,33 et un taux d’efficacité de, 924. Sean Farrell fera quant à lui connaissance avec ses nouveaux coéquipiers dans la ville de l’amour fraternel. L’attaquant fraîchement débauché des rangs universitaires ne devrait toutefois pas jouer contre les Flyers, alors qu’il n’a encore pris part à aucun entraînement dans l’uniforme bleu-blanc-rouge. Farrell a paraphé, dimanche, une entente de trois saisons avec le CH, son premier contrat dans la LNH. Il a été dominant cette saison dans la NCAA avec l’Université Harvard.

Ça ne sent pas les séries à Buffalo

Mathématiquement, les chances des Sabres d’atteindre les séries éliminatoires sont encore existantes, quoique minces. Malgré le point amassé lundi, ils disposent de seulement neuf matchs pour rejoindre et dépasser les Panthers de la Floride, les Penguins de Pittsburgh ou les Islanders de New York. Leur tâche s’est compliquée alors que Tage Thompson est tombé au combat. Blessé au « haut du corps », le puissant attaquant n’a pas affronté le Tricolore, et malgré les ressources diversifiées de son équipe en attaque, son absence a été flagrante. C’était particulièrement évident à cinq contre quatre quand Rasmus Dahlin, qui était en possession de la rondelle à la ligne bleue, a dû faire signe à Alex Tuch de foncer au filet tellement rien ne se passait. Sur le plan qualitatif non plus, ça ne sent pas fort les séries à Buffalo. Des milliers de sièges du KeyBank Center étaient vides, et ce, en dépit d’une forte représentation de partisans du CH. En première période, pendant un avantage numérique des Sabres, on aurait entendu une mouche voler. Rien qui ressemblait à une frénésie printanière, en somme.

Pas de chandail arc-en-ciel pour Lyubushkin

La série des anicroches se poursuit autour des soirées de la Fierté à travers la LNH. Alors que les Sabres de Buffalo soulignaient leur solidarité avec la communauté LGBTQ+lundi soir, Ilya Lyubushkin n’a pas pris part à la période d’échauffement, au cours de laquelle ses coéquipiers ont porté un chandail aux couleurs de l’arc-en-ciel. L’organisation a, en son nom, invoqué des motifs de sécurité. L’information circule depuis quelques semaines déjà à l’effet que des joueurs russes, redoutant des représailles, soient réticents à l’idée d’afficher leur soutien à la cause LGBTQ+. Une loi promulguée en Russie prévoit en effet l’interdiction de toute « propagande » sur les « relations sexuelles non traditionnelles ». Cela étant, il n’est pas clair à quelles conséquences réelles s’exposent les personnes qui se prêteraient à cette « propagande », ni de quelle manière celle-ci est définie.

Ils ont dit

PHOTO ADRIAN KRAUS, ASSOCIATED PRESS

Michael Pezzetta

J’ai eu une chance l’an dernier et j’ai frappé le poteau. Je me disais que je n’en aurais peut-être plus. Mais [l’entraîneur adjoint] Alex Burrows m’a coaché dans la Ligue américaine. Il sait que j’ai une bonne feinte.

Michael Pezzetta

Je n’ai pas aimé la première période, mais je ne l’ai pas détestée non plus. On a eu un bon début, mais après ça, on a été flat, trop cute en zone neutre, et on a écopé de deux punitions. En deuxième et en troisième, on a joué à notre manière. J’ai aimé la manière dont on s’est corrigés. C’est un signe de maturité.

Martin St-Louis

À son premier match, il a retrouvé ses jambes. Depuis, il augmente le rythme et il a marqué un gros but comme il le fait pour nous depuis longtemps. C’est bon de le ravoir dans le groupe.

Nick Suzuki, au sujet de Brendan Gallagher

Jesse Ylönen et Jake Evans ont tous les deux fait un gros jeu. Jake a fait écran au gardien et la rondelle est rentrée. […] Pour [Evans] et pour moi, chaque match est important, car on en a manqué plusieurs. Il en reste huit, on espère finir en force.

Brendan Gallagher, au sujet de son but