Ça se passait le 24 novembre dernier. Les Foreurs de Val-d’Or étaient en visite à Halifax, un endroit parfois intimidant pour les équipes visiteuses.

« Chez nous, une petite foule, c’est 7000 spectateurs », rappelle Sylvain Favreau, entraîneur-chef des Mooseheads.

Ce soir-là, donc, la glace est encore luisante quand Alexandre Doucet récupère une rondelle en zone neutre, s’échappe et ouvre la marque dès la 27seconde.

Deuxième présence : même résultat. Sur une plus courte distance, Doucet s’amène seul devant le gardien et marque de nouveau. Après 3 min 12 s, c’est déjà 2-0 Foreurs.

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« Ça a mal commencé ! Notre coach n’était pas trop content », se souvient l’attaquant Mathieu Cataford.

Aujourd’hui, les Mooseheads en rient. Pendant la pause de Noël, ils ont conclu une transaction et maintenant, Doucet marque des buts pour eux, pas contre eux.

« On l’avait déjà dans notre ligne de mire, et là, il profite de deux de nos erreurs. Notre ancien propriétaire Bobby Smith était présent, et je pense que ça a confirmé des choses ! Alexandre n’était pas trop intimidé ce soir-là », raconte Favreau.

Favreau ne regrette pas la transaction. Doucet a réussi un tour du chapeau mercredi, après celui enregistré dimanche. Le voilà au 1er rang de la LHJMQ pour les buts avec 56.

L’appel d’Yzerman

Le talent de Doucet passait peut-être inaperçu auparavant, mais plus maintenant. Jamais repêché ni invité à un camp estival, l’Estrien a été recruté par les Red Wings de Detroit il y a deux semaines. L’équipe lui a offert un contrat d’entrée. Le voilà assuré d’un emploi dans le hockey professionnel pour les trois prochaines années.

C’est un dénouement heureux pour un joueur qui, de son propre aveu, n’était pas intéressé par la voie universitaire. « Je veux aller dans la construction, donc ce n’est pas à l’université que je vais apprendre ça ! », lance-t-il.

« Au minimum, j’allais signer un contrat dans l’ECHL, donc je savais que j’allais jouer pro. Mais mon but en début d’année était un contrat de la Ligue américaine. D’en avoir un de la Ligue nationale, ça dépasse mes attentes. C’est un beau cadeau ! »

PHOTO TREVOR MACMILLAN, FOURNIE PAR LES MOOSEHEADS D’HALIFAX

Alexandre Doucet

Les Wings faisaient partie d’un quatuor d’équipes à ses trousses, quatuor qui ne comprenait pas le Canadien, nous dit-on. À 21 ans, Doucet était libre de s’entendre avec l’équipe de son choix. Mais Detroit a souvent pigé à Halifax ces dernières années, et le directeur général Steve Yzerman s’en est mêlé.

« Mon nouvel agent, Philippe Bureau, m’avait dit que Steve allait m’appeler dans les prochains jours. J’étais à l’aréna un matin. Juste avant de mettre mon téléphone de côté, je vois que j’ai un appel manqué. Tout de suite après, je reçois un texto et c’est Steve Yzerman. On a fait un FaceTime.

« C’est un hall-of-famer. J’étais un peu impressionné, j’essayais de ne pas le montrer ! Ce qui m’a convaincu, c’est leur vision. Ils ont de la place pour m’accueillir. »

Plus complet

Doucet devrait en principe jouer à Grand Rapids, dans la Ligue américaine, la saison prochaine. Ce contrat ne lui garantit pas non plus une grande carrière dans la LNH, malgré sa forte production. D’Alex Barré-Boulet à Giovanni Fiore, ils sont plusieurs anciens champions compteurs de la LHJMQ à avoir été incapables de dupliquer leurs succès dans la meilleure ligue au monde.

Doucet affiche toutefois une progression constante. On nous décrit un joueur qui a fait « un examen de conscience » pour offrir un jeu plus complet.

« À 18 ans, j’étais un joueur de profondeur et c’est là que j’ai travaillé sur les détails de ma game. Avec Daniel Renaud, à Val-d’Or, on faisait de la vidéo deux fois par semaine, mais on ne regardait pas mes présences avec la rondelle, on regardait les détails. Dans le pro, ça se joue là-dessus. »

« Je peux te confirmer qu’en parlant à des équipes, plusieurs voulaient l’inviter, souligne Sylvain Favreau. Mais les plus haut placés dans le recrutement voyaient un problème avec son coup de patin. Il a prouvé qu’il n’y en a pas, de problème.

« Il a déjà un tir de la LNH. Il a la puissance et la précision et quand tu as les deux, c’est très intéressant. Il a la vision pour créer des jeux sous pression, ralentir le jeu pour ses coéquipiers. Et il a de très bonnes habitudes de travail. Ça, ça ne s’apprend pas. »

PHOTO TREVOR MACMILLAN, FOURNIE PAR LES MOOSEHEADS D’HALIFAX

Alexandre Doucet

Ce contrat constitue un joli dénouement pour un joueur qui y a toujours cru, même s’il voyait chaque été des dizaines de ses pairs partir pour des camps de la LNH pendant que lui restait à la maison.

« Tu y penses quand tu vois passer les invitations. C’était décevant, mais ce sont surtout mes proches, mes amis qui ne comprenaient pas, qui me disaient : tel gars là-bas, il est moins bon que toi. Mais je savais que ce n’était pas fini. Je savais que j’étais de calibre, donc c’était de la motivation. »

Cette motivation lui permettra de vivre un premier camp d’entraînement de la LNH l’automne prochain.