Le parcours d’Ève Gascon au hockey masculin tire à sa fin. Quoi de mieux que de le terminer au sommet du classement des gardiens de la ligue collégiale ?

« Je suis vraiment satisfaite de ma saison », lance Gascon au bout du fil, vendredi matin, à quelques heures du premier match de séries éliminatoires des Patriotes du collège Saint-Laurent.

Satisfaite, la cerbère a toutes les raisons de l’être.

Après avoir surmonté une importante blessure à une cheville l’été dernier, la native de Terrebonne s’est présentée chez les Patriotes à l’automne pour sa troisième et dernière saison collégiale avant de prendre la direction du Minnesota, où elle jouera l’an prochain avec une équipe féminine de NCAA division 1.

Gascon a connu la meilleure saison de sa jeune carrière ; elle l’a terminée au premier rang des gardiens du circuit en vertu de son remarquable taux d’arrêts de ,922, de sa moyenne de buts accordés de 2,30 et de sa fiche de 16 victoires en 23 rencontres. Pour toutes ces raisons, elle a été nommée dans la première équipe d’étoiles du RSEQ.

Le mot « satisfaite », donc, nous apparaît ici comme un euphémisme.

« Dès le début, j’ai connu des bons matchs. J’ai eu la confiance de mes coachs aussi, explique la jeune femme. J’ai travaillé fort toute l’année dans les pratiques et dans les matchs. »

On avait une bonne équipe aussi, donc c’est sûr que ça aide quand même, mais j’ai fait ce que j’avais à faire.

Ève Gascon

L’athlète de 19 ans a travaillé à être « plus patiente, goaler plus grosse, aller en papillon moins vite ». Elle donne donc moins de buts dans le haut du filet, note-t-elle.

L’an dernier, son père Stéphane Gascon avait affirmé à La Presse que « son pourcentage d’efficacité, elle en [venait] malade ». À l’évocation de cette phrase, la principale intéressée pousse un petit rire.

« Je suis moins pire, dit-elle. C’est sûr que je regarde ça un peu ! Je me compare beaucoup, c’est quand même ça qui fait ma motivation aussi. Mais je veux jouer pour l’équipe et même si je gagne 6-5, je vais être contente. »

Toujours est-il qu’elle peut aussi être fière de ses statistiques cette saison.

Un nouveau chapitre

En août prochain, donc, Gascon ne sera plus une Patriote. Elle sera une Bulldog. Une Bulldog de l’Université du Minnesota à Duluth. Et pour la première fois de sa vie, elle jouera une saison complète au sein d’une équipe féminine. Dans une ville où elle ne connaît « absolument personne ».

Ce sera, elle le sait, « un ajustement, tant sur glace que hors glace ». Sur la patinoire, elle aura le plaisir de découvrir un autre « type de jeu ». Elle a d’ailleurs choisi son université judicieusement.

« J’ai une bonne relation avec les coachs, c’est une ville de hockey, ça a l’air vraiment nice. Ils sont dans une bonne conférence aussi, ils affrontent des grosses équipes. Il y a aussi le fait que ce n’est pas une équipe où la gardienne reçoit 15 tirs par match. Ça m’intéressait aussi. »

Je veux faire la différence, donc je ne voulais pas aller dans une équipe qui domine tout le monde.

Ève Gascon

Le fait de jouer à temps plein avec des femmes lui permettra d’acquérir une expérience différente qui, évoque-t-elle, lui permettra peut-être d’« être meilleure aussi dans les camps [de l’équipe nationale] ».

Pour le reste, elle le découvrira sur place.

« Depuis que je suis toute jeune que je joue avec des gars. Je connais l’ambiance, de quoi ça parle, etc. Avec des filles, je n’ai aucune idée. […] Je ne doute pas que je vais bien m’entendre avec tout le monde. »

L’équipe nationale

Les deux dernières années de la vie de Gascon ont été bien remplies. Après avoir vécu la déception de ne pas avoir été repêchée dans la LHJMQ il y a trois ans, elle espérait recevoir une invitation dans un camp. Invitation qui n’est venue qu’un an plus tard.

La saison dernière, en 2021-2022, elle a disputé deux matchs dans le circuit junior québécois avec les Olympiques de Gatineau ; au premier, elle a reçu une ovation dans une salle comble, et au deuxième, elle a décroché sa première victoire. Elle n’a pas été rappelée cette saison, mais elle gardera en mémoire ces précieux souvenirs.

PHOTO YAN DOUBLET, ARCHIVES LE SOLEIL

Ève Gascon

« Ce n’est pas parce qu’on est une fille qu’on n’est pas capable. Si on prend le talent, peu importe le sexe, c’est ça qui va permettre d’avoir plus de filles. Il y a encore des mentalités à changer, mais ça fait partie du cheminement du hockey. »

Comme elle l’a souvent répété, Gascon rêve d’un jour représenter son pays aux Jeux olympiques. L’été dernier, elle a pris part au camp d’entraînement des formations U22 et sénior, mais sa blessure à une cheville l’a empêchée de prendre part à des matchs ; elle était à « 30 % » de sa forme. Pour cette raison, elle n’a pas été sélectionnée dans l’équipe U22.

« Cet été, je veux vraiment m’entraîner fort, avoir une bonne éthique pour arriver prête au camp, montrer ce que je peux faire, être à 100 %, dit-elle. L’été passé, j’ai trop fait de choses, je jouais beaucoup au dek hockey. C’est peut-être ça qui n’a pas aidé aussi. Ce sont des petites choses qui maganent.

« Cet été, j’aimerais ça, faire l’équipe. »

Les objectifs sont fixés. Il ne reste qu’à tout faire pour les atteindre.

Dans NHL 2023

À sa grande surprise, Ève Gascon est admissible au repêchage… dans le jeu vidéo NHL 2023 ! « Quand je l’ai su la première fois, j’étais comme : il y a une erreur là ! », s’exclame-t-elle. « Honnêtement, c’est quand même bizarre ! J’ai un de mes amis qui m’avait repêchée dans le jeu, ajoute-t-elle. […] Je ne m’attendais pas à ça ! »