La séquence a défilé pendant la diffusion du match à RDS en troisième période. On y voit un Stefan Noesen visiblement frustré, qui rentre au banc avec le bâton de son rival Alex Belzile. Une fois au banc, il donne un bon coup de patin pour en finir avec le bâton volé. Le recel, ce n’est pas pour lui.

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« Il voulait mon bâton, je le lui ai laissé ! », a blagué Belzile, après le match, dans le vestiaire du Canadien.

— Lui as-tu offert de l’autographier ?

— Il ne vaut pas grand-chose, mon bâton, comparé à d’autres !

Même si le Canadien venait de s’incliner 4-3 devant les Hurricanes de la Caroline, l’ambiance était légère dans le vestiaire. Après tout, une défaite en tirs de barrage contre une telle puissance est honorable pour une équipe aussi hypothéquée que l’est le Tricolore. Et disons poliment que le club n’est pas à un point près dans sa course vers une place en séries.

Par ailleurs, si le CH a arraché un point aux visiteurs, c’est beaucoup grâce au travail du quatrième trio, celui de Belzile, Michael Pezzetta et Chris Tierney. L’unité a inscrit deux buts, Tierney aurait pu en marquer un troisième, mais Antti Raanta a fait un arrêt si difficile qu’il en a été ébranlé.

Belzile a marqué un de ces deux buts, en plus de provoquer une pénalité en début de match. En plus du susmentionné Noesen, il a aussi incité Brent Burns à perdre son sang-froid.

Le Bas-Laurentien disputait, mine de rien, un 18e match de suite avec le Canadien. En fait, il est à Montréal depuis si longtemps qu’il doit maintenant passer par le ballottage si l’équipe veut le renvoyer dans la Ligue américaine. Ça explique en partie pourquoi il ne pourra pas participer aux séries du Rocket (s’il se qualifie) puisque le Tricolore ne l’a pas cédé sur papier à Laval à la date limite des transactions.

PHOTO MARTIN CHAMBERLAND, LA PRESSE

Alex Belzile compte le premier but de la soirée contre le gardien Antti Raanta.

Il y a certes des circonstances atténuantes, principalement une liste des blessés longue comme la liste des collaborateurs de votre album préféré du Wu-Tang Clan. N’empêche que pour un joueur de 31 ans, qui n’avait que 13 matchs au compteur avant le début de la saison, passer un quart de saison dans la LNH, à temps plein, est un exploit en soi.

Alex Belzile, joueur permanent dans la LNH ? « Pourquoi pas ?, a rétorqué le gardien Jake Allen. Il joue comme un gars qui est ici à temps plein. Je me fous de son âge. Je le prendrais dans mon équipe tous les jours. »

Si on se fie au passé, ses chances sont évidemment minces que ce séjour dans la LNH devienne un poste permanent. Il y a une raison pour laquelle le cas de Derek Ryan, attaquant maintenant avec les Oilers qui s’est établi à temps plein dans le circuit à 30 ans, soit si souvent cité en exemple.

« Je pense que ça me donne une différente perspective de beaucoup de gars qui arrivent plus jeunes, avait d’ailleurs mentionné Ryan lors du passage des Oilers au Centre Bell, le mois dernier. Peut-être que certains d’entre eux tiennent les choses pour acquises, ça peut arriver quand tu es plus jeune, moins mature. Probablement que je l’apprécie davantage. »

Des propos qui rejoignent ce que Belzile a répondu mardi, lorsqu’il s’est fait demander s’il commençait à se voir comme un joueur de la LNH à part entière. « Peut-être un peu, mais dans ma nature, je n’ai jamais rien tenu pour acquis, au contraire. J’en veux plus. C’est ma personnalité, je veux toujours m’améliorer. Je commence à prendre ma place dans la Ligue nationale. »

Avec 9 points dans ces 18 matchs et un effort irréprochable, il fait tout en son pouvoir pour se donner les meilleures chances.

L’apport de Pezzetta

L’enjeu est différent pour Pezzetta. Lui évolue à temps plein dans la LNH depuis la saison dernière. Il doit par contre constamment se battre pour éviter de se retrouver dans les gradins comme ce fut le cas pour 12 des 13 premiers matchs de la saison.

L’homme à la tignasse frisée a marqué un but, un jeu qu’il a lui-même amorcé en plaquant Jesperi Kotkaniemi sur la bande, provoquant un revirement. Son fait saillant a toutefois été son plongeon pour éviter que les Hurricanes marquent après le spectaculaire arrêt d’Allen en troisième période.

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Le but de Michael Pezzetta en deuxième période.

« Je suis encore plus heureux du but que j’ai probablement bloqué, je déteste me faire marquer quand je suis sur la patinoire », a noté le numéro 55.

« Pezz n’a pas eu un début de saison facile, il ne jouait pas beaucoup. Avec le personnel qu’on avait, ce n’était pas toujours un bon “fit” pour lui. Il est meilleur quand il joue en ligne droite », a illustré Martin St-Louis.

On parle beaucoup des dossiers de Cole Caufield et Sean Monahan en vue de l’été à venir puisqu’ils auront besoin de nouveaux contrats. Mais Belzile et Pezzetta doivent eux aussi s’asseoir à la table. En cette deuxième moitié de saison, ils se donnent des arguments pour un dénouement heureux.

En hausse 

Jake Allen

Soirée de travail spectaculaire pour l’homme masqué du CH. Il termine le match avec 36 arrêts, dont un grâce à une glissade sur le côté à la Bill Ranford.

En baisse 

Rem Pitlick

Il obtient chance après chance de se faire valoir, même en prolongation, mais est incapable d’en saisir une.

Le chiffre du match

-2

C’est le différentiel du pauvre Jalen Chatfield dans cette victoire. Le problème : le défenseur des Hurricanes n’a joué que 7 min 15 s Pas une soirée facile au bureau.

Dans le détail

Kotkaniemi casse le party

Eh bien, oui. Comme dans un film, c’est nul autre que Jesperi Kotkaniemi qui a mis fin au débat en tirs de barrage. L’ancien choix de premier tour du Tricolore, sixième joueur de son équipe à s’élancer, y est allé d’un tir vif et précis dans le haut du filet, au-dessus de l’épaule droite de Jake Allen. Le Finlandais a célébré sobrement, un bras dans les airs, sous les huées de la foule. « J’ai essayé d’être aussi respectueux que je pouvais. C’est spécial d’avoir ce but-là ici », a-t-il dit après la rencontre, ajoutant que ce but faisait sans doute partie du top 10 de ses plus beaux moments en carrière. « C’était plutôt plaisant, pour être honnête, a indiqué son entraîneur-chef, Rod Brind’Amour. On connaît son historique ici. C’est un bon jeune et j’étais simplement content pour lui parce que je sais qu’il vit beaucoup de pression non nécessaire, mais c’est comme ça que ça fonctionne quand un joueur quitte une équipe. » Kotkaniemi connaît de bons moments ces temps-ci : il avait d’ailleurs inscrit un but et quatre mentions d’aide pas plus tard que dimanche.

La cinquième fois est la bonne

En début de troisième période, alors que le Canadien menait 3-2, Derek Stepan est entré en contact avec Allen. Paul Stastny a récupéré la rondelle laissée libre pour égaliser la marque à 3-3. Pour la troisième fois cette saison et la cinquième fois depuis qu’il est entraîneur-chef dans la LNH, Martin St-Louis a contesté le but pour obstruction sur le gardien. Et pour la première fois, les officiels lui ont donné raison ; Stepan empêchait bel et bien Allen de bouger librement. « C’est la première fois que j’avais confiance de le gagner ! », a lancé St-Louis en riant à la fin de son point de presse. De son côté, Rod Brind’Amour a souligné qu’un joueur du CH semblait avoir fait trébucher Stepan. « Ils n’ont pas considéré ça. C’est ça qui est ça. »

Raanta et Chatfield tombent au combat

Les Hurricanes ont perdu deux joueurs au combat en cours de rencontre : le défenseur Jalen Chatfield et le gardien Antti Raanta. Ce dernier a semblé faire un mauvais mouvement en tentant d’arrêter un tir de Chris Tierney en fin de première période. C’est Frederik Andersen qui est venu en relève au deuxième tiers. « Nous sommes dans une position où si un joueur se blesse un peu, nous pouvons le retirer du match, a expliqué Brind’Amour. C’était par précaution pour les deux joueurs. Je ne pense pas que ce sera sérieux ni pour l’un ni pour l’autre. »

Ils ont dit

C’était un match excitant. Je suis fatigué et je n’ai pas joué. Ça montre où on est comme groupe. On montre qu’on peut jouer avec tout le monde présentement. C’est le fun d’être dans cet environnement-là.

Martin St-Louis

Nous n’avons pas connu ce genre de match de toute la saison. C’était le premier match où, du moins pour deux périodes, je pouvais dire : qu’est-ce qu’on fait ? C’est la nature humaine ; nous aurons des hauts et des bas. […] Je donne beaucoup de crédit aux gars parce qu’ils ont trouvé un moyen [de gagner].

Rod Brind’Amour, entraîneur-chef des Hurricanes

T’essaies de ne pas faire cette manœuvre à tous les matchs. Ça arrive une fois par année. C’est athlétique, tu sors l’athlète en toi. Je savais qu’il allait tirer haut, j’essayais simplement de me placer là. Par chance, ça m’a touché, mais la majorité du temps, tu te fais prendre.

Jake Allen, au sujet de son arrêt spectaculaire contre Jaccob Slavin

Dans la vie en général, on aime ça affronter les meilleurs clubs. C’était un excellent test. Indirectement, tu te compares, voir t’es rendu où. C’est une équipe de tête qui vient de sortir un gros match contre Tampa, 6-0. C’était un bel effort, mais si Jake Allen n’était pas là, la game aurait peut-être changé.

Alex Belzile

Nos gars peuvent garder la tête haute. C’est toute une équipe de l’autre côté. Les circonstances étaient difficiles. Personne n’était au sommet de sa forme. […] Je suis vraiment fier des gars, de la façon dont on s’est battus.

Jake Allen

Propos recueillis par Katherine Harvey-Pinard, La Presse