On comprendra Mike Matheson s’il a pris quelques rides samedi après-midi. Que ce soit après avoir marqué en prolongation, pendant l’interminable révision vidéo ou en entrevue d’après-match, il avait, comme Steven Seagal, une seule expression faciale.

Un grand sourire.

« C’était pas mal cool. J’étais un d’eux [un partisan] il n’y a pas si longtemps. J’étais assis dans les gradins à crier. Je me souviens des sections où j’étais assis, on venait peut-être une fois par année. C’est le genre de moment où je dois me pincer. »

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Le but vainqueur de Mike Matheson

Le défenseur québécois a été un des héros du Canadien dans une victoire de 4-3 face aux Islanders de New York, samedi après-midi. Il a ajouté une passe sur le but de Kirby Dach – une rondelle superbement placée pour permettre une déviation – tandis que Justin Barron a lui aussi touché la cible.

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Matheson et Barron ont réussi ce que trop peu de leurs collègues montréalais ont accompli cette saison : marquer un but. Avec leurs deux réussites, les arrières du Tricolore comptent 14 buts depuis le début de la saison. Ça leur vaut le 32e et dernier rang de la LNH, derrière Toronto, Pittsburgh et Vancouver (17 chacun). Ajoutons qu’à eux seuls, Erik Karlsson (17) et Dougie Hamilton (15) ont marqué plus souvent que tous les défenseurs du Tricolore réunis.

Choisir son moment

À la base, le Tricolore ne regorge pas de défenseurs résolument offensifs. Matheson et Barron sont les deux plus doués à cet égard, mais le premier a raté 34 matchs en raison de blessures, et le second a passé la moitié de la saison avec le Rocket de Laval.

Reste ensuite à apprendre à quel moment appuyer l’attaque. Après sept saisons dans la LNH, Matheson comprend mieux quand il peut se compromettre. En prolongation, par exemple, la question se pose moins.

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Justin Barron (52)

Barron, lui, disputait seulement son 22match dans le circuit Bettman. Il apprend donc encore à lire les situations, et il lui arrivera de se brûler. Mais pas lors de son but, en troisième période. Quand il a vu Zach Parisé et Jean-Gabriel Pageau s’enfarger près de la rampe en zone du CH, il a déguerpi et poussé un cri entendu jusqu’à la passerelle pour annoncer qu’il était démarqué.

« J’ai vu la mise en échec, ils avaient deux joueurs pris dans notre zone et j’avais un pas d’avance sur mon gars. On avait un deux contre deux et j’avais une zone au complet devant moi. Dadonov a fait un beau jeu », a-t-il expliqué.

Son explication rejoignait les propos que Martin St-Louis allait fournir quelques minutes plus tard. L’entraîneur-chef mentionne souvent que ses joueurs doivent « se rendre sur les buts », une façon de souligner l’importance des jeux simples. Mais ils peuvent aussi tenter le circuit.

« Des fois, quand un défenseur peut appuyer l’attaque, c’est un coup de circuit. S’ils sont frais, s’ils ont de l’énergie, il faut qu’ils y aillent. Il faut qu’ils nous aident à avoir un avantage numérique à cinq contre cinq, pour qu’un deux contre deux devienne un trois contre deux. Des fois, tu n’as pas l’énergie d’y aller et c’est correct. »

Savard dans l’ombre

Barron est donc en plein apprentissage et son jumelage avec Matheson ne devrait pas lui nuire à cet égard.

Cela dit, si Barron a amorcé la saison dans la Ligue américaine, c’était pour peaufiner son jeu d’ensemble. Il a eu droit à toute une démonstration de David Savard.

Le défenseur à la barbe hirsute a en effet passé la quasi-totalité de la prolongation (3 min 55 s sur 4 min 38 s) sur la patinoire, d’abord à forces égales, puis en infériorité numérique. Le temps d’arrêt demandé par les Islanders lui a certes permis de souffler, mais sa présence demeure impressionnante. Il s’est vu attribuer deux tirs bloqués, mais sa présence dans les axes de tirs a certainement dissuadé les visiteurs de viser le filet à quelques reprises.

« Si moi, j’étais essoufflé, je me demande comment lui, il était ! a souligné le gardien Samuel Montembeault. Il a bloqué des tirs, et quand il ne les bloquait pas, il s’arrangeait pour que je puisse voir venir la rondelle. »

Barron ne deviendra jamais le type de défenseur effacé qu’est Savard. Ils n’ont pas la même carrure, les mêmes atouts. Mais le Néo-Écossais croit quand même pouvoir s’améliorer en observant son confrère maskoutain.

« Les tirs bloqués passent peut-être inaperçus avec ce qui s’est passé après, mais c’est énorme, a noté Barron. Il le fait tous les soirs et c’est tellement important. Il y a plusieurs aspects de son jeu dont je peux m’inspirer. Il a été un mentor pour moi, et un bon coéquipier. »

C’est là un énième rappel de ne pas larguer tous les vétérans, à tout prix, dans un processus de reconstruction.

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En hausse : Josh Anderson

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Josh Anderson (17)

Son association avec Nick Suzuki et Rafaël Harvey-Pinard semble lui faire du bien. Son gabarit l’a bien servi sur le but de Suzuki, alors que deux rivaux tentaient de lui enlever la rondelle.

En baisse : Jordan Harris

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Jordan Harris (54)

Pas une journée facile au travail pour le défenseur recrue, même s’il la termine avec un rendement de + 1. C’est pendant sa pénalité que les Islanders ont inscrit leur deuxième but du match.

Le chiffre du match : 4

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Mike Hoffman (68)

Mike Hoffman compte maintenant quatre points (deux buts, deux passes) en prolongation cette saison. C’est près de 20 % de sa production de 21 points.

Dans le détail

Interminable suspense

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Les joueurs du Canadien célèbrent leur victoire après un moment de suspense.

Que faisiez-vous entre 15 h 08 et 15 h 15, samedi après-midi ? Si vous étiez au Centre Bell, vous attendiez le verdict sur le but marqué en prolongation. De longues minutes ont été nécessaires avant que l’arbitre annonce que Mike Hoffman était entré en zone adverse en toute légalité en prenant le contrôle du disque avec ses patins. La révision du but, demandée par la LNH, a semblé prendre les Islanders par surprise, car joueurs et entraîneurs étaient rendus au vestiaire au moment où la validité du but a été mise en doute. « On nous a dit de revenir », a confirmé Bo Horvat. « Ç’a été décevant deux fois », a renchéri l’entraîneur-chef Lane Lambert, en référence au but lui-même et à sa confirmation. C’était si long, en fait, que la foule a commencé à huer les officiels. Au déplaisir des joueurs du CH. « On voulait leur dire d’arrêter pour que les arbitres ne changent pas leur attitude envers nous ! », a d’ailleurs raconté Mike Matheson, auteur du but. Ça s’est toutefois bien fini, même si l’arbitre a « fait peur » à Samuel Montembeault en disant, en anglais, que le jeu était « onside ». « Je pensais qu’il allait dire “offside”, a dit le gardien. Je me disais : “Ah non…” »

Romanov honoré

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Alexander Romanov met en échec Josh Anderson

Afin de souligner le premier match d’Alexander Romanov au Centre Bell depuis l’échange qui l’a fait passer aux Islanders l’été dernier, le Canadien a présenté, en première période, un montage des meilleurs moments du Russe dans l’uniforme tricolore. La caméra s’est ensuite braquée sur lui et, derrière une visière complète, il a souri de toutes ses dents et salué la foule afin de montrer sa reconnaissance. « C’était vraiment bien, ça me rappelait de bons souvenirs, a-t-il dit après la rencontre. L’énergie et l’atmosphère au Centre Bell sont incroyables. J’étais content de revenir ici. » Le défenseur, en troisième période, a plongé les spectateurs dans un conflit émotionnel lorsqu’il a servi une mise en échec percutante, sa spécialité, à Josh Anderson, qui s’est retrouvé les quatre fers en l’air. Personne n’a été blessé sur le coup, alors pas de rancœur. Romanov est par ailleurs nouvellement papa. Il a assuré que la petite famille allait bien et trouvait ses repères. La Presse s’est enquise de la qualité de son sommeil avec un nouveau-né. Tout sourire, Romanov a répondu qu’il ne pouvait pas se plaindre.

Des bleus pour RHP

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Rafaël Harvey-Pinard (49)

Le réveil risque d’être douloureux pour Rafaël Harvey-Pinard, dimanche matin. Il a en effet bloqué cinq lancers. Depuis que cette statistique est compilée en 2005-2006, seulement 16 performances de cinq tirs bloqués ou plus par un attaquant ont été rapportées chez le Canadien. Et on pourrait certainement retirer du lot le nom de Mathieu Dandenault, présent cinq fois, puisqu’il jouait à la fois en attaque et en défense dans une même rencontre. Au-delà du chiffre sur la feuille de match, ce sont aussi les situations dans lesquelles s’est retrouvé Harvey-Pinard qui forcent l’admiration. En deuxième période, il a dû retraiter momentanément au vestiaire pour chasser la douleur. Dès la présence suivante, il a bloqué un autre tir. « Je me rappelle en avoir vu deux ou trois dans les chevilles, a noté Samuel Montembeault. Il n’a pas peur, il va dans les lignes de tir. » « Il y a une grosse différence entre être un jeune homme qui joue au hockey et être un joueur de hockey, a pour sa part souligné Martin St-Louis. Harvey-Pinard, c’est un joueur de hockey. Je ne suis pas surpris qu’il bloque des lancers comme ça. »