Depuis son arrivée comme directeur général du Canadien, Kent Hughes se démarque par une transparence qui n’était pas exactement une force chez ses prédécesseurs.

De Jeff Petry à Ben Chiarot, en passant par quelques vétérans de son effectif actuel, il ne se gêne pas pour aborder de front les enjeux reliés à des joueurs susceptibles d’être échangés.

C’est peut-être cette façon de faire qui donne plus de poids à la déclaration qu’il a faite au sujet de Samuel Montembeault, lors de son bilan de mi-saison, mercredi. Le gardien connaît du succès cette saison et son salaire de 1 million de dollars, jusqu’à l’été 2024, pourrait bien intéresser des clubs à la recherche de profondeur devant le filet. Est-ce donc une option ?

« On veut le garder », a rétorqué Hughes, avant d’ajouter que « Sam ne s’en va nulle part ». Sauf à Montréal, on en déduit.

La question se pose parce qu’en mai, Hughes affirmait qu’aucun gardien dans l’organisation n’avait démontré, à ce jour, qu’il était un futur numéro 1 dans la Ligue nationale. Qu’en est-il huit mois plus tard ? Les plaques tectoniques ont certainement bougé depuis cette entrevue qu’il avait accordée au 91,9 Sports.

L’été dernier, Montembeault signait son présent contrat de deux ans, une entente suivie en octobre par un pacte avec Jake Allen de deux ans, à 3,85 millions par saison, qui couvrira les saisons 2023-2024 et 2024-2025.

Jusque-là, rien d’anormal. Allen est un vétéran de 32 ans qui, sans être un véritable gardien numéro 1, peut rendre de fiers services à une équipe dans un partage des tâches équilibré.

Montembeault, lui, a maintenant 26 ans. Les nombreuses blessures la saison dernière lui ont permis de disputer 38 matchs à Montréal, lui qui ne comptait que 25 rencontres d’expérience dans la LNH avant cela. L’apprentissage a toutefois été rude, et une blessure à un poignet ne l’a pas aidé ; il a bouclé la dernière saison avec une moyenne de 3,77 et une efficacité de ,891.

C’est toutefois depuis le début de la présente campagne que la donne a changé. Les performances de Montembeault sont supérieures à celles du vétéran qui, de surcroît, est maintenant aux prises avec une blessure.

Les statistiques de Jake Allen et de Samuel Montembeault

Moyenne

  • Allen : 3,52
  • Montembeault : 3,05

Efficacité globale

  • Allen : ,892
  • Montembeault : ,912

Efficacité en désavantage numérique

  • Allen : ,855
  • Montembeault : ,870

Efficacité contre les chances de marquer de haute qualité*

  • Allen : ,800
  • Montembeault : ,841

* Source : NaturalStatTrick

Cela dit, il y a une différence entre être un gardien numéro 1 dans la LNH et être le gardien numéro 1 du Canadien de 2022-2023, une équipe en processus assumé de reconstruction, qui joue dans un marché qui ne s’attend pas à une participation aux séries.

De plus, même s’il a été performant, Montembeault n’a disputé que 18 matchs cette saison, un échantillon bien mince pour faire des projections. C’est pourquoi Martin St-Louis disait après le match de mardi ne pas avoir « assez d’informations » pour statuer que Montembeault est un gardien numéro 1.

Hughes a lui aussi appelé à la prudence. « Il connaît une très bonne séquence. Il est encore jeune pour un gardien dans la LNH, a rappelé le DG. C’est difficile de penser qu’on peut prédire son avenir avec une si petite séquence. On voit le potentiel, mais il a encore des choses à vivre comme gardien. »

Et les autres ?

Le réalisme de Hughes est d’autant plus crédible que l’équipe n’a, du moins statistiquement, aucun prodige en devenir dans son réseau. Bref, Hughes n’essaie pas de modérer les attentes envers Montembeault parce que le poste est promis à un futur jeune premier.

Après des séries encourageantes avec le Rocket le printemps dernier, Cayden Primeau connaît sa pire saison dans la Ligue américaine, avec une moyenne de 3,65 et une efficacité de ,890. Sa présence avec l’équipe actuellement ressemble bien plus à une aide de dernier recours, puisqu’il ne reste aucun autre gardien avec un contrat de la LNH dans l’organisation.

Cayden [Primeau] a eu des blessures et il n’a peut-être pas le début de saison qu’il aurait voulu dans la Ligue américaine.

Kent Hughes, directeur général du Canadien

Ailleurs dans l’organisation, le meilleur espoir devant le filet est Jakub Dobes, un Tchèque repêché au 5tour en 2020, qui joue à Ohio State. Dobes avait eu droit à une longue rencontre avec des membres de l’état-major du Tricolore en novembre, lors d’une visite de l’équipe à Columbus. Son cas sera à suivre quand la saison de la NCAA se terminera, en mars.

Mais Dobes aura 22 ans en mai. Entre signer un contrat d’entrée et jouer à temps plein dans la LNH, il peut s’écouler plusieurs années, surtout à la position de gardien. Primeau est justement sorti du collège il y a quatre ans et son potentiel demeure inconnu.

Bref, à moins que Montembeault poursuive sur sa lancée de la présente saison, la solution pour un gardien numéro 1 ne semble pas être dans l’organisation, du moins à moyen terme. Mais la position de gardien est gérée à moyen terme un peu partout. Seulement 10 gardiens détiennent des ententes qui vont au-delà de 2025. Hughes peut donc toujours compter sur le carrousel des gardiens, une fois l’été venu, s’il n’est pas convaincu par ses options à l’interne.