(Washington, DC) Le Capital One Arena n’a pas toujours été un endroit festif. Au milieu des années 2000, quand les Capitals formaient une équipe moribonde et qu’il y avait 5000 sièges vides par match, ce n’était pas très festif.

Avance rapide au 31 décembre 2022, et on pouvait difficilement trouver un meilleur endroit en ville pour fêter l’arrivée du Nouvel An. Pourquoi donc ?

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Les plus cyniques diront que le passage du Canadien y est pour quelque chose.

Les Montréalais sont arrivés dans la capitale américaine avec 15 buts accordés dans les trois derniers matchs, sans trois de leurs défenseurs permanents, et trois heures plus tard, c’est 24 buts permis en quatre matchs. Une équipe locale qui gagne 9-2 comme l’ont fait les Capitals samedi, ça aide à faire « lever le party ».

Les plus superficiels diront qu’un bon platiniste, ça ne nuit pas non plus. Le héros obscur de la soirée a enchaîné les tubes à faire chanter les foules, de My Own Worst Enemy à Wonderwall.

Mais la présence d’un joueur dit générationnel donne sans doute le plus gros coup de pouce. C’est le spectacle auquel les amateurs de hockey de la capitale ont droit depuis l’arrivée d’Alexander Ovechkin en 2005, et curieusement, de 14 000 spectateurs par match, la moyenne des assistances par ici n’est jamais passée sous les 18 000 spectateurs.

PHOTO NICK WASS, ASSOCIATED PRESS

L’ailier droit des Capitals Alex Ovechkin (8) célèbre sans ambages l’un de ses buts contre Jake Allen (34).

Les joueurs générationnels font ça, et bien plus. Ils marquent des buts. Ovechkin en a inscrit trois autres samedi. Il en totalise 26 cette saison, 806 depuis le début de sa carrière.

Les joueurs générationnels sont adulés des partisans, même si leurs opinions politiques font parfois grincer des dents. À l’écran géant, pendant un entracte, on présentait un montage qui documentait la marche d’Ovechkin vers les 802 buts et le 2e rang de l’histoire, devant Gordie Howe. Les chandails du numéro 8 doivent constituer, à vue de nez, la moitié de ceux portés par les partisans.

Jeremy Dixon est justement un de ces partisans au numéro 8, même s’il assure être mal à l’aise avec le soutien d’Ovechkin pour Vladimir Poutine. « Mais je le comprends totalement. Une personne qui vient d’un autre pays, il faut respecter qu’elle ait des vues politiques différentes. Sa famille pourrait être en danger s’il dit quelque chose de fou. Je le crois honnêtement », nous dit-il, dans les coursives du Capital One Arena. C’est ce que les joueurs spéciaux font : ils sont si aimés qu’ils incitent à regarder ailleurs, à ignorer ce qu’on aime moins d’eux.

Cette discussion sur l’impact des joueurs générationnels gagnera Montréal avant longtemps. En plein Championnat du monde junior, un joueur que plusieurs voient comme spécial, Connor Bedard, est en train de réécrire le livre des records du hockey international. Plus le Canadien subira des raclées comme celles de jeudi et celle de samedi, plus il augmentera ses chances d’obtenir le premier choix et de mettre la main sur un joueur qui a le potentiel de transformer la franchise.

On voit très bien ce que les partisans disent sur le repêchage. Tu le vois à la télé, c’est partout. C’est dur de ne pas le voir, surtout dans un marché comme le nôtre. On ne peut pas laisser ça nous affecter. On pousse, on veut gagner, on ne pense pas à l’été. Il ne faut pas que ça rentre dans le vestiaire et je ne pense pas que ça rentre. On a un groupe solide, on aime jouer les uns pour les autres.

Joel Edmundson, défenseur du Canadien

Ce même Edmundson n’a pas connu un grand match, mais à le voir renverser Dylan Strome après un des buts des Capitals, à voir son visage long pendant qu’il attendait de faire ses étirements d’après-match dans un corridor à la sortie du vestiaire, il avait effectivement l’air d’un gars pas particulièrement enchanté par la défaite.

Perdre 9-2, « c’est nul, a lancé Josh Anderson, après le match. On ne s’attendait pas à ça, mais personne ne va nous prendre en pitié. On doit trouver les solutions. »

Les Capitals ne les ont pas pris en pitié, en effet. Quand Marcus Johansson a fait sa plus belle imitation de Gaétan Boucher en tournant en rond en zone offensive avant de marquer, il ne les prenait pas en pitié. Tout au plus, les Capitals ont célébré avec modération, quand le pointage est devenu gênant pour les Montréalais.

« On est des gars fiers, a assuré Martin St-Louis. Ce n’est pas une équipe facile à affronter. Ça prend une personne qui manque une lecture et ça ouvre le jeu, et ils sont forts quand t’ouvres le jeu. »

Les joueurs passaient le 31 à Washington, la plupart avec leurs mères, avant de prendre la route de Nashville pour le septième et dernier match de cette série de matchs à l’étranger qui ressemble de plus en plus à une traversée du désert. Les mères assisteront également à la rencontre à Nashville.

« Jouer devant nos mères, c’est très symbolique pour nous. On aurait aimé leur offrir des occasions de nous applaudir, a concédé Brendan Gallagher. Mais ce qu’il y a de positif, c’est qu’elles garderont le même amour pour nous. On va célébrer la nouvelle année avec elles. J’ai hâte de voir ma mère. »

En hausse : Kirby Dach

Cole Caufield a marqué deux fois, mais Dach est le meilleur joueur du trio en possession de rondelle. Il est à l’origine de plusieurs des attaques de son trio.

En baisse : Josh Anderson

On a l’embarras du choix ici. Le revirement d’Anderson dans la première minute de jeu a mené au premier but des Capitals.

Le chiffre du match : 35

C’est la 35e fois de sa longue histoire que le Canadien accorde neuf buts ou plus dans un match, mais seulement la deuxième fois au cours du présent millénaire. L’autre fois ? Un certain « scat » novembre au soir, à Columbus, en 2016.

Dans le détail

Un autre match sans Guhle

Kaiden Guhle sera évalué par les médecins du Canadien lors du retour à Montréal en milieu de semaine. Dans l’intervalle, l’équipe a confirmé que le jeune défenseur ratera le prochain match, le dernier de ce voyage, à Nashville le 3 janvier. Rappelons que Guhle s’est blessé à la jambe gauche lors de la défaite de 7-2 jeudi en Floride. En son absence, les minutes en désavantage numérique ont principalement été le mandat de Joel Edmundson et Johnathan Kovacevic, et Justin Barron a également prêté main forte. Le CH a accordé deux autres buts en désavantage numérique dans ce match, pour un total de huit dans les cinq derniers matchs, en 18 occasions. Taux de « succès » : 44,4 %. C’est pour des statistiques du genre que l’interjection « ayoye » a été inventée.

Retirer Allen ou pas ?

La saison dernière, Martin St-Louis avait effectué un changement de gardien à quatre reprises en seulement 37 matchs. Cette saison, il ne l’a toujours pas fait, et il en a eu la chance samedi, dans ce qui était justement le 37e match de son équipe. Jake Allen n’avait certainement pas sa meilleure performance dans le corps, mais il est ingrat de lui lancer la pierre pour avoir accordé un but sur un tir qu’il aurait dû arrêter, quand le territoire du Tricolore est transformé en piste de NASCAR avec Marcus Johansson et Evgeny Kuznetsov qui tournent en rond comme bon leur semble. « Est-ce que j’aurais pu l’enlever à 6-2, à 7-2 ? Peut-être. J’apprends comment gérer ça comme entraîneur. Des fois, avec le voyage des mères, ce n’est pas la même décision qu’en temps normal. À 8-2, il est rendu presque trop tard. Je vais en parler à Jake. Ce n’est pas le fun pour un gardien d’être là pour neuf buts. J’aurais peut-être pu faire une meilleure job pour l’aider, mais j’apprends. »

Le nouveau général

Qui mène les défenseurs des Capitals pour les points cette saison ? Deux morceaux de robot si vous avez répondu Erik Gustafsson. Ce Suédois n’a été que de passage à Montréal, mais il a joué pour le CH pendant sa période la plus glorieuse des 25 dernières années, soit le printemps 2021. Dans son rôle de sixième défenseur — quand ce n’était pas septième —, il n’a toutefois pas vraiment pu laisser sa marque avec le Canadien. Mais Gustafsson a déjà connu une saison de 60 points à Chicago et ses instincts offensifs ressortent pas mal plus depuis son arrivée à Washington. Avec trois points dans le massacre de samedi, il totalise 23 points en 38 matchs. La blessure à John Carlson, défenseur offensif no 1 des Capitals, lui vaut davantage d’occasions en avantage numérique. « Il sort de sa coquille en ce moment, a estimé Peter Laviolette, dans son point de presse d’après-match avec les journalistes qui couvrent les Capitals. Il a un plus gros rôle et il en profite. »

La citation du jour

Honnêtement, j’ai dit des choses bien pires. L’arbitre me fixait du regard. Je lui ai dit : ne me fixe surtout pas de cette façon. C’était comme s’il attendait que je réplique. À ce moment-là, il m’a donné une punition.

Brendan Gallagher, au sujet de sa pénalité pour conduite antisportive en troisième période. Il a aussi admis avoir employé un mot qui commence par « f » dans sa réplique à Frédérick L’Écuyer.