Le Canadien vit une période unique dans son histoire. Pour la première fois en plus d’un siècle, les victoires ne sont pas toujours accueillies avec joie par certains de ses partisans.

À preuve la réaction sur les réseaux sociaux cette semaine aux propos de l’ancien défenseur de la LNH Denis Gauthier, récemment sur les ondes de RDS.

Gauthier disait préférer voir les jeunes joueurs du Canadien lutter pour une place en séries quitte à repêcher au dixième rang plutôt que de se faire démolir match après match et obtenir la chance de repêcher parmi les trois premiers.

« Et d’avoir appris à ces jeunes de disputer des matchs importants tard dans la saison va faire une grande différence dans leur développement à long terme », a-t-il ajouté.

Ses détracteurs ont tenu à rappeler que Nathan MacKinnon, Sidney Crosby et Patrick Kane avaient connu des saisons difficiles eux aussi sans que ça n’altère leur développement.

Or, contrairement aux idées préconçues, ces vedettes ont-elles souffert si longtemps de saisons misérables ? MacKinnon et l’Avalanche ont connu une saison désastreuse, en 2016-2017, où ils ont terminé au dernier rang du classement général. Sinon, ils n’ont jamais terminé sous le 21e rang au classement de la LNH, la position actuelle du CH.

Les Penguins ? Une saison désastreuse, la première de Crosby, en 2005-2006, puis jamais rien de pire que le 15e rang au classement général, et une seule autre fois exclus du top douze.

Chicago ? Entre la première saison de Jonathan Toews, en 2007, et la chute des dernières années, en 2018, ils ont toujours terminé dans le top vingt au classement général, et une seule fois derrière le 12e rang au classement général, à la première année de Toews, un an avant l’arrivée de Kane.

À ses dix premières saisons, Patrick Kane a raté les séries une seule fois… à sa première année. Et encore, par la peau des fesses, puisque Chicago était à trois points seulement des Predators de Nashville, dernier club qualifié.

Contrairement aux idées reçues, Pittsburgh, Chicago et Colorado ont connu leurs années de misère AVANT l’arrivée de leurs jeunes vedettes. Les Toews, Kane, Crosby, Malkin, MacKinnon, Rantanen et compagnie n’ont pas vécu trop longtemps les affres de la défaite.

Repêché deuxième au total en 2006, Evgeni Malkin n’a JAMAIS raté les séries éliminatoires, du moins pas les Penguins, puisqu’une blessure a empêché Malkin de participer aux séries en 2011.

À l’autre bout du spectre, les Sabres de Buffalo et les Oilers d’Edmonton ont dû recommencer leurs reconstructions parce que le moral des jeunes était devenu miné par trop de saisons désastreuses.

Denis Gauthier n’a donc pas tort, au contraire, d’autant plus que l’équipe actuelle du Canadien est remplie de joueurs de 23 ans et moins : Nick Suzuki, Kirby Dach, Cole Caufield, Juraj Slafkovsky, Kaiden Guhle, Jordan Harris et Arber Xhekaj, soit presque le tiers de la formation. Cinq des sept premiers compteurs du club n’ont d’ailleurs pas 24 ans.

Imaginez les dégâts dans le développement si on demandait à ces jeunes de ne pas fournir le plein rendement de façon à espérer la chance hypothétique de repêcher à nouveau au premier rang en 2023 ? Non, ils doivent se frotter à une compétition féroce et obtenir des résultats positifs à l’occasion, de façon à ne pas saper leur moral.

L’histoire serait évidemment différente si Montréal était garnie de vétérans en bout de parcours et cherchait par tous les moyens à lutter pour une place en séries sans espoir véritable de remporter la Coupe Stanley.

Comme les Flyers de Philadelphie, par exemple, dont le directeur général Chuck Fletcher affirmait encore récemment toujours espérer remonter au classement.

Fletcher qui l’an dernier cédait des choix de première et deuxième ronde pour obtenir un défenseur moyen, Rasmus Ristolainen, embauchait Tony DeAngelo pour deux ans et 10 millions et offre des places dans la formation à ses jeunes un peu par défaut.

Malgré tout, les Flyers se retrouvent au 27e rang du classement général et repêcheraient au sixième rang, avec 7,5 % de chance de remporter la loterie, si l’évènement était présenté aujourd’hui. Il ne faudra pas crier au génie s’ils mettent la main sur Connor Bedard, ça n’était pas le plan.

La direction du Canadien ne fera jamais exprès de perdre, mais elle ne prend pas non plus les moyens pour gagner.

On ouvre grand la porte aux jeunes. Kent Hughes et Jeff Gorton n’ont embauché aucun vétéran en défense au cours de la saison morte, même si les effectifs étaient minces. On a donné l’occasion à Jordan Harris, Kaiden Guhle, Arber Xhekaj et Justin Barron de gagner un poste.

On préfère accumuler les choix au repêchage que de les céder. Ainsi a-t-on vu les Ben Chiarot, Tyler Toffoli, Artturi Lehkonen et Brett Kulak quitter dans la dernière année, même s’ils étaient utiles à la formation et encore dans la force de l’âge. Et Hughes restera sans doute fidèle à son plan et écoutera les offres pour Sean Monahan, Josh Anderson, Joel Edmundson et Christian Dvorak même si l’équipe demeure à proximité d’une place en séries.

À moins d’un écrasement total, le Canadien ne repêchera pas Connor Bedard, ni Adam Fantilli. Mais il n’aurait pas eu la garantie non plus de mettre la main sur un des deux en terminant parmi les cinq pires clubs au classement.

Par contre, il s’assure de bien développer les jeunes déjà dans sa formation, et disposera sans doute de deux choix dans le top quinze l’été prochain. Il s’agit du scénario le plus raisonnable.

Un échange qui n’a pas donné ses fruits encore ?

PHOTO PAUL CHIASSON, LA PRESSE CANADIENNE

Jonathan Huberdeau

Les Panthers de la Floride et les Flames de Calgary ont terminé au premier rang de leurs divisions respectives l’an dernier, et survolé le classement général, avec 122 et 111 points respectivement, tout en remportant une ronde de séries éliminatoires.

Elles ont néanmoins arraché le cœur de leurs équipes avec l’échange de l’année dans la LNH impliquant deux compteurs de plus de 100 points, Jonathan Huberdeau et Matthew Tkachuk.

L’échange n’a pas fourni l’effet escompté pour ces deux équipes. Si les séries commençaient aujourd’hui, Flames et Panthers en seraient exclus.

Or, ces deux clubs ont procédé à cette transaction d’importance dans un contexte particulier. Les Panthers voyaient l’autonomie complète de Huberdeau et du défenseur MacKenzie Weegar approcher. Les Flames allaient perdre Johnny Gaudreau sur le marché des joueurs autonomes et Matthew Tkachuk avait manifesté son désir de quitter Calgary.

À long terme cependant, il faut donner l’avantage aux Panthers. Ils ont mis la main sur le plus jeune joueur du groupe, Tkachuk, 25 ans depuis quelques jours, déjà 39 points en 28 matchs.

Le DG des Flames Brad Treliving a dû justifier son échange en accordant des contrats à long terme à Huberdeau et Weegar de façon à les retenir. Il a donné beaucoup, beaucoup d’argent, pour des joueurs à l’aube de la trentaine. Huberdeau tarde à produire avec seulement 18 points, dont 5 buts, en 27 matchs. Weegar a sept passes en 27 matchs.

Les Flames ont reçu un choix de première ronde en 2025 des Panthers, mais ils ont gaspillé le leur en 2024 pour se débarrasser du contrat de Sean Monahan et ainsi embaucher Nazem Kadri, 32 ans.

À ne pas manquer

1- Il est question d’arbitrage, d’arbre et de forêt dans l’analyse du match de Simon-Olivier Lorange, mercredi soir, dans cette défaite de 3-2 du Canadien contre les Sénateurs.

2- Alexandre Pratt a regardé le match France-Maroc du côté des partisans français à la Coupe du monde de soccer. Marc Cassivi, dont on peut retrouver la chronique dans la même page, a visité les fans marocains.

3- Nicholas Richard a pris des nouvelles de notre illustre Gabrielle Carle, désormais membre du Spirit de Washington, dans la National Women’s Soccer League, après une première expérience en première division suédoise.