Le cerveau humain aura toujours le réflexe de faire des associations. Le fan de hockey n’en est évidemment pas épargné.

Parce que Jesperi Kotkaniemi et Alex Galchenyuk ont constitué de très hauts choix au repêchage, parce qu’ils ont commencé leur carrière avec le Canadien dans la LNH à 18 ans avant de voir leurs performances décliner, certains craignent qu’il n’arrive la même chose à Juraj Slafkovsky.

C’est du moins l’argument souvent utilisé par ceux qui préféreraient le voir se joindre à l’équipe nationale slovaque en prévision du Championnat du monde junior. Comme si le fait de passer l’hiver à Montréal allait donner à Slafkovsky la déveine des deux premiers.

Il s’agit pourtant de trois êtres humains à la personnalité, au gabarit, au style de jeu, au contexte et à l’environnement bien distincts.

Alex Galchenyuk a profité du lockout pour bénéficier de 33 matchs supplémentaires dans les rangs juniors à l’automne 2012. Il a aussi participé au Championnat mondial junior avec les Américains avant de joindre le Canadien de Michel Therrien, à trois semaines de ses 19 ans.

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Alex Galchenyuk dans l’uniforme du Canadien, en 2013

Aurait-il pu demeurer dans les rangs juniors cette saison-là ? Peut-être, mais il a néanmoins connu une très bonne première année, 27 points en 48 matchs, une production de 46 points sur une saison complète.

Après une troisième saison de 20 buts et 46 points, à 21 ans, il a connu sa première année de 30 buts, et 56 points, à sa quatrième saison. À ses 418 premiers matchs en carrière, Galchenyuk avait amassé 255 points, une moyenne de 50 points par saison.

À cette étape-ci de sa carrière, à 24 ans, aucun joueur de la cuvée 2012 n’avait amassé plus de point qu’Alex Galchenyuk.

Mais pour une multitude de facteurs, entre autres son incapacité à jouer au centre, alors qu’on nous l’avait vendu comme le « prochain », et des soucis de professionnalisme, Galchenyuk a été échangé aux Coyotes pour Max Domi en 2018.

À compter de là, sa carrière a périclité de façon vertigineuse : il a changé d’équipe six fois et obtenu 99 points en 229 matchs. Il vient d’être abandonné à nouveau, cette fois par l’Avalanche du Colorado, qui lui a préféré Charles Hudon.

Malgré ses déboires, Galchenyuk demeure au cinquième rang des compteurs de sa cuvée derrière Filip Forsberg, Tomas Hertl, Morgan Rielly et Teuvo Teravainen. Mais là n’est pas le point. Sa carrière ne tourne pas à la catastrophe parce qu’il a commencé sa carrière dans la LNH à 18 ans, à preuve ses 30 buts quatre ans plus tard, mais parce que la machine s’est déréglée autour de sa sixième saison, par un manque de compréhension du jeu, toujours flagrant, et un manque de sérieux.

Jesperi Kotkaniemi a entamé sa carrière à 18 ans, pour Claude Julien. Il a amassé 34 points à sa première année, seulement trois de moins qu’Andrei Svechnikov, deuxième choix au total en 2018 devant lui et appelé à jouer dans la LNH à 18 ans lui aussi.

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Jesperi Kotkaniemi, en 2018

C’est aussi sept points de plus que Jack Hughes, toutes proportions gardées, à sa première saison, et six de plus que Kirby Dach.

Le Finlandais a racheté une deuxième saison plus difficile en marquant quatre buts en dix matchs de séries éliminatoires en 2020. Il connaissait d’excellentes séries en 2021 et semblait sur une lancée, avec huit points, donc cinq buts, en 19 matchs, avant d’être rayé de la formation en finale.

C’était une période où les recrues n’avaient pas une très grande marge d’erreur. Jesperi Kotkaniemi et Cole Caufield avaient entamé les séries dans les estrades, rappelons-nous.

Sans doute amer envers la direction du CH, Kotkaniemi a finalement accepté l’offre qualificative des Hurricanes de la Caroline en 2021 et, depuis, doit vivre avec la pression d’un jeune joueur ayant reçu 44,7 millions pour neuf ans sans avoir fait ses preuves.

À 22 ans, il tente toujours de lancer sa carrière, toujours au centre d’un deuxième trio, entre Svechnikov et Teravainen, avec un temps d’utilisation de plus de 15 minutes par rencontre, mais peu de production offensive avec seulement six points en 27 matchs.

Kotkaniemi déçoit-il parce qu’il a entamé sa carrière trop tôt ? Parce qu’il a été mal encadré ? Parce qu’il n’est pas réceptif aux enseignements ? Parce que son contrat lui impose trop de pression ?

Cole Caufield, lui, est arrivé dans la LNH à 20 ans. Serait-il encore ce jeune compteur en difficulté d’un seul but en 30 matchs si l’environnement n’avait pas changé à Montréal ?

Faut-il absolument laisser un jeune joueur dans les rangs juniors plus longtemps et, ou, la Ligue américaine, et le prêter à son équipe nationale junior, pour s’assurer d’une réussite ?

Jack Hughes, premier choix au total en 2019, n’a pas été prêté à son équipe nationale junior. Il a obtenu 21 points seulement en 64 matchs à sa première année. Il en compte 33 en 27 rencontres aujourd’hui.

Un autre premier choix, Rasmus Dahlin, n’a pas été prêté lui non plus par les Sabres. Il a connu des premières années plus difficiles au plan défensif. Il est devenu aujourd’hui l’émule de Victor Hedman.

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Le défenseur des Sabres, Rasmus Dahlin

Andrei Svechnikov a lui aussi joué dans la LNH à 18 ans sans participer au Championnat mondial junior cette année-là. Il a 104 buts déjà en carrière.

Nico Hischier, premier choix au total en 2017, a fait le saut directement à 18 ans également. Pas de Championnat mondial junior après avoir été repêché. À 23 ans, il compte 28 points en 26 matchs avec les Devils.

Sixième choix au total en 2018, Barrett Hayton, lui, a participé à ce Championnat après avoir même disputé une saison supplémentaire dans les rangs juniors à 18 ans. Il a été prêté à l’équipe canadienne à 19 ans après avoir entamé la saison dans la LNH avec les Coyotes. Il y a dominé avec 12 points en 7 matchs. Depuis ? La panne sèche. Trois aides en 26 matchs cette saison, 24 points en 60 matchs l’année précédente.

Kirby Dach avait lui aussi été prêté au Canada à sa deuxième saison chez les pros, à 19 ans. Il s’est blessé lors d’un match préparatoire, n’a pas participé au Championnat mondial junior et sa blessure lui a fait perdre presque un an, avant d’être échangé au Canadien.

Le prêt en 2021 semble avoir été bénéfique à Dylan Cozens, septième choix au total en 2019, dont la carrière est en ascension depuis.

Ne cherchons pas LA recette. Il y en a mille. Laissons au CH le soin de gérer Juraj Slafkovsky. La nouvelle administration ne semble pas s’en tirer trop mal avec les jeunes.

Le choix des Panthers devient encore plus intéressant…

Avec une autre défaite dimanche, contre Seattle, une neuvième en 13 matchs, le choix des Panthers de la Floride obtenu pour Ben Chiarot devient de plus en plus intéressant. Si le repêchage avait lieu aujourd’hui, le CH repêcherait au 11e rang avec ce choix des Panthers et au 12e rang avec le sien. Le choix de la Floride se retrouve aussi dans une zone intéressante, puisqu’il permettrait au Canadien de choisir premier s’il remporte la loterie. Les chances demeureraient de seulement 3 %, mais un club ne peut désormais pas avancer de plus dix rangs s’il remporte le gros lot. À l’heure actuelle, Montréal pourrait au mieux repêcher deuxième s’il remportait la loterie avec son choix.

Montréal a aussi obtenu Ty Smilanic, un jeune homme décevant cet hiver, et un choix de quatrième ronde (Cédrick Guidon, étonnant dans les rangs juniors avec 36 points en 29 matchs).

Le DG des Panthers, Bill Zito, doit se croiser les doigts. Il lui faut espérer gagner non seulement dans l’espoir de participer aux séries éliminatoires, mais aussi ne pas courir le risque de porter l’odieux d’avoir offert Connor Bedard au Canadien pour Ben Chiarot…

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