Ces jours-ci, Claude Julien est en Suisse, et ce n’est pas pour faire du tourisme.

Au cours des prochains jours, il n’y aura pas de dégustations de chocolat ou de balade dans les Alpes. Au cours des prochains jours, il y aura pour Claude Julien du hockey, encore du hockey, parce qu’on peut sortir le gars du coaching, mais on ne peut pas sortir le coaching du gars.

« Je suis ici pour faire de la consultation seulement, commence-t-il par préciser au bout du fil, fraîchement descendu de l’avion. Je viens d’arriver à Genève et je vais être en Suisse pendant une dizaine de jours, parce qu’on me l’a demandé. »

Ceux qui le lui ont demandé, ce sont les dirigeants du club Ambrì-Piotta, qui voulaient obtenir ses précieux conseils avant l’arrivée des Fêtes. Il sera derrière le banc, comme il se doit, comme il en a l’habitude. « Pas pour diriger, juste pour partager mes observations entre les périodes », précise-t-il encore.

Un nouveau poste, sans tambour ni trompette

Il s’agit d’une avenue, une autre, pour celui qui n’allait pas demeurer loin de la glace. D’ailleurs, la dernière fois qu’on l’a croisé, c’était sur la passerelle du Centre Bell, où il se rend à l’occasion à titre de dépisteur professionnel pour les Blues de St. Louis, un nouveau poste que personne n’a annoncé en grande pompe, pas même lui.

Julien lui-même ne parle pas d’un poste, plutôt d’une entente « verbale et amicale » avec le directeur général des Blues, Doug Armstrong, qu’il connaît bien.

« Je me promène, je vais au Centre Bell, l’autre fois je suis allé voir le Rocket à Laval, enchaîne-t-il. Je ne suis pas en train de me chercher activement un autre poste d’entraîneur dans la LNH. Il faudrait que ce soit la bonne situation. Je ne reste pas chez moi à attendre que le téléphone sonne… »

Ce téléphone, au fait, a-t-il sonné ?

« J’ai eu des discussions avec quelques équipes, je ne vais pas entrer dans les détails… C’est sûr que le coaching, ça reste en moi ; quand je regarde des matchs, je fais du dépistage, mais en même temps, je regarde ça avec les yeux d’un entraîneur : quels sont les joueurs qui sont employés dans tel aspect du jeu, quel trio joue contre quel autre trio… Ça reste en toi, ça. J’imagine que c’est comme un journaliste qui se demande chaque jour ce qu’il va écrire le lendemain ! »

Quand j’ai été congédié par le Canadien [le 24 février 2021], j’ai décroché complètement, sans doute pour la première fois depuis 1993, quand j’ai commencé à coacher dans le hockey mineur. Ça m’a fait du bien de pouvoir faire le vide.

Claude Julien

Parce qu’il a fait le vide, en effet : temps en famille, randonnées de ski, de motoneige, voyages… « Quand tu diriges des équipes dans la LNH, tu ne te rends pas compte à quel point tu es brûlé. Parce que tu es embarqué là-dedans à fond. Tu dois toujours penser en fonction de trouver des solutions. »

Un divorce à l’amiable

De son propre aveu, le divorce avec le Canadien s’est effectué de façon amicale. Au moment de rentrer chez lui, Julien n’a pas cherché à éviter tout ce qui était bleu-blanc-rouge. D’autant que l’équipe était sur le point de vivre le printemps magique que l’on sait.

PHOTO DAVID BOILY, ARCHIVES LA PRESSE

Claude Julien dirigeant un entraînement du Canadien en janvier 2021

« Quand je suis parti, on a vu à peu près le même club pour le reste de la saison, c’est-à-dire un club de ,500. Mais les gars sont passés à une autre vitesse en arrivant dans les séries. J’ai regardé les matchs du Canadien sans amertume. Ce qui m’est arrivé, ça fait partie du hockey ; les coachs se font congédier, c’est comme ça. J’étais content pour eux.

« Il y a des jeunes qui n’étaient pas là au moment de mon départ, comme [Cole] Caufield. J’ai eu la chance de diriger [Nick] Suzuki, je savais déjà qu’il allait être un bon joueur. Plus tard, j’ai vu aller [Juraj] Slafkovsky aux Jeux olympiques, aux Championnats du monde, et je savais que le Canadien avait fait le bon choix au dernier repêchage. Il a tout ce qu’il faut pour réussir. »

C’est un peu tout ça qui fait dire à Claude Julien que son ancien club s’en va « dans la bonne direction ». Il le dit sans aucune animosité, sans aucune rancœur, avec le ton franc de celui qui est passé à autre chose.

Il répète qu’il n’est à la recherche de rien, et on peut le comprendre. À 62 ans, il est déjà passé par la grande scène des Jeux, par celle de la Coupe du monde. Il a sa bague de la Coupe Stanley, et surtout, il a retrouvé la santé, après avoir subi un malaise cardiaque à l’été 2020.

Alors le téléphone sonnera, ou peut-être pas, mais peu importe. Claude Julien n’est pas pressé. En attendant, il va profiter de l’air frais de la Suisse, mais pas trop, lui qui y avait subi un accident de luge lors d’une activité d’équipe en marge des Jeux d’hiver de février dernier.

Presque un an plus tard, il trouve le moyen d’en rire.

« Je vais me tenir loin des luges… Je pense que cette fois-ci, je vais me contenter de marcher entre l’hôtel et les arénas ! »