(Calgary) Darryl Sutter n’est pas l’orateur le plus éloquent, mais il a le sens de la formule.

On l’a constaté une nouvelle fois à son point de presse de mercredi, après l’entraînement des Flames à la veille de la visite du Canadien, au Saddledome de Calgary.

Le confrère François Gagnon demandait à Sutter quelle était la valeur de Sean Monahan pour une équipe comme le Canadien, en phase de rajeunissement. Au risque de se répéter, le Tricolore compte cinq recrues permanentes dans sa formation, en plus de Cole Caufield, qui jouera seulement – dur à croire – son 100match de saison dans la LNH jeudi. D’autres recrues se grefferont à l’effectif l’an prochain.

Et comme Monahan est en dernière année de contrat, et comme un centre de gros gabarit capable de générer de l’attaque est susceptible d’intéresser les équipes en vue des séries, Kent Hughes recevra assurément des offres difficiles à refuser.

Mais il y a aussi une valeur à retenir Monahan à Montréal, valeur que Sutter a résumée ainsi.

« Il y a trois choses très importantes dans une phase de changement, a répondu le vétéran entraîneur-chef. Numéro 1 : de bonnes personnes. Numéro 2 : de bons coéquipiers. Numéro 3 : de bons compétiteurs. »

Puis il a pris un crayon imaginaire. « Check, check, check », cochant des cases tout aussi imaginaires.

De retour en santé

Monahan a été repêché au 6rang en 2013. Avant que les Flames offrent à Hughes un choix de premier tour pour qu’il daigne accepter la dernière année de contrat de l’attaquant, Monahan avait disputé les 656 premiers matchs de sa carrière à Calgary. Jeudi, il affrontera les Flames pour la première fois.

Sa carrière s’est essentiellement déroulée en deux temps, après une première saison tranquille (34 points). De 2014-2015 à 2018-2019, il a marqué entre 27 et 34 buts, a amassé entre 58 et 82 points chaque saison.

Ce fut ensuite une lente dégringolade, jusqu’à une maigre récolte de 8 buts et 15 aides en 68 matchs l’an dernier.

Ce qui s’est passé entre-temps ? Une opération à une hanche en 2021, une autre en avril dernier.

Tyler Toffoli a été le cochambreur de Monahan dans le junior à Ottawa, et a été brièvement son coéquipier en fin de saison dernière, après que le Canadien l’eut échangé aux Flames.

« Je suis un des joueurs qui arrivent parmi les premiers à l’aréna le matin et il était toujours ici avant moi, même quand il ne jouait pas. Il faisait tout en son pouvoir pour jouer. C’est un vrai pro. Ce n’était pas facile physiquement ni mentalement », a noté le numéro 73.

Dillon Dube fait quant à lui partie de l’organisation depuis que les Flames l’ont repêché en 2016. Mais il a grandi à Calgary et a donc connu, en tant que partisan, le Monahan en santé. Quand il est devenu permanent chez les Flames, il côtoyait toutefois le Monahan magané.

« J’ai vu à quel point il rendait cette organisation excitante. Il a été très bon ici, note Dube. C’est un des plus grands guerriers avec qui j’ai joué. Il ne se plaignait jamais et il travaillait toujours fort, sur la glace et à l’extérieur. »

PHOTO LARRY MACDOUGAL, ARCHIVES LA PRESSE CANADIENNE

Dillon Dube et Sean Monahan

Les problèmes de hanche de Monahan l’ont évidemment ralenti. « C’était dur, mais ça montre à quel point il a du caractère, à quel point il voulait jouer et comment c’était déchirant pour lui de rater des matchs, poursuit Dube. Il voulait rester avec nous, pousser pour les séries. C’était un élément important de notre équipe. Il montrait du leadership. »

Pour Sutter, si Monahan avait eu en poche un contrat à long terme, « ç’aurait été un capitaine ».

Sauf que voilà, l’été dernier, les Flames ont jugé qu’ils avaient fait le tour du jardin avec Monahan. Ils ont donc échangé leur joueur de 28 ans au CH pour se défaire de sa dernière année de contrat, à 6,375 millions de dollars. L’argent épargné a aussitôt servi à offrir à un autre centre, Nazem Kadri, 32 ans, une entente de sept saisons à 7 millions de dollars par année.

Après 22 matchs, Kadri compte 15 points ; Monahan en totalise 14. Les deux montrent un différentiel de - 6. Les deux jouent 17 minutes par match.

Il faudra quelques années avant de savoir si les Flames ont misé sur le bon cheval. Et d’ici à la date limite des transactions, ce sera à Kent Hughes à prendre position.

Mais si ses problèmes de hanche sont bel et bien derrière lui, si Sutter et les joueurs des Flames ne nous ont pas bourré le crâne au sujet du leadership de Monahan, le DG aura de bonnes questions à se poser avant d’expédier son vétéran ailleurs afin de dénicher un choix au repêchage.