Plus de 11 minutes en avantage numérique et seulement quatre tirs : pas de but. Cinquante-sept secondes à 5 contre 3 : aucun tir. C’est bien beau de se faire offrir des chances. Encore faut-il en profiter.

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Malgré six punitions des Sharks de San Jose, le Canadien s’est incliné par la marque de 4-0 à domicile, mardi soir.

Il faut dire que le CH n’était pas en bonne posture pour remporter une bataille des unités spéciales. Avant la rencontre, il se classait au 29e rang de la LNH en avantage numérique. Les Sharks, eux, étaient bons premiers en désavantage numérique.

Nick Suzuki est probablement celui qui a résumé la situation de la meilleure façon, après la rencontre : « L’avantage numérique nous a laissé tomber ce soir », a dit le capitaine.

Encore et encore, le Canadien s’est installé en territoire adverse, faisant circuler la rondelle en périphérie, sans trouver le moyen d’attaquer le but de Kaapo Kähkönen. Était-ce un manque de créativité ? Un trop bon travail défensif des Sharks ? Probablement un peu des deux.

« Tu as besoin d’équilibre. Tu ne peux pas juste attendre le tir parfait, a soulevé Martin St-Louis. Tu dois avoir comme mentalité de tirer au but. Si tu passes la rondelle six, sept ou huit fois avant de tirer, je ne pense pas que tu seras efficace. »

En retard 1-0, le Tricolore s’est vu offrir 57 secondes à 5 contre 3 pour amorcer la troisième période, mais n’a jamais passé proche d’égaler la marque.

« Nous avions un plan, nous ne l’avons juste pas exécuté », a expliqué l’entraîneur-chef.

Suzuki, qui marque souvent du haut du cercle gauche, cafouillait plus souvent qu’autrement avec la rondelle.

« Après quelques chances manquées, tu essaies de forcer les choses un peu au lieu d’être patient », a-t-il évoqué.

« Je n’arrêtais pas de regarder sur l’iPad pour essayer de comprendre des choses pendant le match. Je ne sais pas combien de chances nous avons eues en avantage numérique, mais suffisamment pour marquer, c’est certain. »

Au-delà du plan qui n’a pas fonctionné, il y a un adversaire qui s’est bien défendu. Le Canadien a atteint le filet 28 fois pendant la rencontre. Les Sharks ont bloqué 28 autres rondelles en défense.

« C’est difficile de créer du momentum et des vraies chances quand ils bloquent des tirs comme ça », a mentionné Mike Matheson.

Manque de finition

Quand les choses ne se passent pas comme souhaité en avantage numérique, il faut, nécessairement, trouver une façon de marquer à cinq contre cinq.

Les choses avaient plutôt mal commencé à ce chapitre, alors que le CH a accordé un but dans les deux premières minutes du match. C’est un peu un scénario qui se répète : récemment, il a fait la même chose contre les Sabres de Buffalo (trois buts dans les trois premières minutes, dont deux dans la première minute) et les Flyers de Philadelphie (deux buts dans les trois premières minutes).

« Ç’a été mon trio les trois dernières fois, a reconnu Suzuki. Je ne sais pas c’est quoi [le problème]. […] Tu ne veux pas donner un but dans les deux premières minutes à tous les matchs. Nous devrons arrêter ça. »

Le Canadien avait inversé la tendance à l’étranger. « Nos départs des deux derniers matchs étaient excellents, a même noté St-Louis. À la maison, on a peut-être un petit peu de… nervosité. Je ne sais pas, c’est peut-être ça. On va essayer d’être moins stressé avant le début d’une partie. »

Le CH a ensuite dominé à cinq contre cinq pendant une bonne partie de la rencontre, sans jamais concrétiser. Et ce qui devait arriver, arriva : en quelques minutes en début de troisième période, les Sharks ont profité d’erreurs défensives pour creuser leur avance.

St-Louis a néanmoins parlé d’un jeu à cinq contre cinq « très encourageant ». « On ne leur a pas donné beaucoup d’espace. Dans notre zone, on s’est bien défendus. […] Notre game à 5 contre 5 n’est pas parfaite, mais elle s’en vient meilleure, plus constante. »

L’entraîneur-chef a affirmé que son équipe tirerait des leçons de ce match. C’est une remarque qu’il fait généralement après les défaites de son équipe ; il l’avait notamment formulée après un revers face aux Devils du New Jersey, il y a deux semaines. À la différence que, cette fois-là, c’était contre une des meilleures équipes du circuit. Et non contre une des pires…

En hausse : David Savard

PHOTO FRANÇOIS ROY, LA PRESSE

David Savard

Il n’était sur la patinoire pour aucun but des Sharks et a dirigé trois rondelles au filet.

En baisse : Mike Matheson

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Mike Matheson

Il a cafouillé à plusieurs reprises avec la rondelle, ce qui a notamment mené au deuxième but des Sharks.

Le chiffre du match : 141 min 14 s

Nombre de minutes consécutives sans but du Canadien contre les Sharks au Centre Bell.

Dans le détail

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Tomas Hertl a marqué deux buts dans la victoire des Sharks.

Du hockey « gagnant »

À quelques heures du match, l’entraîneur-chef des Sharks, David Quinn, avait noté que son équipe jouait « du bon hockey », mais pas « du hockey gagnant ». Le pilote avait donc de quoi sourire après la rencontre, alors que son équipe, loin de disputer un match parfait, avait totalement muselé l’attaque du CH. « On aurait pu resserrer notre jeu davantage à 3-0, mais dans l’ensemble, c’était une bonne performance », a dit Quinn, tout sourire. « Ce n’était pas le match le plus harmonieux, a reconnu le défenseur Matt Benning. Récemment, des effondrements nous ont coûté cher, et ça aurait pu arriver ce soir avec toutes ces pénalités. Mais on a gardé notre confiance. » En passant presque toute la soirée à protéger leur avance, les Requins n’ont toutefois pas fait rêver les spectateurs du Centre Bell, traversant notamment une séquence de 19 min 19 s sans tir au but.

Le « mur » Kähkönen

Matt Benning a dit de Kaapo Kähkönen qu’il avait été un « mur » pour son équipe. La phrase a dû faire chaud au cœur du gardien finlandais, car celui-ci n’avait rien, mais absolument rien d’un mur avant d’affronter le Canadien. Seulement deux victoires en neuf départs, et des statistiques individuelles parmi les pires du circuit. Or, il a très, très bien paru mardi soir. Le but refusé au Tricolore, au début du deuxième vingt, a même semblé le gorger de confiance. « Son meilleur match de l’année », a résumé son entraîneur. Le Centre Bell est résolument un lieu béni pour les gardiens des Sharks, car il y a un peu plus d’un an, en octobre 2021, Adin Hill était lui aussi venu battre le Canadien sur sa propre patinoire au compte de 5-0. Le clairvoyant journaliste Richard Labbé avait alors écrit que Hill, « un ancien membre du Rush de Rapid City », était pourtant « le parfait tonique pour relancer des compteurs qui ne comptent pas ». L’an dernier comme mardi soir, le résultat a été le même.

À l’opposé du mur

À 200 pieds du « mur » Kähkönen, Jake Allen a connu une autre soirée dont on n’extraira aucune séquence pour sa vidéo de retraite. Il n’y pouvait rien sur la déviation de Tomas Hertl qui a fait 2-0, mais les premier et troisième filets des Sharks sont certainement à classer dans la catégorie de ceux qu’il « aimerait revoir ». Ça devient redondant, mais il y a résolument quelque chose qui cloche avec le vétéran portier du CH. À ses trois derniers départs, il a cédé six fois au cours des trois premières minutes de la rencontre. Son taux d’efficacité à cinq contre cinq le place désormais au tout dernier rang des gardiens de la LNH ayant obtenu au moins 10 départs. Martin St-Louis prône la méritocratie dans l’utilisation de ses jeunes défenseurs ; cette politique déteindra-t-elle sur les gardiens de but ? Dossier à suivre.

Ils ont dit

C’était proche… J’ai essayé d’aider nos départs. On avait un bon angle, je savais que ce n’était pas 100 %. Dans la vie, parfois, il faut que tu prennes des chances. Tu ne le sauras pas si tu ne la prends pas.

Martin St-Louis, au sujet de sa contestation du premier but des Sharks

Ils étaient dans nos lignes de tir toute la soirée et ils ont bloqué beaucoup de tirs. C’était à nous de réussir à les contourner.

Sean Monahan

Ce n’était pas de sa faute. C’est un professionnel et il sait comment il peut jouer. Il est solide pour nous.

Mike Matheson au sujet de Jake Allen

Nos vétérans bloquent des tirs, les jeunes les suivent, c’est la culture qu’on veut créer ici. C’est incroyable, ça montre à quel point ces gars veulent notre succès. J’adore ça. Ça crée beaucoup d’énergie au banc. On se nourrit de ça.

Jordan Harris

Le milieu de la glace était ouvert, il a vu l’ouverture. J’ai fait confiance à mon instinct et il a fini ça en beauté.

Matt Benning, au sujet de sa passe spectaculaire à Logan Couture en troisième période