Il n’y a pas que Mitchell Miller qui devra recevoir le feu vert de Gary Bettman s’il désire un jour évoluer dans la LNH.

Logan Mailloux, du Canadien, aura lui aussi l’obligation de « s’entretenir » avec le commissaire du circuit avant de patiner sur la glace du Centre Bell. Son cheminement est suivi de près, confirment la ligue et l’organisation.

D’ordinaire circonspect par rapport aux décisions que prennent les 32 équipes de la ligue, Bettman y est allé d’une fracassante sortie, le week-end dernier, à l’endroit des Bruins de Boston, qui ont offert un contrat d’entrée à Miller.

Le défenseur américain, lorsqu’il était adolescent, a été reconnu coupable de voie de fait contre un camarade de classe atteint d’une déficience intellectuelle. Il lui avait en outre proféré des insultes racistes. La légitimité de ses remords, notamment, est remise en doute.

Même si les fautes commises sont différentes, le cas de Miller « n’a rien de différent » de celui de Mailloux, a reconnu Bill Daly, commissaire adjoint de la LNH, lors d’un point de presse tenu avec Bettman à Winnipeg en début de soirée, mardi.

Alors qu’il évoluait en Suède en 2020, Mailloux a distribué à ses coéquipiers une photo intime de sa partenaire sexuelle. La justice locale l’avait reconnu coupable et lui avait imposé une amende. Le Canadien a créé un scandale, en juillet 2021, en en faisant son choix de premier tour au repêchage.

Mailloux a pourtant signé, le 5 octobre dernier, son premier contrat professionnel avec le Canadien. Le défenseur a depuis été cédé aux Knights de London, dans la Ligue junior de l’Ontario, mais on peut présumer qu’il se joindra au Rocket de Laval ou même au Tricolore dès l’an prochain.

Si Bettman n’a pas d’emblée commenté publiquement cette nouvelle étape dans la réhabilitation de Mailloux, c’est parce qu’il « est au courant de tout ce qui se passe avec Logan », a fait savoir Jeff Gorton, vice-président aux opérations hockey du Canadien, au cours d’une courte entrevue avec La Presse mardi.

Daly et Bettman ont confirmé quelques heures plus tard que Mailloux n’était « pas admissible » à jouer dans la LNH pour l’instant. Sans jamais en déterminer les critères précis, le duo a martelé qu’un joueur pouvait être admissible à signer un contrat au regard de la convention collective et être simultanément inadmissible à jouer aux yeux du commissaire, qui possède le dernier mot.

Molson dans le coup

Avant que le jeune homme appose sa signature au bas d’une entente de trois ans, deux éléments lui ont été « très clairement » exposés, selon Gorton. D’abord, même s’il a « travaillé très fort » sur lui-même afin de devenir une meilleure personne, il devra « continuer de le faire » au cours de la prochaine année à London. Ce contrat, « c’est juste le début », rappelle Gorton.

Ensuite, « quand il sera prêt à devenir un pro et qu’il se rapprochera de la LNH, il devra parler avec Gary Bettman », souligne le gestionnaire, qui a averti le commissaire de l’évolution du dossier après la signature du contrat.

J’ai toujours su que Gary ferait partie de la conversation, et Logan le comprend aussi.

Jeff Gorton

Malgré sa demande à toutes les équipes de la LNH de ne pas le repêcher, Mailloux a été sélectionné par le Canadien en juillet 2021, au 31e et avant-dernier rang du premier tour. Cette décision du Tricolore a choqué le monde du hockey ainsi que la classe politique et la société civile. Le premier ministre Justin Trudeau, entre autres, avait dénoncé cette décision, tout comme Bettman lui-même. Des commanditaires avaient menacé de se dissocier de l’équipe.

Sous haute pression, Geoff Molson avait pris la parole pour calmer le jeu. Prenant la « responsabilité » pour son propre « manque de jugement », il avait insisté sur le fait que repêcher Mailloux était une « erreur ».

Un an plus tard, le président et propriétaire du club a fait partie des « longues conversations » menant à la mise sous contrat de Mailloux, affirme Gorton.

Se remettant d’une grave blessure à une épaule, l’Ontarien a passé tout l’été à Montréal afin que l’organisation supervise sa rééducation. La direction a ainsi eu l’occasion de longuement discuter avec le jeune homme. On a ainsi jugé qu’il avait démontré qu’il comprenait la portée de sa « grave erreur » et qu’il avait « fait des efforts pour s’améliorer individuellement et être plus conscient », a dit le directeur général Kent Hughes quelques jours après l’annonce de l’entente.

Comme Hughes, Gorton insiste aujourd’hui : il ne s’agit pas là d’un chèque en blanc. « On va continuer à travailler avec lui. » Et quand le temps viendra, « on va organiser la rencontre » avec Bettman.

Critiques

Le début de la controverse entourant Miller remonte à 2020. Sa sélection au quatrième tour du repêchage par les Coyotes de l’Arizona avait créé un tel tollé que l’équipe avait rapidement coupé les ponts avec lui.

Sa récente association avec les Bruins n’a, elle aussi, duré que quelques jours. Interrogé le week-end dernier alors qu’il se trouvait en Finlande pour une tournée promotionnelle de la LNH, Bettman s’est étonné que l’organisation ne l’ait pas avisé plus tôt.

Après avoir signé son premier contrat professionnel, Miller s’apprêtait à se rapporter aux Bruins de Providence, dans la Ligue américaine. Grand bien lui fasse, mais il n’allait pas jouer dans la LNH de sitôt, a assuré Bettman.

« S’ils [les Bruins] veulent qu’il joue dans la LNH, nous devrons d’abord lui en donner l’autorisation, et ce, à la lumière des informations que nous aurons en main à ce moment », a tranché le commissaire. Dimanche, après une tempête de 48 heures, les Bruins ont annoncé être revenus sur leur décision et avoir rompu les liens avec lui.

Bettman n’avait pas été plus tendre à l’endroit du Tricolore au cours de l’été 2021. Lors d’une entrevue accordée à Sirius XM dans les semaines ayant suivi le repêchage, il s’était dit « stupéfait » du choix du Canadien. « Je suis le père de deux filles, j’ai quatre petites-filles, et ce qui a été fait est horrifiant », avait-il déclaré.

« Personne ne devrait perdre de vue l’impact de ce qui est arrivé sur la victime et sur sa famille », avait-il poursuivi. Alors que le Canadien et Mailloux avaient promis de faire amende honorable, « nous devrons voir ce que ça signifie », avait dit Bettman.